[Exclu] «Je veux qualifier le Congo à une Coupe du Monde»

DR Congo

Il est peut-être le joueur du Pyramids FC le plus bluffant depuis son retour de la CAN 2023 avec la RD Congo : si l’équipe du Pyramids FC se retrouve aujourd’hui leader de la première Ligue égyptienne, c’est notamment parce que Fiston Mayele réalise une saison de patron.

L’international congolais a claqué 14 buts et compte 6 passes décisives avec les siens en championnat. Récemment, lors du du choc du championnat égyptien contre Al Ahly, Fiston Mayele a marqué le centième but de sa carrière.

Dans cette interview exclusive avec Africa Top Sports, l’international congolais retrace son parcours. Il évoque son passage en Tanzanie et ses premiers pas compliqués avec le Pyramids FC.

Pour finir , Mayele revient sur ses ambitions en sélection nationale. Pour lui Sébastien Desabre a apporté un nouveau souffle au sein de l’équipe des Léopards .

L’interview est subdivisé en deux parties. La première concerne son parcours ( carrière) et la deuxième partie en bas concerne la sélection nationale.

Partie I: Parcours et carrière

 

Africa Top Sports (ATS): A quel âge avez-vous débuté votre carrière de footballeur? Est-ce une passion familiale ?

Fiston Mayele: C’était une passion familiale. Mon père fut un gardien de but. Son grand frère était milieu de terrain. Maintenant c’est moi qui ai pris le relais.

ATS: Le football est une passion familiale chez vous. Vous avez fait plusieurs clubs dont le Young Africans en Tanzanie. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre parcours ?

J’ai commencé depuis l’enfance. Je jouais au quartier avec des amis. Les parents voulaient que j’aille à l’école avant de jouer au foot. Quand j’ai fini mes études, je me suis lancé dans une petite équipe qui jouait la première division à Lubumbashi.

Au début, j’étais milieu de terrain. On avait un match amical et notre avant-centre n’était pas là. Le coach a décidé de me placer devant : résultat, je claque un triplé. Depuis ce jour, je suis devenu un attaquant. Pour notre nouvelle saison 2015-2016, je marque douze (12) buts. Je finis deuxième meilleur buteur du championnat.

La deuxième saison je finis meilleur buteur du championnat. Dans la foulée je signe à l’AS Simba de Kolossi. Avec le club nous nous sommes qualifiés en Ligue 2, j’ai fini meilleur buteur la première saison avec 18 buts et après je pars à l’AS Vita Club ( en 2019).

Tout est allé très vite pour moi. À l’AS Vita Club je marque douze (12) buts pour ma première saison dans l’élite. La deuxième saison, je finis deuxième meilleur meilleur buteur du championnat avec 12 buts; en Ligue des Champions je marque trois (3). Durant cette deuxième saison à l’AS Vita Club, j’ai joué le CHAN avec l’équipe nationale au Cameroun. Après la saison, je débarque en Tanzanie avec le Young Africans Sport où j’ai fait deux bonnes saisons.

ATS: Un parcours très riche. Qu’est-ce qui fait la particularité de chaque club que vous avez traversé ?

Avant l’AS Vita Club, toutes les équipes avec qui j’ai joué étaient des petits clubs. Il n’y avait pas vraiment de moyens. Avec l’AS Vita Club c’était différent parce que c’est l’une des grandes équipes du Congo et en Afrique.

Quand j’ai été là-bas pour le Yanga, c’était également différent. Le Young Africans a assez de moyens. Le footballeur est bien valorisé. Dès que tu arrives et que tu es étranger, on te paie un plus. Du coup tu donnes le meilleur de toi pour avoir des bonnes statistiques qui peuvent te permettre de signer encore ailleurs.

ATS: Super. Revenons un peu en arrière.Comment êtes-vous arrivé en Tanzanie ?

