Le CDAD, le Conseil Départemental de l’Accès au Droit, est sous le feu des projecteurs depuis quelques jours. En Mars 2024, à la suite d’une dénonciation interne, une information judiciaire a été ouverte pour des faits très graves : « corruption, trafic d’influence, prise illégale d’intérêts, détournement de fonds publics, complicité et recel ».
L’enquête, pilotée par un juge d’instruction, est désormais entre les mains du Pôle National Financier (PNF). Des magistrats étaient en Martinique la semaine dernière et ont procédé à diverses auditions.
Des perquisitions ont été menées aux domiciles de magistrats dans l’île et dans l’Hexagone par les magistrats instructeurs et le service de police de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF).
La présidente livre « des éléments de contexte »
Face aux accusations qui plongent la structure dans une certaine tourmente, Karine Gonnet, la présidente, également présidente du tribunal judiciaire, a choisi de livrer ses explications pour apporter « des éléments de contexte ».
Préalablement à cette enquête, il y a une procédure disciplinaire mise en œuvre à l’égard d’un agent du CDAD. C’est une procédure qui est en cours. Il s’agit d’une suspension administrative dans le cadre d’une procédure disciplinaire. Cette décision est intervenue après un audit interne. Elle a été prise après une validation par l’ensemble des membres du conseil d’administration. Mais c’est difficile pour moi d’en parler. D’abord parce que la procédure n’est pas encore arrivée à son terme et que je serais amenée à vous divulguer des éléments qui n’ont pas été encore complètement divulgués à l’agent
Pour Karine Gonnet, l’enquête pénale sur le CDAD est arrivée en parallèle de cette procédure interne, pour laquelle une cinquantaine d’agents ont été auditionnés. Selon nos éléments, les faits reprochés concerneraient notamment du harcèlement moral.
Et récemment, on constate la mise en cause de plusieurs personnes du CDAD, dont des magistrats. Ça a donné lieu à l’ouverture d’une enquête qui est tout à fait normale. Personne n’est à l’abri de la loi dès lors qu’on dénonce des faits graves. C’est tout à fait normal qu’il puisse y avoir une enquête qui va permettre d’établir la réalité des faits, leur matérialité, et de voir si ces infractions sont susceptibles d’être constituées. Dans ce cadre-là, effectivement, des enquêteurs sont venus la semaine dernière en Martinique et ont interrogé un certain nombre de personnes et des actes d’investigation ont été faits.
La présidente du CDAD confirme avoir été elle-même interrogée.
Absolument. Il faut savoir que c’est une ouverture d’information contre X, c’est-à-dire qu’elle n’est pas dirigée à l’égard de quelqu’un et que dans ce cadre-là, j’ai été entendue, c’est ce qu’on appelle une audition volontaire. J’ai d’ailleurs souhaité personnellement m’associer complètement à cette enquête. J’ai répondu à tous les éléments, donné tous les éléments utiles aux enquêteurs. Je souhaite vraiment que cette enquête soit conduite sereinement., tout comme la procédure disciplinaire. Sereinement, cela veut dire qu’elle ne doit pas être perturbée par ce qui est de l’ordre des rumeurs ou, peut-être aussi, une volonté de déstabilisation de cette enquête disciplinaire.
Pour Karine Gonnet, la saisine d’un service comme le PNF, est un gage d’une enquête menée « de façon impartiale, objective ».
« Le CDAD doit continuer à travailler »
Gênée par la mise en cause du CDAD ainsi que des 5 agents qui le composent, alors que ce groupement d’intérêt public « mène un certain nombre d’actions très importantes sur le territoire », elle réfute tout conflit personnel avec l’agent en question, Micheline Virgal, secrétaire générale de la structure.
Lorsqu’on est à des responsabilités comme les miennes, on sait faire la part des choses entre ce qui relève du personnel et ce qui relève du professionnel. On voit que ça peut être un argument facile de ramener les choses à un conflit personnel. J’aimerais pouvoir vous dire que ça n’est que cela. J’en serais rassurée pour le fonctionnement du CDAD. Donc, je ne m’inscris pas dans cette affirmation parce que ça n’est vraiment pas le cas.
Elle est consciente que cette affaire peut entacher la confiance des justiciables mais veut relativiser.
Ce n’est pas parce qu’une enquête est ouverte que les faits sont constitués. Il faut rappeler que les personnes sont présumées innocentes et que l’objet d’une enquête, c’est précisément d’établir si sur la base d’une dénonciation, les faits sont constitués. Je peux entendre les interrogations des justiciables, mais il ne faut pas conclure trop rapidement. D’une part, ou en tout cas, jeter l’opprobre trop rapidement sur l’institution judiciaire. Rappelons-le, ici, c’est le CDAD. Ce n’est pas le tribunal judiciaire
Elle rappelle enfin qu’aucune mesure de garde à vue et aucune mise en examen n’ont été prononcées dans ce dossier, en l’état des investigations.
Pour la magistrate à la tête du CDAD depuis 3 ans, l’ensemble des éléments financiers ont d’ailleurs été régulièrement restitués de manière transparente. Et cela, grâce, notamment, à un certain nombre de garde-fous, comme la présence d’un agent détaché de la Direction des Finances Publiques, qui exerce la fonction de chef du service financier. « Il y a des processus de validation internes des dépenses. Tout est tracé ».
Les deux procédures (disciplinaires et pénales) se poursuivent. Le CDAD, lui, « continue et doit continuer à fonctionner », assure Karine Gonnet.
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