C’est le conflit le plus long dans lequel s’est engagée la France au cours du XXe siècle et pourtant le moins connu du grand public, ignoré alors et oublié depuis. Entre 1947 et 1954, l’armée française a tenté d’empêcher la séparation de l’Indochine de son empire colonial, dans le sang… et sans y parvenir. Une histoire que retrace le documentaire Indochine, la guerre oubliée.
Jusqu’en 1940, dans la « colonie moderne », basée sur l’exploitation des ressources, au premier rang desquelles les 23 millions d’habitants, personne n’aurait remis en question la suprématie tricolore. Mais avec la débâcle de juin, les autochtones mesurent que le coq français n’est pas invincible. D’ailleurs les Japonais qui prennent pied en Indochine pour « protéger » la population prouvent qu’ils peuvent mettre au pas les Occidentaux. Laos, Cambodge et Vietnam sont prêts à écouter les voix de l’indépendance. Mais c’est dans ce dernier pays, dont une grande partie de la population n’a pas voulu comme ailleurs suivre un dirigeant fantoche poussé par Paris, que vont se cristalliser les tensions.
La crise politique détourne l’opinion du sujet
Ho Chi Minh, qui fonde le Viet Minh en 1941, saura tirer profit de la situation, réussissant même à faire former ses hommes par l’armée américaine au motif de la lutte contre le Japon. Mais en 1945, il proclame le Vietnam « libre et indépendant » avant que les Français ne reviennent. De Gaulle, chef du gouvernement provisoire, refuse et envoie la division Leclerc et ses 45 000 hommes. C’est le début d’un bras de fer, diplomatique pour partie, mais surtout militaire, qui dégénérera en conflit ouvert à la Noël 1946, quand « oncle Ho » appelle au soulèvement général.
Dans l’Hexagone pourtant, les intérêts en jeu, économiques et stratégiques, autant que la crise politique qui fait valser les gouvernements, détournent l’opinion du sujet. Il faudra attendre un peu que le PCF déclare, dans l’Humanité, « Plus un homme, plus un sou » pour cette « sale guerre » afin que le pays s’en émeuve. Les images clandestines filmées par des militants de cercueils de soldats rapatriés discrètement, puis l’arrestation des activistes communistes Henri Martin et Raymonde Dien enfonceront le clou.
David Korn-Brzoza et Olivier Wieviorka livrent ici un travail honnête, même s’il n’est pas dépourvu de quelques piques anticommunistes lorsqu’on évoque les visées révolutionnaires d’Ho Chi Minh, qui voyait plus loin que la résolution du conflit. Il est toutefois regrettable que pour évoquer le triste épisode de Dien Bien Phû, ils aient donné la parole à Hélie de Saint-Marc, officier de la Légion qui a toujours cultivé ses attaches à l’extrême droite et sera plus tard condamné à la prison pour avoir participé au putsch des généraux en Algérie. Autres temps, mêmes guerres…
Indochine, la guerre oubliée, France 3, mercredi 1er mai, 21 h 10
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