Le président du Young Africans était au RD Congo pour chercher un défenseur. Il voulait également un avant centre. C’est ainsi que le président de l’AS Vita Club à l’époque m’a proposé.

Je n’ai pas hésité à accepter l’offre. Avec le départ de Florent Ibengué au RS Berkane, cela a aussi précipité mon départ. Après tout, j’étais très excité de commencer la saison avec le Yanga.

ATS: Paraît-il que les supporters du Yanga vous en veulent de ne pas avoir prolongé votre contrat ?

Oui c’est normal. Nous on a trouvé une équipe qui a fait quatre ans sans remporter aucun titre. En deux saisons, nous avons remporté six trophées. Dans l’histoire du club, je suis parmi les avant-centres qui ont mis la barre très haute dans le club. Raison pour laquelle les supporters avaient toujours envie de me voir en Ligi Kuu.

 

ATS :Comment avez-vous trouvé votre séjour en Tanzanie ?

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J’ai passé de bonnes années en Tanzanie. J’ai également rencontré des difficultés mais malgré tout pour ma première saison je finis deuxième meilleur buteur du championnat avec 16 réalisations.

Je gagne la Super Coupe, le championnat, la Coupe de la Tanzanie. Cela faisait quatre ans que le Yanga ne gagnait aucune coupe. Nous on est arrivé et on a changé l’histoire. Pour ma deuxième saison avec le Young Africans, je gagne encore les trois titres.

Je finis meilleur buteur avec 17 réalisations. Avec l’équipe nous avons atteint la finale de la coupe de la Confédération africaine de football ( Coupe CAF). J’ai passé des moments inoubliables en Tanzanie.

 

ATS: En coupe CAF, vous avez été éliminé par la règle du but à l’extérieur. Comment trouvez-vous cette règle qui existe toujours en Afrique ?

Normalement on doit supprimer cette règle. En Afrique aussi, nous devons la supprimer comme c’est le cas en Europe. Sur cette saison, on gagne tout. Je suis meilleur buteur de la coupe CAF. On perd la finale à cause d’une loi. C’était horrible. Selon moi on doit la changer parce que ça n’existe plus en Europe.

Le match aller contre USM Alger on a perdu 2-1. C’était déjà difficile. Pour le match retour on gagne 1-0, on arrive pas à mettre le second but.

C’était très difficile pour moi car ce que j’ai réalisé le long de la saison, je méritais de remporter cette coupe avec mes coéquipiers.

ATS:Par finir, vous décidez de rejoindre Pyramids FC. Pourquoi avoir décidé de venir en Egypte ?

 

La première des choses j’avais envie de m’offrir un autre challenge. Ensuite quand on regarde l’équipe nationale, la plus part des joueurs viennent de l’Europe. Quand tu joues en Tanzanie tu n’as pas aussi assez de visibilité.

L’Égypte a le premier championnat en Afrique. Enfin quand Pyramids est venu, il a mis la barre très haute par rapport à ce que je gagnais en Tanzanie. Du coup j’ai dit oui immédiatement.

ATS: Comment avez-vous géré psychologiquement et mentalement vos périodes de disette. Les moments où vous avez assez de difficulté à trouver le chemin des filets en début de saison.

 

Au Young Africans, je marquais facilement. J’arrive ici [ En Egypte] , j’ai du mal à trouver le chemin des filets.

Je joue à peu près quatre matchs mais c’est compliqué. Pour quelqu’un qui est habitué à marquer, c’est vraiment terrible. Il y avait une CAN à aller jouer, c’était vraiment très difficile pour moi. Je prenais toujours l’exemple de Karim Benzema. Il a tout gagné et marqué beaucoup de buts avec le Real Madrid. Arrivé en Arabie Saoudite, c’est devenu un peu compliqué pour lui.

 

ATS: Par finir, quel a été le déclic ?

Il y avait beaucoup de critiques sur les réseaux sociaux. En Tanzanie comme en RD Congo. Je me suis dit que c’était normal. Il y a des moments où tout vous réussi. Il y a aussi des périodes de flottement donc il fallait être fort mentalement.

