Le 11 juin dernier, à Mansila, au nord-est du pays, plus d’une centaine de soldats burkinabè étaient tués et certains pris en otage par les jihadistes du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, liés à al-Qaïda. Aucune déclaration de la junte…
Le lendemain, une roquette était tirée sur le siège de la télévision nationale, près de la présidence, à Ouagadougou. Un simple « incident de tir » selon les autorités. Dimanche dernier, le chef de la junte, le capitaine Traoré faisait une courte apparition publique à l’occasion de la Tabaski, sans s’exprimer. Et hier, le Conseil des ministres n’a pas eu lieu. Une source à la présidence burkinabè indique qu’il devrait avoir lieu ce jeudi, sans donner davantage d’explications.
La grogne dans les casernes ?
Alors que se passe-t-il au Burkina Faso ? D’après Le Monde Afrique, « la contestation monte dans les casernes contre l’autorité du capitaine Ibrahim Traoré. Selon des sources concordantes, hier, le chef de la junte restait caché dans un endroit inconnu et des pourparlers entre soldats sont en cours pour décider de l’avenir du régime. Arrivé au pouvoir par un coup d’État le 30 septembre 2022, IB, comme le surnomment les Burkinabés, aurait été exfiltré in extremis après le tir de la semaine dernière aux abords de la présidence, affirme le journal. Dans un communiqué non signé, diffusé avant-hier mardi dans la soirée, l’état-major des armées a démenti l’existence de « mouvements d’humeur et de mutinerie dans certaines casernes militaires », dénonçant des « informations infondées et mensongères » lancées dans l’objectif de « créer la psychose dans l’opinion publique ».
Dans le même temps, pointe encore Le Monde Afrique, un document intitulé « Appel à tous les soldats » a circulé sur les réseaux sociaux. Rédigé par un groupe se présentant comme « les patriotes combattants militaires, volontaires pour la défense de la patrie, policiers, gendarmes », le texte appelle « tous les soldats à rester mobilisés pour finir avec ce régime ». « À bas les militaires politiciens. (…) On ne veut plus de IB au pouvoir », peut-on y lire. Les auteurs de ce document dénoncent la mort de centaines de soldats au front pendant que, à Ouagadougou, « les autorités mentent aux gens », et que les militaires proches de la junte « ont tout le matériel et l’argent ». »
En effet, précise Le Monde Afrique, « certains militaires évoquent le favoritisme dont bénéficieraient les éléments proches du président pour expliquer cette grogne. »
Et le journal de citer cette source sécuritaire : « d’autres militaires, eux aussi opposés au capitaine, tentent de récupérer la colère des jeunes de la garde. Des tractations sont en cours, dans l’objectif de structurer un coup d’État. Mais, pour l’instant, ils n’arrivent pas à dégager un leadership, d’où le silence de ces derniers jours. »
Questionnements…
Alors le régime est-il en train de vaciller ? « Le doute est d’autant plus permis, relève le site Afrik.com, que, depuis avant-hier mardi, il est rapporté l’arrivée au Burkina Faso de dizaines de soldats maliens et d’éléments de Wagner débarqués par un avion russe qui a fait plusieurs allers-retours entre Gao et Ouagadougou. Tout ceci sans le moindre communiqué officiel. Tous ces éléments qui s’enchaînent sont de nature à susciter des questionnements. Des questionnements auxquels seules les autorités au plus haut niveau du Faso peuvent répondre. »
Le 5e pouvoir…
Dans la presse burkinabé, très peu de commentaires… Le quotidien Aujourd’hui fait sa Une sur ce qu’il appelle le « 5e pouvoir » : à savoir les réseaux sociaux qui propagent toutes les rumeurs… « Le 5e pouvoir fait rage au Burkina en apnée ! », s’exclame Aujourd’hui. « Sur la toile, on a vu et entendu tout, et malgré le démenti de l’état-major, ce 5e pouvoir continue son équipée virale. »
Le quotidien ouagalais revient sur le report hier du Conseil des ministres : « ce n’est pas une première !, affirme-t-il. Il arrive que pour cause d’agenda surbooké, le Conseil des ministres se tienne le jeudi ou le vendredi ou même pas du tout. Mais si l’opinion frétille comme une queue de poisson, c’est que (…) chacun voulait voir si c’était bien IB qui présiderait cette réunion hebdomadaire. »
En tout cas, conclut Aujourd’hui, « c’est un Burkina Faso en apnée (donc) qui attend de voir si tout ce qui se passe depuis une semaine, relève d’un drible de la part d’un stratège militaire rompu aux techniques commandos, ou bien l’aveu d’un grain de sable dans la gouvernance de la Transition. »
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