Population croissante, mais peu de relève en dentisterie

Alors que la population du Nouveau-Brunswick connaît une croissance historique, le nombre de dentistes qui la dessert dans la province est demeuré stable et la relève n’est pas abondante. Il devient donc difficile de répondre à la demande.

C’est du moins ce qu’affirme Paul Blanchard, directeur général de la Société dentaire du Nouveau-Brunswick.

Depuis la pandémie de COVID-19, il indique que le nombre de dentistes desservant la province a oscillé autour de 370 à 375. Pendant ce temps, la population totale du Nouveau-Brunswick serait passée de 777 500 habitants, en 2019, à 860 000, en 2024, selon les estimations de Statistique Canada. Il s’agit d’une augmentation de plus de 10%.

La Société dentaire s’inquiète notamment de l’âge avancé de ses membres, dont 40% ont plus de 50 ans, mais aussi du manque de personnel de soutien. Le nombre d’effectifs laisse également à désirer du côté des hygiénistes et des assistants dentaires.

«C’est un gros défi», lance M. Blanchard en ce qui concerne compenser les départs à la retraite et de pouvoir répondre à la demande. C’est particulièrement le cas dans un contexte où la relève ne semble pas se bousculer aux portes des écoles – autre source d’inquiétude.

Pour ce qui est du personnel de soutien, le collège Oulton a élargi son offre, ce qui permet au directeur général de la Société dentaire d’être un peu optimiste face à l’avenir. Cela dit, il affirme que du côté francophone, le CCNB peine à trouver preneurs pour les seize places disponibles dans son programme.

«En général, ils ont de la misère à en trouver plus que six ou sept», précise-t-il.

Pour ce qui est des formations des dentistes, il note qu’il existe une entente entre le Nouveau-Brunswick et le Québec pour que chaque année, cinq étudiants de la province maritime puissent étudier à l’Université Laval ou à l’Université de Montréal en payant les mêmes frais que les étudiants locaux.

«Mais le problème, c’est qu’il n’y a personne qui fait le suivi pour savoir si cinq étudiants sont admis à chaque année ou non, laisse-t-il tomber. On n’a aucune idée si le plan est utilisé.»

D’autre part, les outils de recrutement laissent à désirer, selon le directeur général.

«Tous les ans, on va rencontrer les étudiants à [l’Université] Dalhousie. On va avoir un petit kiosque qui va être installé à côté de celui de l’association de Terre-Neuve et, eux, ils ont une bourse de 50 000$ à offrir. Nous, on est là à se tourner les pouces. C’est frustrant», illustre-t-il.

La bourse en question est offerte en échange d’un engagement d’un an de service sur le territoire de Terre-Neuve-et-Labrador de la part de l’étudiant qui l’accepte. Il s’agit d’une démarche dont le Nouveau-Brunswick devrait s’inspirer, estime M. Blanchard.

«Ça pourrait beaucoup nous aider avec la pénurie de dentistes», avance-t-il.

Le régime canadien en ajoute

À cette situation s’ajoute l’arrivée du Régime canadien de soins dentaires (RCSD), qui offre une aide financière à de plus en plus de Canadiens depuis décembre 2023, afin qu’ils puissent accéder à certains soins buccodentaires.

Pour l’instant, les résidents canadiens âgés de 65 ans et plus, de moins de 18 ans ou en situation de handicap, qui n’ont pas déjà accès à une assurance dentaire et dont le revenu familial net est inférieur à 90 000$, peuvent bénéficier de la couverture du RCSD.

«Il vient nous apporter plus de patients, mais nos capacités sont déjà à bout», affirme Paul Blanchard.

Il ajoute que le programme fédéral représente un fardeau administratif supplémentaire pour les cliniques dentaires participantes et sème la confusion du côté de la patientèle.

«Les cliniques sont déjà débordées. Elles n’ont pas le temps d’essayer d’expliquer le fonctionnement du programme à chaque personne.»

Le RCSD exige pour le moment une signature de contrat de la part des dentistes qui souhaitent participer au programme, ce qui est inhabituel et dissuasif, selon lui.

«Il y a très peu de dentistes dans la province qui sont inscrits», souligne-t-il.

Cela dit, dès le 8 juillet, il sera possible pour les cliniques d’envoyer des réclamations au fur et à mesure au RCSD, comme c’est le cas pour les assurances privées. Il s’agit d’un mode de fonctionnement plus simple qui pourrait en inciter davantage à participer.

M. Blanchard indique cependant que seule Santé Canada sera en mesure de savoir si ce sera effectivement le cas.

Il souligne d’autre part que la communication du gouvernement fédéral a laissé à désirer en ce qui concerne les soins et les montants couverts et que certains politiciens auraient dits que seule une carte d’assurance maladie pourrait être nécessaire pour être servi.

«100 % des coûts des services de soins buccodentaires admissibles seront couverts selon les tarifs établis par le RCSD», peut-on lire sur le site du régime, dans la section d’un encadré associé aux personnes admissibles dont le revenu familial annuel net est de moins de 70 000$.

Or, les tarifs établis par le RCSD et ceux des cliniques dentaires peuvent différer. Donc, si le programme détermine que le coût d’un nettoyage est de 75$, mais qu’un bureau de dentistes facture plutôt 115$ pour le même service, le patient se retrouvera à devoir payer la différence, soit 30$.

«Il rembourse environ 85% des frais du guide des tarifs dentaires [de la Société dentaire du Nouveau-Brunswick]», précise Paul Blanchard, ajoutant que certains dentistes facturent davantage que les prix suggérés.

Il est à noter que la fréquence des soins donnés est aussi limitée. D’autre part, certains de ces patients n’ont pu bénéficier de soins pendant plusieurs années et nécessitent des traitements complexes qui ne sont pas encore couverts par le régime. Il faudra attendre en novembre, alors que le programme inclura certains services qui nécessiteront une autorisation.

Les limites d’âge seront ensuite éliminées du RCSD à compter de 2025.

«Les gens ont besoin d’être patients. C’est un gros programme ambitieux, conclut Paul Blanchard. Je pense que le besoin est beaucoup plus grand que notre capacité à traiter les gens.»

Crédit: Lien source

Les commentaires sont fermés.