Accorder trop d’importance au maintien d’un poids dit normal – le fameux poids santé défini par l’indice de masse corporelle (IMC) – peut induire autant les professionnels de la santé que les patients en erreur. À cet effet, une récente publication scientifique provenant de la célèbre étude américaine Women’s Health Initiative (WHI) procure un éclairage additionnel intéressant sur les limites de l’IMC et du concept de poids santé (1).
Maladies cardiovasculaires chez la femme
La WHI est une étude ambitieuse avec un échantillon de 161 808 femmes postménopausées américaines âgées de 50 et 79 ans. L’objectif ? Mieux comprendre les facteurs impliqués dans le développement des maladies chroniques spécifiquement chez la femme postménopausée. De l’échantillon total, un sous-groupe de 40 118 femmes avec un soi-disant poids santé et sans histoire de maladies cardiovasculaires a été suivi pendant 20 ans pour la survenue de problèmes cardiovasculaires. Durant la période de suivi, 3821 cas de maladies cardiovasculaires ont été répertoriés dans ce sous-échantillon de femmes postménopausées avec un poids normal (IMC entre 18,5 et 25,0 kg/m2).
Dans le sous-groupe, les chercheurs ont pu examiner cinq variables du mode de vie (qualité de l’alimentation, tabagisme, alcool, tour de taille et niveau d’activité physique) et vérifier leur impact sur le risque de maladies cardiovasculaires. Un score du mode de vie considérant ces cinq facteurs a donc été calculé.
Un mode de vie déterminant
Les résultats de cette étude sont éloquents. Même chez les participantes de l’étude WHI avec un soi-disant poids normal, un score du mode de vie élevé (c’est-à-dire le 20 % de l’échantillon avec le meilleur score) réduisait le risque de maladies cardiovasculaires essentiellement de moitié!
Les auteurs ont par la suite examiné les composantes du score du mode de vie afin de vérifier laquelle semblait la plus pertinente. Mis à part la consommation d’alcool qui ne montrait pas de relation évidente avec le risque de maladies cardiovasculaires, les quatre autres indicateurs montraient tous des associations très claires avec les maladies cardiovasculaires.
Le tour de taille montrait une relation linéaire avec les maladies cardiovasculaires : plus celui-ci était petit, plus le risque était faible. Même en présence d’un poids normal, la mesure du tour de taille est donc importante pour identifier les personnes avec un excès de tissu adipeux abdominal viscéral. Des observations similaires ont été obtenues pour la qualité de l’alimentation et le niveau d’activité physique.
Un dernier élément à souligner à propos de cette étude concerne la présence de maladies ou de facteurs de risque chez les femmes postménopausées. Les auteurs ont réalisé une analyse additionnelle uniquement chez les femmes qui n’avaient pas de diabète de type 2, d’hypertension, ou qui ne prenaient pas de médicaments pour contrôler la tension artérielle ou leurs lipides sanguins. Ici encore, le mode de vie demeure central.
Ainsi, Mesdames, si vous avez un poids « normal » et que votre médecin vous trouve en bonne santé (pas de diabète, d’hypertension et un taux de cholestérol normal), il faut malgré tout bouger, bien manger, ne pas fumer et suivre l’évolution de votre tour de taille!
C’est dommage qu’en 2023, les groupes de médecine familiale ne soient, pour la plupart, toujours pas équipés pour mesurer de façon systématique et standardisée le mode de vie de leurs patients. La mesure des indicateurs du mode de vie est bien plus pertinente, y compris chez les femmes qui ont traversé la ménopause.
(1) Peila R et coll. Healthy Lifestyle Index and Risk of Cardiovascular Disease Among Postmenopausal Women With Normal Body Mass Index. J Am Heart Assoc 2023;12(12):e029111.
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