Sobriété : une « image relativement positive » mais une dissonance chez les Français

La notion de « sobriété » a fait « sa grande entrée dans le débat public français en septembre 2022 », ce terme étant alors prononcé « à dix reprises par Emmanuel Macron durant un discours sur la situation énergétique et économique de l’Union européenne », rappelle l’Agence de la transition écologique (Ademe) qui a publié en mars un « Baromètre Sobriétés et modes de vie ».

Une connotation globalement positive

L’Ademe a défini comme suit la sobriété en 2021 : « Dans un contexte où les ressources naturelles sont limitées, la sobriété consiste à nous questionner sur nos besoins et à les satisfaire en limitant leurs impacts sur l’environnement. Elle doit nous conduire à faire évoluer nos modes de production et de consommation et plus globalement nos modes de vie, à l’échelle individuelle et collective ».

Près de 41% des Français interrogés dans le cadre du Baromètre de l’Ademe(1) attribuent spontanément au terme de « sobriété » une connotation positive tandis que 15% lui associent à l’inverse une connotation négative(2).

Précisons que cette appréciation de la sobriété est fortement « corrélée à l’intensité de la contrainte budgétaire ressentie par les individus » : la moitié des personnes estimant « vivre confortablement » attribuent ainsi une connotation positive à la notion de sobriété, deux fois moins au sein des ménages ayant le sentiment de « ne vraiment pas s’en sortir » sur le plan financier.

Consulter le « Baromètre Sobriétés et modes de vie » de l’Ademe (mars 2024).

82% des Français pensent avoir un mode de vie d’ores et déjà sobre

Les trois termes en lien avec la sobriété les plus cités spontanément par les Français sont « simplicité », « économies » et « énergie » (le terme « environnement » n’est quant à lui cité qu’en 8e position).

Selon l’enquête de l’Ademe, 82% des Français considèrent « suivre un mode de vie d’ores et déjà sobre ». Les Français font état « à des degrés divers, d’une diversité de pratiques qui ont pour conséquences de limiter l’impact de leur mode de vie » sur leur consommation d’énergie et l’environnement : s’habiller plus chaudement plutôt qu’augmenter le chauffage, éviter l’avion ou la voiture pour partir en vacances, privilégier les achats de produits de seconde main, conserver ses appareils numériques le plus longtemps possible, etc.(3).

Exemple emblématique en matière d’énergie : la consigne de chauffage des logements « de 19°C, largement diffusée durant la période hivernale de 2022 suite aux craintes de pénurie d’approvisionnement en électricité, s’est manifestement ancrée dans les esprits » : les Français estiment en moyenne que leur logement est chauffé à 19,7°C.

Dissonance cognitive

L’adoption de pratiques dites « sobres » est avant tout mue par des considérations économiques, à l’image des baisses de consommation de gaz et d’électricité durant la crise énergétique (seuls 15% des Français sont « explicitement engagés dans des pratiques de sobriété dans la majorité des domaines de leur mode de vie pour des motivations écologiques »). À l’inverse, les pratiques peu sobres sont souvent justifiées par les Français par un manque d’alternatives.

L’Ademe souligne « une dissonance entre valeurs écologiques et attachement aux modes de vie actuels » chez les Français. Ceux-ci sont confrontés à deux systèmes de valeurs qui s’opposent sur le plan environnemental : valorisation des comportements dits « vertueux » et valeurs « consuméristes » (« dans 57% des cas, la voiture que les individus possèdent est une source de fierté »).

Alors que le phénomène de « flygskam » (honte de prendre l’avion ou « avihonte » en suédois) a fait l’objet de nombreux articles, notons que l’Ademe signale que « seules 14% des personnes qui prennent l’avion disent avoir honte de le faire » en France.

« Jusqu’à près de 30% de de baisse des consommations » d’ici 2050 ?

Dans tous les scénarios de prospective « Transition(s) 2050 » de l’Ademe, le principal levier des baisses de consommations d’énergie en France est l’efficacité énergétique qui pourrait permettre de réduire « d’au moins 40% » lesdites consommations d’ici 2050.

Mais la sobriété peut également jouer un rôle majeur indique l’Ademe, « avec un impact allant jusqu’à près de 30% de baisse des consommations d’énergie finale ». Prenant en exemple la baisse de 12% de la consommation française de gaz et d’électricité durant l’hiver 2022-2023, l’Agence appelle ainsi à une sobriété plus structurelle.

Consulter le feuilleton « Sobriété » de Transition(s) 2050 : Quelle place dans la réduction des consommations d’énergie et d’émissions de GES en 2030 et 2050 ?

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