J’arrive dans une nouvelle équipe, je dois m’adapter, ça parle arabe. Moi je parle français. Il me fallait un peu de temps pour que la machine soit en marche. Quand j’ai fini la CAN 2023 en Côte d’Ivoire, je me suis lancé le défi de bien me concentrer pour finir la saison en beauté. C’est ce qui est en train de se passer actuellement.

 

ATS : A quelques journées de la fin du championnat égyptien, êtes vous satisfait de votre saison ?

Pour le moment je ne peux pas dire que je suis satisfait. Bien vrai que je suis meilleur buteur, je vais patienter jusqu’à la fin avant de faire mon bilan.

Pour être franc, après avoir marqué plus de 10 buts pour sa première saison dans un championnat comme celui de l’Égypte, ce n’est pas mal. Ce n’est pas donné à tout le monde. Pour le moment, je suis fière de moi pour ce regain de forme. Je dois aller jusqu’au bout afin de permettre le Pyramids FC à remporter son premier titre de champion.

ATS:Est-ce que vous avez des regrets ?

J’ai juste quelques regrets pour mes débuts. Avec l’ancien entraîneur c’était un peu difficile avec son style de jeu. On a eu un autre entraîneur qui a mis une nouvelle philosophie de jeu en place. Depuis son arrivée, on a fait qu’un seul match nul avec plus de quatorze victoires.

 

Partie II: La sélection nationale

 

ATS: Est-ce que vous vous souvenez de votre première sélection ?

Oui, comme si c’était hier. C’était en mars 2023 à Lubumbashi. Ça a toujours été mon rêve de jouer pour l’équipe nationale A. Je reçois la convocation et le match devait se jouer à Lubumbashi dans ma ville, là où il ya les parents, mes amis. C’était lors de la double confrontation des éliminatoires pour la CAN 2023 contre la Mauritanie.

J’ai eu la chance de jouer trois minutes. Je n’ai même pas touché le ballon durant ces minutes. Lors du match retour, on part en Mauritanie, on mène 1-0. Malheureusement Cédric Bakambu prend un rouge. Je suis rentré après mais la Mauritanie a égalisé. On était obligé de défendre pour accrocher le point du nul.

Pour ma deuxième sélection, on devait jouer contre le Gabon. Après mon entrée, j’ai marqué le but du break qui a permis aux siens de battre les Panthères 2-0 et de se qualifier pour la CAN 2023.

L’éclair de génie de Filston Mayele contre le Gabon. L’article continue après le X.

ATS: Comment avez-vous vécu ce but ?

Ce but était très spécial. Je venais de faire une belle saison avec le Yanga. J’ai fini meilleur buteur de la coupe CAF. J’arrive à l’équipe nationale. Le Gabon n’a jamais perdu un match à Francheville. C’était une joie énorme pour moi.

ATS: Comment trouvez-vous votre statut en sélection ?

L’équipe nationale est une équipe de tout le monde. Si tu es en forme, tu seras toujours appelé. Vu la concurrence qu’il y a actuellement dans notre équipe nationale […] Il y a Yoane Wissa. Cédric Bakambu qui a toujours été le meilleur buteur de la sélection. Quand tu as l’opportunité de jouer, tu dois les saisir. Quand tu vois cette concurrence tu dis : Quand j’aurai deux , trois , quatre ou cinq minutes, je dois coûte que coûte faire la différence. C’est ça.

 

ATS: Faire la différence, profiter des opportunités… C’est ce que vous avez fait récemment lors de la troisième journée des éliminatoires pour le mondial 2026 face au Sénégal à Dakar ?

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En 2017, le Sénégal a battu la RD Congo 4-2 à Lubumbashi. J’étais au stade comme supporter et j’ai même pleuré ce jour-là. Au Congo quand l’équipe nationale joue, toute la population se mobilise pour apporter son soutien. C’est une ambiance énorme dans le pays. Dans l’histoire, nous n’avons jamais battu le Sénégal, même pas un match.

