Generali Vitality dessine-t-il le futur de l’assurance santé complémentaire? C’est en tout cas, en Europe, l’exemple le plus notable d’un programme incitatif. Comprenez: vous obtenez une récompense si vous adoptez un comportement sain et partagez des informations. Initialement lancé en Allemagne en 2016, Generali Vitality s’est rapidement étendu à la France, puis à l’Autriche et à l’Espagne.
Davantage qu’un programme d’assurance, Generali Vitality participe plus largement de la transformation numérique de cette industrie. Il exploite des outils actuariels, comportementaux et médicaux pour fournir un plan de bien-être complet qui récompense les membres pour des styles de vie plus sains. L’intégration d’applications mobiles de fitness et de traqueurs permet au programme d’évaluer la santé des clients et d’offrir des incitations et des récompenses adaptées à leurs actions de santé proactives.
Les jeunes en bonne santé sont intéressés, surtout s’ils sont technophiles.
«Clairement, ceci n’est que le premier pas», commente le directeur de l’Institut d’économie de l’assurance de l’Université de Saint-Gall (Suisse), Martin Eling. L’expert s’attend à ce que l’assurance santé complémentaire ressemble de plus en plus à l’assurance automobile, qui facture plus cher les polices lorsque les gens ont des comportements à risque ou ont eu des accidents par le passé. Dans ce domaine, Allianz a fait œuvre de pionnier en France avec son produit «conduite connectée», qui inclut un dispositif de suivi de la conduite permettant, le cas échéant, des réductions de primes.
Dans la santé, «bien que cela puisse être critiqué, je crois que les jeunes en bonne santé sont intéressés, surtout s’ils sont technophiles», estime le professeur Eling. Un avis partagé, au Luxembourg, par le CEO de la Caisse médico-complémentaire mutualiste (CMCM), . «Et pas seulement pour les jeunes en bonne santé», lance-t-il. «Il y a de plus en plus de gens qui sont conscients de leur santé et portent une montre qui mesure des valeurs médicales. Le confort de se sentir mieux protégé, allié à la technologie, crée un marché au potentiel énorme pour les programmes incitatifs au Luxembourg.»
Tout ce qui peut provoquer un mode de vie plus sain est bon à prendre.
De là à imaginer qu’un jour, au-delà des incitations, le prix des complémentaires santé puisse être basé sur nos comportements individuels? «Chez les assureurs commerciaux, je peux tout à fait l’imaginer», répond Fabio Secci. «Chez les mutuelles comme la CMCM, certainement pas: nous couvrons tout le monde indépendamment de son état de santé, nous n’excluons aucun risque. Il y aura tout au plus des petites faveurs en lien avec des programmes incitatifs.»
Le CEO de la CMCM n’a pas connaissance, au Luxembourg, de programmes incitatifs qui aillent aussi loin que Generali Vitality. «Il faut dire que, comparé à celui de nos voisins, notre système social généreux laisse moins de place aux complémentaires santé. Dans le domaine préventif, il y a énormément de dépistages prévus, par exemple pour le cancer colorectal à partir de 50-60 ans.»
Pour Fabio Secci, les programmes incitatifs représentent en tout cas un développement intéressant: «Tout ce qui peut provoquer un mode de vie plus sain est bon à prendre du point de vue de la société. Mais attention aux dérives. N’oublions pas que certaines personnes ont une prédisposition naturelle pour certaines maladies.»
Lorsqu’un assureur veut augmenter ses primes santé, il doit le justifier.
Les assureurs commerciaux vont-ils développer l’offre de programmes incitatifs au Luxembourg? Contrairement au CEO de la CMCM, l’administrateur délégué de l’Association des compagnies d’assurances et de réassurances (Aca), , juge le potentiel limité – précisément parce que la branche n’a qu’une faible marge de manœuvre pour proposer des remboursements supplémentaires à ceux pris en charge par la Caisse nationale de santé. Une marge qui existe avant tout pour les traitements dentaires et les lunettes.
Quant au système de bonus-malus qui se dessine plus globalement, Marc Hengen y voit des limites au Luxembourg: «Le grand principe des assurances privées, c’est que la tarification doit être basée sur des éléments actuariels et statistiques. Lorsqu’un assureur veut augmenter ses primes santé, il doit le justifier par un dossier technique bien fourni.»
L’administrateur délégué de l’Aca dit percevoir une forte résistance à l’encontre des malus. «Personne ne veut en entendre parler», estime-t-il. «La discussion tend plutôt vers leur interdiction, comme en témoigne l’introduction au Luxembourg – et dans d’autres pays d’Europe – du droit à l’oubli en matière d’assurance pour les personnes guéries d’un cancer et de certaines autres maladies.»
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