« La vraie histoire des corsaires » de Dominique Le Brun : à faire aimer l’Histoire aux jeunes de 7 à 97 ans !

Qui n’a pas rêvé un jour devant les destins héroïques des corsaires, dont l’histoire de France fourmille. Pour autant, l’histoire ne se résume pas à cela. Être corsaire est un droit accordé par un Etat à des marins pour arraisonner, voire détruire des navires marchands de nations ennemies. Dominique Le Brun, en spécialiste de la mer et de son histoire nous entraîne à leurs cotés sur les flots de l’Antiquité jusqu’à ces corsaires « de causes nouvelles » que sont les capitaines du Sea Shepherd ou du Sea-Watch, au secours de la biodiversité marine pour l’un et des migrants pour l’autre. 

Entre ces deux extrêmes, vous découvrirez que les Vikings étaient probablement « corsaires », et que de la France aux Etats par encore tout à fait Unis, sur toutes les mers du globe autant qu’au cours des deux dernières guerres mondiales, les corsaires firent souvent la fortune de leurs commanditaires, sauvèrent des régions de la famine, ou furent victimes de la chasse des marines royales puis nationales. Avec des petits chapitres introductifs qui expliquent l’évolution de « la guerre de course » à travers les siècles, cet essai développe de courtes biographies sur des corsaires célèbres, des lieux mythiques (Saint Malo, Barataria) ou des navires emblématiques de cette Vraie histoire des corsaires.

POINTS FORTS

Ils sont simples et nombreux. Ce livre nous apprend beaucoup de choses. Comme le dit son titre, la « vraie histoire » réserve bien des surprises, décompose et recompose les légendes, fait sortir de l’ombre des figures ou des événements oubliés. 

Les vies de Jean Bart, Claude de Forbin, Duguay-Trouin, Surcouf, Thomas Boyle, Jean Lafitte, Jean-Baptiste Charcot (oui, le « Commandant », explorateur de l’Arctique et de l’Antarctique), et beaucoup d’autres, réunis dans un seul ouvrage, suffit à donner à cet essai un intérêt incomparable. L’explication de la vie des citées comme Saint-Malo, Nantes ou Dunkerque, de leur économie de course, des antagonismes avec l’Angleterre, des tentatives de blocus des deux guerres mondiales et des courses acharnées entre U-boots et navires marchands est tout aussi passionnante. 

Ces récits sont vraiment captivants, écrits en courts chapitres avec une plume vivante, vibrante de sels et de poudre, de tensions sur mer et sous marines, de suspens, de happy end et de tragédies. Et sont aussi riches de révélations sur des événements oubliés – comme ce combat naval entre deux navires américains l’un unioniste, l’autre sécessionniste, à l’entrée du port de … Cherbourg, et peint par Edouard Manet – des paris tragiques comme celui du Lusitania, corsaire dissimulé dans les soutes d’un paquebot de croisière (coulé en 1915 par un U-Boot allemand avec près de 1200 victimes), ou encore ce bateau corsaire allemand escorté en 1940 par des navires soviétiques pour lui ouvrir le passage du nord (vers le détroit de Béring) afin d’attaquer des navires marchands alliés dans l’Océan Pacifique !

Enfin, quelques cartes aident à comprendre le parcours de courses incroyables pour les époques où elles furent entreprises, et un glossaire fera de vous un vrai matelot près à bondir à l’abordage.

ENCORE UN MOT…

Dominique le Brun, avec une plume alerte, se livre dans cet essai à l’exégèse de très nombreux récits autobiographiques ou d’études historiques, dont il extrait la substantifique moelle pour distinguer la légende de l’Histoire, l’essentiel de l’accessoire. La traversée des siècles et des continents n’est pas le moindre des intérêts de ces 326 pages. Leur style et leur ton, qui ne manque pas de touches d’humour, sont une des grandes qualités de cet essai qui devrait plaire à tout lecteur curieux des pages singulières de l’histoire maritime comme de destins hors norme.

UNE PHRASE

« Bart à Dunkerque, Forbin en Provence, Duguay-Trouin et Surcouf à Saint-Malo, Cassard à Nantes… Ce sont les plus connus de nos corsaires, mais bien d’autres encore occupent dans la mémoire collective une place de héros emblématiques de leurs ports respectifs. Entre le règne de Louis XIV et le Premier Empire, ils racontent l’épopée de la guerre de course à la française. Selon les époques, tantôt ils complètent l’action des escadres en harcelant le trafic marchand ennemi, tantôt ils suppléent une marine de guerre défaillante, mais toujours ils entretiennent une menace assez sérieuse pour inquiéter l’ennemi. » P.53

« Légalement donc, la guerre de course traditionnelle est abolie depuis 1856, ce qui ne l’a cependant pas empêché de perdurer ainsi qu’on l’a vu avec les deux guerres mondiales. Depuis, de nouveaux types de « corsaires» ont fait leur apparition à diverses reprises, sous des formes variées.
Ainsi, dès la fin des années 1970, Paul Watson et son Sea Shepherd attaquent des pêcheurs braconniers contre lesquels aucun État ne peut ou ne veut prendre de mesures coercitives. Ensuite, vers l’an 2000, à la Corne de l’Afrique, avant qu’une intervention militaire internationale ne s’organise, des sociétés de droit privé assurent la protection des navires de commerce contre les pirates qui infestent ces eaux : un phénomène qui rappelle les premiers corsaires de Saint-Malo, au Moyen Âge. Enfin depuis 2017 en Méditerranée centrale, les ONG qui portent secours aux migrants en remplaçant, si ce n’est en défiant, les autorités internationales pourraient être qualifiées de « corsaires au nom de l’humanité ». P 306

L’AUTEUR

Dominique le Brun est breton, navigateur, écrivain de la marine. Ce titre officiel est acquis en 2018, au cours d’une carrière animée de skipper puis de journaliste spécialisé dans le nautisme et les voyages. Très investi dans la défense des droits d’auteurs, il développe son travail d’écrivain en publiant des essais consacrés à l’histoire maritime et ses grandes figures, en particulier françaises comme La Pérouse, Surcouf, les grands navigateurs de Saint Malo. Il publie un roman autobiographique (Quai de la douane) en 2013, des ouvrages sur l’arctique et l’antarctique, des récits sur la mer et ses aventuriers. Le prix Eric Tabarly, prix littéraire de l’Association des anciens de l’Ecole Navale, lui a été décerné en 2021 pour son livre Les pôles, une aventure française

Voici les liens vers deux autres de ses récents ouvrages : 

Les secrets de la mer 

Bougainville


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