Pas un sou de plus

Depuis cinq ans, Énergie NB et le gouvernement Higgs rêvent de faire du Nouveau-Brunswick un chef de file dans le développement de réacteurs nucléaires modulaires (surnommés miniréacteurs nucléaires). Les événements des dernières semaines nous font craindre que les millions de dollars déjà dépensés en subventions l’aient été en pure perte.

La lubie de transformer notre province en une sorte de grand leader de l’industrie nucléaire ne date pas d’hier.  Quand Pointe Lepreau a été construite, dans les années 1980, on prévoyait aussi construire une centrale Pointe Lepreau 2.

L’intérêt du Nouveau-Brunswick pour les miniréacteurs nucléaires est plus récent . Il date d’avant l’arrivée au pouvoir des progressistes-conservateurs.

Énergie NB est lourdement endettée et elle devra injecter des milliards de dollars dans la réfection du barrage de Mactaquac. Elle cherche désespérément une solution magique. Il y a quelques années, elle a perdu des millions de dollars en subventionnant Joi Scientific, qui promettait de révolutionner la production d’électricité à base d’hydrogène. Cette technologie aurait, selon des physiciens, défié les lois de la physique.

Avec les miniréacteurs nucléaires, Énergie NB rêve désormais de redevances totalisant des milliards de dollars sur la vente de réacteurs.

La plupart des politiciens ne remettent pas cette vision en question, de peur de se mettre à dos les électeurs de la cité portuaire.

En 2018, le premier ministre Brian Gallant était déterminé à sauver les meubles pour son parti à Saint-Jean. Il s’était même nommé ministre responsable de cette région. C’est à cette époque que son gouvernement a annoncé une subvention de 10 millions $ afin de former un groupe de recherche sur le nucléaire.

Lors de la campagne électorale de 2020, tant Blaine Higgs que le chef libéral Kevin Vickers ont louangé les miniréacteurs. Lors du débat des chefs en français, M. Vickers avait passé de longs moments à vanter aux téléspectateurs francophones cette industrie devant pourtant surtout profiter à la région de Saint-Jean.

Les progressistes-conservateurs ont facilement été reportés au pouvoir. Quelques mois plus tard, ils annonçaient une subvention de 20 millions $ pour l’industrie. Le fédéral a surenchéri en ajoutant

56 millions $ à la cagnotte.

Deux entreprises ont présentement leurs quartiers à Saint-Jean: ARC Clean Energy et Moltex Energy. Il s’agit d’entreprises de taille modeste, communément appelées startups. Elles n’ont pas les reins particulièrement solides et ont choisi de s’établir au Nouveau-Brunswick en raison de la générosité des contribuables. Le jour où Fredericton et Ottawa cesseront de distribuer les millions de dollars, elles fermeront boutique ou iront ailleurs pour quêter l’argent d’autres contribuables.

Nous ne sommes apparemment pas les seuls à douter de la capacité de ces deux startups à réussir au Nouveau-Brunswick ce que nul n’a encore réussi sur la planète.

L’ancien ministre de l’Énergie, Mike Holland, ne ratait jamais l’occasion de vanter le projet des réacteurs modulaires. Dans un récent reportage, le Globe and Mail a qualifié d’évangéliste de cette industrie ce politicien qui affirme avoir vu «une opportunité pour que le Nouveau-Brunswick ne fasse pas que participer, mais qu’il devienne un leader mondial dans le domaine des miniréacteurs».

La position de M. Holland à propos des ambitions néo-brunswickoises a semble-t-il évolué. Il vient d’être embauché par une multinationale québécoise, AtkinsRéalis (anciennement connue sous le nom de SNC-Lavalin), qui met au point sa propre technologie. Ce projet serait plus avancé que ceux des deux entreprises subventionnées au N.-B.

L’une d’entre elles, ARC Clean Energy, éprouve des difficultés financières. Elle a annoncé  récemment une série de mises à pied ainsi que le départ de son PDG.

Par ailleurs, les délais s’allongent. Il y a deux ans, l’ex-ministre Holland affirmait que les mini-réacteurs seraient opérationnels d’ici 2029 ou 2030. Il est maintenant question de 2033. Ne retenez pas votre souffle d’ici là…

Lors de la prochaine campagne électorale, tant le premier ministre Blaine Higgs que la chef libérale Susan Holt vanteront le potentiel des réacteurs modulaires. Leur position n’aura aucune crédibilité à moins qu’ils ne répondent clairement à une simple question: combien de millions de dollars supplémentaires seront-ils prêts à injecter pour mener à terme la construction d’un premier réacteur?

À notre avis, la réponse doit être: pas un sou de plus.

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