en Martinique, un vote massif pour la gauche, héritage d’un ancrage historique

Plus qu’une victoire, c’est un plébiscite. En Martinique, des candidats soutenus par le Nouveau Front populaire (NFP) se sont imposés dans les quatre circonscriptions de l’île au second tour des élections législatives, dimanche 7 juillet. Trois députés sortants, qui avaient siégé au sein des groupes La France insoumise ou Gauche démocrate et républicaine (GDR), ont balayé sans mal leurs adversaires, avec des scores compris entre 65,7 % et 86,6 %.

Dans la 3e circonscription, qui correspond à la ville de Fort-de-France, l’écart était nettement plus serré, et le député sortant, Johnny Hajjar (apparenté socialiste), s’est finalement incliné face à Béatrice Bellay, la première secrétaire de la Fédération socialiste de Martinique, qui avait reçu l’investiture du Parti socialiste. Mais ce coup de théâtre dans le chef-lieu de l’île, conséquence d’un désaveu inédit pour le parti autonomiste de gauche longtemps dirigé par Serge Letchimy – ancien maire de Fort-de-France (2001-2010), ancien député (2007-2021) et actuel patron de l’exécutif de la Collectivité territoriale de Martinique –, sera sans effet sur l’équilibre des forces dans l’hémicycle du Palais-Bourbon. En effet, le parlementaire battu et son adversaire victorieuse étaient tous deux soutenus par le NFP.

Dès lors, comme lors des trois précédentes législatures, la Martinique sera représentée par quatre députés de gauche à l’Assemblée nationale. Un état de fait qui ne surprend guère les observateurs de la vie politique locale. Dans ce département, « la gauche occupe aujourd’hui une position hégémonique, électoralement parlant », note Serge Larcher, ancien sénateur apparenté socialiste de Martinique (2004-2017).

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Législatives 2024 : le RN s’ancre aux Antilles

Cette hégémonie s’est installée dans les années 1980 et s’est consolidée depuis. Auparavant, les Martiniquais votaient volontiers pour les partis de droite, défenseurs, à leurs yeux, de la loi de départementalisation de 1946 et de l’ancrage au sein de la République de l’île, à rebours des autres possessions françaises qui accédaient à l’indépendance. Lors des scrutins nationaux, « le spectre du “largage”, qui faisait très peur à l’époque, était continuellement agité », explique Justin Daniel, professeur de science politique à l’université des Antilles.

Importance des inégalités sociales

L’accession de François Mitterrand à l’Elysée en 1981 et celle d’Aimé Césaire, le maire autonomiste de Fort-de-France, à la présidence du conseil régional de Martinique, en 1983, ont fini par rassurer : la gauche n’avait pas l’intention de remettre en question le statut de département auquel les Martiniquais étaient si attachés. Ainsi, alors qu’ils avaient plébiscité Valéry Giscard d’Estaing avec plus de 80 % des voix lors de l’élection présidentielle de 1981, sept ans plus tard, son successeur socialiste recueillait près des trois quarts des suffrages dans l’île. « Le vote de gauche était latent », constate M. Daniel.

Il vous reste 38.15% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Crédit: Lien source

Les commentaires sont fermés.