365 ans après la signature du traité de Basse-Terre, Anse-Bertrand remet à l’honneur son passé Caraïbe
C’est le 31 mars 1660 que Charles Houël alors gouverneur de la Guadeloupe, signe un traité avec les Caraïbes. Les Caraïbes abandonnent la majeure partie de l’île aux Français et refluent sur l’île de la Dominique. Une majeure partie mais tout le territoire. Longtemps après, à Anse Bertrand, toute une partie des terres au pied de la Grande Vigie portera le nom de « Territoire Caraïbe ». Une mémoire que plusieurs associations et la municipalité ansoise, ont décidé de raviver et même, de perpétuer
Dans cette salle de la maire d’Anse-Bertrand il n’y avait plus de place pour contenir tous ceux qui voulaient être de l’évènement. À l’ordre du jour pour la commune, sa réappropriation d’une partie de son histoire, son histoire Caraïbe. Elle l’avait certes un peu oubliée même si au détour d’une rue ou d’un carrefour, il n’est pas rare de tomber sur un panneau qui rappelle un mot que seuls les Caraïbes ont pu inscrire dans la mémoire de cette terre du Nord. Une terre qui leur appartenait, la dernière qui leur sera restée après la signature du traité de Basse-Terre, le 31 mars 1660.
Un traité qui ne favorisait en rien les Caraïbes puisqu’il s’agissait de les restreindre dans la portion congrue et moins exploitable de l’île et en même temps, agrandir les territoires que les colons voulaient s’approprier. Les Caraïbes se voient obligés de céder progressivement leurs terres aux colons qui veulent y cultiver du coton et de la canne à sucre.
Ce traité fut négocié, au nom d’une coalition franco-anglaise des seigneurs-propriétaires de Martinique, Guadeloupe, Montserrat, Antigue, Nevis et Saint-Christophe, par Charles Houël, seigneur-propriétaire de Guadeloupe qui avait su garder de bonnes relations avec les Caraïbes. Il fut conclu le 30 mars 1660 par les membres de cette coalition et quinze chefs amérindiens de Dominique, Martinique, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et Grenade, représentés par le R.P. de Beaumont. Par cet accord, les îles de Saint-Vincent et de la Dominique désignées comme îles neutres étaient laissées aux Caraïbes. Les autres îles furent abandonnées aux Européens. Ce traité figea la situation et jusqu’en 1763 les îles neutres servirent de refuge aux Caraïbes. Cependant, dès la paix revenue, chaque puissance européenne tenta de bien se placer auprès des insulaires afin d’obtenir l’autorisation de s’y installer. Ces derniers maintinrent un contact étroit avec les Français par l’intermédiaire des missionnaires, des époux de certaines des leurs, des métis et des aventuriers qui vivaient parmi eux et parlaient leur langue. Ces liens se raffermirent après les années 1680. La modification du rapport de force franco-anglais fit que la France se trouva, dans les Antilles, de plus en plus dans une situation défensive. Français et Caraïbes constituèrent alors un front de défense commun, une alliance des faibles contre le fort. Profitant de ces liens privilégiés, les autorités françaises utilisèrent donc les Amérindiens pour lutter contre les prétentions anglaises ; même les gouverneurs, qui ne les tenaient pas en haute estime, considéraient qu’il fallait garder de bonnes relations avec eux pour la crainte qu’ils inspiraient aux Anglais.
Benoît Bérard, Gérard LafleurFrançais et Indiens dans la Caraïbe, XVIe-XVIIIe siècles
Les années et les siècles sont passés et ont consacré cette dépossession de ce dernier territoire caraïbe sur l’île et même jusqu’à leur disparition dans les mémoires.
Pour autant, les derniers Caraïbes n’ont jamais quitté Anse-Bertrand. Ni physiquement, et surtout, ni culturellement.
C’est ce souvenir qu’Anse-Bertrand veut désormais raviver. Ce dimanche 30 mars 2025, le maire, entouré de plusieurs associations au nombre desquelles le CORECA, et en présence de représentants des Kalinagos de la Dominique, a choisi d’inscrire cette page d’histoire dans le présent de la commune et par extension, de la Guadeloupe.
Un hommage vivant auquel les représentants des Kalinagos ont été particulièrement sensibles. Un peu comme s’il affirmait vraiment leur existence dans la conscience des Guadeloupéens.
Et le maire d’Anse-Bertrand s’est engagé, avec l’appui des associations présentes, que cette date du 31 mars 1660 fera désormais partie de leur calendrier pour que ce lien noué avec les Kalinagos ce dimanche se renforce avec le temps par tous les moyens possibles.
En allant sur place du côté de la Grande Vigie, il a déjà jeté les bases de ce maillage d’un passé qui se conjuguera désormais au présent.
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