CNC : le cas Boutonnat électrise le monde du cinéma à la veille du lancement du festival de Cannes

Sur une pancarte, ces mots inscrits en lettres rouges : « Clap de fin pour les agresseurs ». Les slogans fusent pour réclamer le départ du président du CNC. « Séparer l’homme du CNC », ironise la banderole des manifestants.

Dominique Boutonnat, président du CNC, est accusé par son filleul d’agression sexuelle. Le jeune homme dénonce une agression sexuelle, qui se serait déroulée à l’été 2020. L’ancien producteur de cinéma est à la tête du CNC depuis juillet 2019, reconduit en juillet 2022 pour trois ans de mandat. Son procès pour agression sexuelle doit se tenir à Nanterre le 14 juin prochain.

Judith Godrèche en première ligne

Fin février 2024, l’actrice Judith Godrèche avait publiquement dénoncé en audition au Sénat, le maintien dans ses fonctions de Dominique Boutonnat, par la ministre de la Culture, Rachida Dati. Judith Godrèche en a parlé directement à Rachida Dati, lors d’une rencontre après la cérémonie des César. « Ce à quoi, elle m’a répondu la présomption d’innocence », a raconté l’actrice lors de son audition au Sénat, fin février. « Je lui ai dit que ce n’était pas la question, mais une question de symbole », a-t-elle confié aux sénateurs.

Le Sénat s’empare du dossier

Quelques jours plus tard, deux importantes instances du Sénat avaient relayé l’indignation de la comédienne. La présidente de la Délégation aux droits des femmes du Sénat, Dominique Vérien, ainsi que celui de la Commission de la Culture du Sénat, Laurent Lafon avaient publié un communiqué demandant le départ de Dominique Boutonnat de la présidence du CNC. « Nous partageons [la] conviction [de Judith Godrèche] quand elle affirme que la confiance est un facteur primordial pour inciter les victimes de ces violences à parler. Nous vous demandons par conséquent de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin [aux] fonctions [de Dominique Boutonnat] », écrivaient alors les sénateurs.

« Une de ses missions, c’est d’éradiquer les violences sexuelles. Donc comment fait-on pour éradiquer les violences sexuelles quand on est soi-même poursuivi sur le sujet ? », s’interroge aujourd’hui Dominique Vérien, la présidente de la Délégation aux droits des femmes du Sénat.

Dominique Vérien ajoute : « On lui demande de mettre en place les formations pour lutter contre ce que lui-même avoue avoir fait ». En effet, la sénatrice explique que Dominique Boutonnat a « avoué avoir eu un comportement probablement inadapté ».

Laurent Lafon évoque son incompréhension

Selon le président de la commission Culture du Sénat, Dominique Boutonnat aurait dû se mettre en retrait, le temps de son procès. Laurent Lafon ajoute : « Quand on préside une structure, on l’incarne aussi. Il met certainement beaucoup de gens mal à l’aise, à l’intérieur du CNC. »

« Penser que le président du CNC qui passera au tribunal au mois de juin puisse être sur les marches de Cannes est un très mauvais signal envoyé au monde du cinéma et à toutes celles et tous ceux qui sont victimes d’agressions », conclut Laurent Lafon.

« Langue de bois » du gouvernement

Les sénateurs regrettent l’absence de réaction, depuis le mois de mars, de la part de l’exécutif. « On ne peut pas toujours s’abriter sous la présomption d’innocence, déplore Laurent Lafon. Oui, il y a une présomption d’innocence, il n’empêche : il y a une responsabilité individuelle des personnes mises en cause. […] Ce n’est pas uniquement un dépôt de plainte […] il y a eu une enquête, un renvoi vers la Justice : on ne peut pas s’abriter systématiquement derrière cela. J’ai du mal à comprendre, depuis le début, la position de l’exécutif sur la gestion du cas Boutonnat ».

De son côté, Dominique Vérien pensait avoir des réponses concrètes de la part de Rachida Dati, début mars, au moment de la publication du communiqué sénatorial. Finalement, devant la commission de la Culture, la ministre « a ressorti la même langue de bois que tout le monde en disant ‘présomption d’innocence’ », regrette la sénatrice de l’Yonne.

Les regards se tournent vers Cannes

Cette initiative devant le siège du CNC intervient à la veille du début du Festival du film de Cannes. Une grand-messe du cinéma qui pourrait être marquée par des révélations fracassantes : une liste de dix personnalités (acteur, producteur, réalisateur) pourrait être publiée. Tous seraient accusés de violences sexuelles. Cette « rumeur » met actuellement le cinéma français « sur les nerfs », comme le note Courrier international.

Crédit: Lien source

Les commentaires sont fermés.