Avec Sphere, Las Vegas a changé d’époque et de dimension

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Que vous filiez sur Sands Avenue ou que vous remontiez Howard Hughes Parkway, vous la verrez, tantôt surgissant tel un corps céleste qui éclipserait le ciel après l’hôtel The Venetian, tantôt se dévoilant avec plus de lenteur, comme un dôme monumental émergeant des sables du désert. Mais où que vous soyez à Vegas, elle ne sera jamais loin. Le jour, c’est une bille mauve géante, un totem façon pyramide ou ziggourat ; la nuit, c’est un globe entièrement dévolu aux technologies de l’information.

Sphere – sans article, juste “Sphere” – a fait bouger les lignes à Las Vegas. Situé à l’est du célèbre Strip [l’avenue où se trouvent les principaux hôtels et casinos], l’édifice y a déplacé l’an dernier l’épicentre du tourisme. Sa conception, elle, en bouleversait l’identité architecturale.

Pourtant, les ondes gravitationnelles liées à l’arrivée en ville de Sphere s’étendent bien au-delà de Sin City [la “ville du péché”, surnom de Las Vegas]. Impossible en effet de passer à côté du phénomène en 2023, qu’il se décline sous la forme d’un œil gigantesque, d’une citrouille d’Halloween édentée, d’une publicité géante pour Paramount+ ou de milliers d’autres variations. Sphere est l’ouvrage architectural de l’année, de la décennie, voire du siècle – visible, paraît-il, depuis l’espace.

L’ouvrage de tous les records

Les manuels de physique décrivent parfois un trou noir comme une boule de billard qui s’enfonce dans le tapis vert, entraînant avec elle la masse et la lumière. En 2023, Sphere a été cette boule : un inévitable concentré de contenu viral, fait d’images saisissantes et de sommes d’argent astronomiques.

Les records gravitent autour de Sphere comme des satellites. Avec ses 112 mètres de haut et ses 516 mètres de large, il s’agit du plus grand objet sphérique au monde. Elle est aussi le plus grand écran vidéo de la planète, avec 54 000 m2 de pixels LED sur sa surface externe. Cette expérience visuelle s’exprime en chiffres vertigineux : résolution de 18K, 160 000 haut-parleurs, capacité de projeter des films d’une taille d’un demi-pétaoctet.

James L. Dolan, le clivant magnat du divertissement new-yorkais à l’origine du Madison Square Garden, a passé près d’une décennie à concrétiser sa vision d’un amphithéâtre immersif de 17 500 places. Avec une facture de 2,3 milliards de dollars [2,15 milliards d’euros], c’est de loin le lieu de divertissement le plus cher jamais construit à Vegas, et peut-être aussi le premier à essuyer une perte de quelque 100 millions de dollars [93 millions d’euros] en l’espace de trois mois seulement.

Bien avant son inauguration en septembre – avec une résidence époustouflante de U2 –, Sphere a drainé les foules, avec beaucoup de curieux venus d’ailleurs. Carolina A. Miranda, critique au Los Angeles Times, a été la première à décrire la façon dont Sphere s’inscrit dans l’histoire architecturale de la ville, reportage sur le terrain à l’appui. L’édifice a suscité autant d’avis qu’il a écoulé de billets d’entrée : Charlie Warzel, du mensuel The Atlantic, a raconté a

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