Côte d’Ivoire: les champs de café délaissés, vers une pénurie du robusta?

En Côte d’Ivoire, la production de café a chuté de 61,6% entre les neuf premiers mois de 2022 et les neuf premiers mois de 2023, selon la Direction des prévisions, des politiques et des statistiques économiques (DPPSE). En raison des prix bas ces dernières années, mais aussi de la hausse du coût de la main d’œuvre, la culture du café est délaissée par de nombreux agriculteurs.

De notre envoyé spécial dans la région de Tiassalé,

Conditions climatiques défavorables, travaux de désherbage éreintants, prix bord-champ trop faibles… Adro Kouassi Nestor, cultivateur ivoirien, dresse la longue liste des raisons pour lesquelles il délaisse peu à peu ses caféiers : « C’est le prix que le Conseil café-cacao fixe pour le cacao et le café, c’est aussi la main-d’œuvre qui se fait rare. Et c’est ça qui fait chuter la production du café. Parce que travailler dans les champs de café est très intense, surtout pendant la récolte. » Il poursuit : « Et si tu n’as pas la main d’œuvre, tu ne peux pas y arriver. Et puis le prix n’est pas encourageant. Donc, ça fait que le café est délaissé au profit des autres cultures, comme le cacao et l’hévéa. »

Le cultivateur parcourt son champ de 50 mètres carrés, les cerises de café sont mûres. Mais il peine à trouver des travailleurs agricoles pour le ramasser. Les fourmis rouges dérangent les cueilleurs, une cueillette longue et minutieuse qui doit se faire en plusieurs étapes. « Vous passez pied par pied pour cueillir. Il faut prendre celles qui sont bien mûres et puis revenir, explique-t-il. Donc, c’est tout un tas de problèmes. »

Des champs de café délaissés qui pourraient provoquer une pénurie de robusta

Des contraintes et beaucoup de temps à passer qui le démotivent et l’amènent parfois à ne même pas ramasser sa récolte. « À mon niveau, j’accorde moins d’importance au café. J’ai fait un champ. Quand ça mûrit et que je ne trouve pas quelqu’un pour cueillir, vu le temps que ça va me prendre [pour ramasser] et le prix que les gens vont payer, je préfère le laisser », conclut Adro Kouassi Nestor. Ceci malgré un léger rebond du prix bord-champ fixé par l’État à 900 francs CFA le kilo pour la campagne 2023-2024, contre 700 francs CFA l’année précédente.

Etienne Papou est cultivateur de café et expert en certification du cacao. Lui note les effets du changement climatique sur les récoltes. « C’est vrai que ces dernières années, le prix du café a considérablement augmenté, mais certains producteurs avaient déjà abattu les pieds de café pour les remplacer soit par de l’hévéa, soit par du palmier, soit aussi par du cacao. Les quelques-uns qui ont gardé des plants de café les ont abandonnés et sont devenus des friches », met-il en avant.

La Côte d’Ivoire produit quasi exclusivement du robusta, entre 50 et 100 000 tonnes par an, trois fois moins que dans les années 1970. Au niveau mondial, la production de robusta est également en baisse. Le dérèglement climatique menace directement l’industrie du café, les experts s’attendent même à une pénurie de robusta dans les années 2040.

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