Le zodiaque, temps des hommes, temps de Dieu, la chronique de Dominique Pierre

Conscients depuis des temps très anciens de la dimension cyclique du temps, les êtres humains ont compris très tôt que l’observation du ciel permettait d’en prendre plus précisément la mesure. En effet, puisque le point de vue que nous avons sur la voûte céleste ne cesse d’évoluer au fil de l’année, les étoiles qui pointent à l’horizon avant le lever du soleil ne sont pas les mêmes. Pour se repérer, nos ancêtres ont ainsi identifié douze groupes d’étoiles qui se succédaient de mois en mois et ont donné un nom à chacune : ce sont les constellations du zodiaque.

Parallèlement à ces constatations astronomiques, les civilisations antiques cherchèrent aussi à donner un sens à ce mouvement des planètes. Le monde gréco-romain, familier d’une forme de fatalisme astral, pensait que le destin, telle une loterie, restait déterminé par l’étoile (bonne ou mauvaise) sous laquelle chacun naissait. Une idée rejetée par le christianisme naissant qui proclamait que la foi au Christ libérait justement de cette prédestination : « Nous ne sommes plus menés par le destin et nous donnons congé aux astres qui font la loi » (Tatien, IIe siècle).

Selon une tradition qui remonte aux Pères de l’Église, le Christ régit les temps nouveaux

Si l’Église a toujours gardé une certaine distance vis-à-vis de l’astrologie, elle ne s’est jamais opposée à la représentation des signes du zodiaque comme évocation du déroulement de l’année. Ils sont souvent associés aux images des travaux des champs basés sur l’observation de la nature au fil des mois. La combinaison de ces deux calendriers dans les décors de certaines églises médiévales invite à une compréhension plus large du temps : celle du Christ et de l’Église.

Selon une tradition qui remonte aux Pères de l’Église, le Christ régit les temps nouveaux : il est tout autant le « Soleil de justice » (Malachie 3, 20), que « l’Année » (Isaïe 61, 2) ou le « Jour » (Ps 117, 24). Contrairement à l’astre solaire qui commence à décliner après le solstice d’été, le Christ demeure toujours au zénith. C’est ce que le tympan de la basilique de Vézelay évoque en image. En effet, le cycle des signes du zodiaque et des travaux des mois y est interrompu à son sommet (au-dessus de la tête du Christ), laissant la place à trois formes circulaires qui évoquent la Trinité : une façon de montrer que le temps des hommes n’a de sens que compris dans le temps de Dieu. De chaque côté du tympan au pied des travaux des mois et des signes astraux, deux médaillons évoquent l’un le pain, l’autre le vin : le travail de l’homme est fait pour être sublimé dans ces aliments qui deviennent par le sacrement de l’eucharistie une nourriture spirituelle.

C’est par la liturgie et la vie chrétienne que l’on entre dans le temps de Dieu

Dans le même esprit, il faut évoquer un vitrail du déambulatoire sud de la cathédrale de Chartres. Dans cette verrière, les signes du zodiaque et les travaux des mois, y sont encadrés, au sommet, par le Christ, et tout en bas, par un personnage sonnant la cloche qui rythme le temps de l’Église. Sa corde verticale semble le relier au Christ, maître du temps (chronocrator). Ce « frère Jacques » du XIIIe siècle sonne-t-il « les matines » ou bien un autre office ? Il nous rappelle en tout cas que si l’observation du ciel ou celle de la nature au fil des mois nous permet de mesurer le temps humain, c’est par la liturgie et la vie chrétienne que l’on entre dans le temps de Dieu.

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