Japon : alimentation, maladies… Des excréments vieux d’au moins 5000 ans lèvent le voile sur les anciens modes de vie du pays
Découverts dans les différentes strates géologiques, les coprolithes, c’est-à-dire les excréments fossilisés, sont – bien qu’ils paraissent peu ragoûtants – de précieux matériaux pour les paléontologues : ils offrent des informations sur les habitudes alimentaires, la santé, le comportement, le contexte environnemental des animaux du passé… mais aussi, des humains !
C’est ainsi que l’analyse de coprolithes, excavés en nombre sur le monticule de coquillages de Torihama (préfecture de Fukui, Japon), nous en apprend plus sur les fascinants chasseurs-cueilleurs de la culture Jōmon. Notamment, sur les maladies dont ils auraient pu souffrir il y a entre 7 000 à 5 500 ans. Les résultats sont publiés dans PLOS One le 24 janvier 2024.
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Du saumon et des haricots rouges pour les Jōmon
La culture Jōmon est une civilisation mésolithique du Pays du Soleil Levant, qui a évolué sur l’archipel de l’actuelle préfecture de Fukui, bordant la mer du Japon, entre 14000 et 300 av. J.-C. Il s’agit de l’une des premières au monde à pratiquer la poterie, aux œuvres caractérisées par leurs motifs cordés, d’où elle tire son nom – jōmon signifie « motifs cordés » en japonais.
Ses membres pratiquaient la chasse, la pêche et la cueillette, avec une transition vers un mode de vie sédentaire à la fin de la période. Les échantillonnages de 10 des 400 coprolithes individuels retrouvés à Torihama datent toutefois ce site précis à une époque antérieure, celle du Jōmon précoce (5000-3520 av. J.-C.). Outre préciser les périodes d’occupation de la région, ces excréments fossilisés ont permis de caractériser les habitudes alimentaires de ses lointaines populations.
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L’étude montre qu’elles se délectaient autrefois de poissons d’eau douce et d’eau salée, de saumon (Oncorhynchus nerka) notamment, et de haricots rouges (Vigna angulaire). Des données qui confirment celles antérieurement suggérées par des lipides détectés dans les poteries Jōmon.
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Des virus humains encore présents de nos jours
Comme l’expliquent par ailleurs les scientifiques, les coprolithes ont la capacité de conserver des matériaux génétiques provenant des tubes digestifs, l’ADN des microbes et des virus entre autres, parfois similaires à ceux présents dans les déjections d’humains modernes.
C’est ainsi qu’en 2023, en analysant les restes de matières fécales retrouvés dans la vieille ville de Jérusalem, des archéologues ont identifié la présence ancienne du parasite Giardia duodenalis. Et ont ainsi découvert que les élites de la cité auraient pu souffrir, il y a plus de 2 500 ans, de la dysenterie – qui constitue, encore de nos jours, un problème sanitaire majeur dans certains pays.
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Les récentes analyses, menées par les chercheurs de l’Institut national de génétique de l’université de Tokyo et du Musée d’histoire de Wakasa, vont dans le même sens. Malgré la dégradation par le temps de l’ADN caché dans les coprolithes, ils ont pu évaluer quels types de microbes et de virus étaient présents dans le système digestif des humains il y a des milliers d’années.
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Parmi leurs résultats les plus notables, ils soulignent la présence de fragments génétiques de virus homologues au cytomégalovirus humain (ou bêtaherpèsvirus humain 5) et à l’adénovirus humain de type F. Aujourd’hui, tous deux causent des infections d’une gravité plus ou moins importante, en particulier chez les nouveau-nés ou chez les personnes dont le système immunitaire est affaibli.
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L’histoire des bactéries, des virus, des réactions humaines
Les experts japonais ont aussi détecté une forte abondance de bactériophages (en particulier de la famille Siphoviridae), des virus qui infectent et se reproduisent à l’intérieur des bactéries.
Nous avons détecté des séquences provenant de plusieurs types de bactériophages et de leurs bactéries hôtes simultanément, suggérant la coexistence de virus et de leurs hôtes. – Nishimura L, Tanino A, Ajimoto M, Katsumura T, Ogawa M, et al. (2024) PLOS ONE 19(1): e0295924. doi.org/10.1371/journal.pone.0295924
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Ainsi, si elles fournissent des informations inédites sur les agents pathogènes présents dans le passé, leurs méthodes pourraient aussi aider à comprendre comment les bactéries et les virus ont coévolué au fil du temps, indiquent les auteurs de l’étude. Et par extension, pourraient permettre de retracer les interactions entre les micro-organismes et les humains au cours de l’histoire, et d’explorer l’évolution des maladies infectieuses et des réponses immunitaires.
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