Avant le coup d’envoi de la rencontre, mes coéquipiers et moi étaient prêts pour changer l’histoire. Après le Sénégal ouvre le score. Dans la foulée le coach Sébastien Desabre fait un changement payant. Le but vient de Edo Kayembe qui récupère le ballon. Edo passe le ballon à Chadrac Akolo. Akolo à son tour me passe le ballon à son tour. J’avais même fermé les yeux. Il n’y avait pas question de regarder le gardien. Je savais déjà qu’il était au premier poteau. Au second poteau, c’était compliqué pour lui de prendre le ballon. On finit par faire un match nul et on s’offre une très belle victoire contre le Togo à Kinshasa lors de la quatrième journée.

Le but contre le Sénégal. L’article continue après le X

ATS: Pensez-vous que les Léopards ont la chance de se qualifier pour le mondial, sachant que la première place du groupe est détenue par la surprenante équipe du Soudan?

Nous continuons de croire à une qualification pour le mondial 2026 parce qu’on a un bon groupe. On a nos chances. En mars 2025 nous allons jouer contre la Mauritanie et le Soudan du Sud. Nous allons tout faire pour avoir les six points. 

 

ATS: Lors de la CAN 2023, la RD Congo a fini quatrième et aurait pu remporter la médaille de bronze. Comment avez-vous vécu ce moment historique avec l’équipe nationale en Côte d’Ivoire ?

De toutes les CAN qui se sont jouées , celle en Côte d’Ivoire était la meilleure. Il y avait beaucoup de surprises. Personne ne s’attendait à voir la RD Congo dans le dernier carré. Nous, on savait qu’on allait aller loin dans cette compétition.

On a réussi à se qualifier dans un groupe très difficile. Le Maroc, la Tanzanie et la Zambie était là. On a réussi à sorti l’Égypte puis la Guinée . Pour nous c’est une grande satisfaction parce que cela faisait deux CAN qu’on était pas là ( NDLR dernière participation 2019 avant celle en Côte d’Ivoire). Le match contre l’Afrique du Sud, on était juste malchanceux. A mon entrée j’ai eu une occasion que je n’ai pas pu concrétiser. Néanmoins, je crois que nous avons fait une belle compétition.

ATS: Qu’est-ce que Sébastien Desabre a apporté de nouveau au sein de l’équipe ?

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D’abord il a apporté la discipline. Auparavant il n’y avait pas d’organisation. Il a apporté quelque chose qui manquait à cette équipe. En plus de la discipline, il ya le discours et la gestion des cadres. Il parle très bien avec les cadres de la sélection et ainsi qu’avec tout l’effectif. Quand tu viens en équipe nationale, il te traite bien. Il a une très bonne organisation par rapport à ses prédécesseurs et c’est normal que les résultats soit positifs.

ATS: Quelles sont vos ambitions avec l’équipe nationale.

La CAN en Côte d’Ivoire était ma première. Mon ambition est de faire plus de CAN avec l’équipe. Aussi mon rêve est de qualifier la sélection pour la Coupe du Monde. Ça sera une histoire pour moi et mon pays. Enfin, je veux marquer le maximum de buts possible à chaque compétition pour faire gagner l’équipe.

 

ATS: Quelles sont les leçons que vous avez apprises dans votre jeune carrière de footballeur ?

Le football n’est pas facile comme certains le pensent. Ça demande beaucoup de discipline et de sacrifices. Tu dois être tout le temps concentrée. Tu n’as pas le temps pour tes enfants et ta famille. Tu voyages tout le temps. Les enfants ont besoin de voir Papa mais il n’est pas là. Après tout, tu te dis que c’est le travail. Tu dois tout faire pour être performant.

 

Crédit photo : FECOFA


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