les Lions Indomptables règnent sur le monde

A quelques heures du coup d’envoi de l’épreuve de
football masculin des Jeux Olympiques de Paris 2024,
Afrik-Foot vous propose le deuxième volet de sa trilogie
consacrée aux épopées africaines aux JO. Quatre ans après le
sacre du Nigeria, le Cameroun a
permis à l’Afrique de réaliser un doublé inédit, en remportant la
médaille d’or aux JO de Sydney (Australie) en 2000. Souvenir d’un
triomphe aussi beau que surprenant.

Par Mamadou Oury Diallo

L’anecdote est parlante et éclaire, d’une certaine façon avec du
recul, sur la fraîcheur et l’insouciance qui auront escorté les
Lions Indomptables aux JO 2000 de Sydney. « Nous n’imaginions
pas pouvoir gagner une médaille […] On s’est dit “ça va être
compliqué, on va aller là-bas pour prendre des photos” (rire).
Avant de prendre l’avion, je suis allé m’acheter un appareil photo
numérique. Je partais en mode touriste »,
raconte Patrick
Mboma au site de la FIFA plus de 20
ans après le titre olympique remporté face à l’Espagne (2-2, 5-3
aux tirs au but).

© Imago

Âgé de 29 ans à l’époque, l’attaquant de Parme (Italie), qui intègre la sélection
olympique en vertu de la règle de la FIFA autorisant chaque pays à
prendre trois joueurs de plus de 23 ans, s’avance vers le tournoi
avec relâchement et aucune pression de résultat.

Il faut dire que l’objectif du Cameroun a déjà été rempli. Six
mois plus tôt, l’équipe nationale A avait gagné la Coupe d’Afrique des Nations au
Nigeria. Et, parmi ses vainqueurs, seuls quatre éléments (Pierre
Womé, Mayer Lauren, Geremi Njitap, Samuel Eto’o) en plus donc de
Mboma, acceptent le voyage à l’autre bout du monde, les autres,
dont Marc-Vivien
Foé
, Salomon Olembé ou Rigobert Song, ayant décliné
l’invitation.

Cameroun, Jeux Olympiques 2000, Samuel Eto'o
© Iconsport

Bourreau du Brésil de Ronaldinho

Logés dans le groupe C, les Camerounais démarrent leur
compétition le 13 septembre 2000 face au Koweït, à Canberra, bien
loin de Sydney, épicentre des JO et situé à plus de 280 km. Ils
ratent d’ailleurs la cérémonie d’ouverture, mais pas leur entrée en
lice, disposant non sans difficulté des Koweïtiens (3-2). L’équipe
entraînée par Jean-Paul Akono enchaîne ensuite deux nuls contre les
États-Unis (1-1) et la Tchéquie (1-1). Pas flamboyant mais
suffisant pour rallier les quarts de finale.

Se dresse alors un adversaire de calibre, le Brésil, considéré
comme l’un des grands favoris pour le sacre. Dans ses rangs, Lúcio
et un certain Ronaldinho que le monde découvre alors avec son
physique svelte, ses dribbles chaloupés et ses accélérations, déjà,
déroutantes. Tous les observateurs s’accordent sur la fin de
l’aventure des Lions indomptables. « C’était la formation qui
avait décrété qu’elle allait gagner les Jeux olympiques,

rembobine Patrick Mboma […] Je pense qu’ils ont fait preuve
d’un peu de condescendance. »

Cameroun, Jeux Olympiques 2000, Lauren Etame Mayer
© Imago

Sur le terrain, le rapport des forces n’est pas aussi
déséquilibré qu’annoncé. C’est d’ailleurs le Cameroun qui prend les
commandes au tableau d’affichage. Sur un coup franc à l’entrée de
la surface, Mboma et sa patte gauche clinique nettoient la lucarne
du gardien brésilien (17e). Le scénario semble pencher en faveur
des Camerounais, qui préservent leur avantage jusque dans le temps
additionnel, où Ronaldinho arrache finalement l’égalisation sur un
coup franc tout aussi beau (92e).

Kameni, titulaire à 16 ans

On se dit alors que le destin a basculé, que le Cameroun a
laissé passer sa chance. Car en plus de l’impact psychologique du
but encaissé en toute fin de match, il y a l’infériorité numérique
après les expulsions de Njitap (75e) et Aaron Nguibat (92e). À neuf
contre onze, les hommes de Jean-Paul Akono trouvent, malgré tout,
l’énergie et le talent nécessaires pour inscrire le but en or de la
qualif’ en prolongation grâce à Modeste Mbami
(113e, 1-2 a.p.).

« Cette partie, que nous avons subie et que nous avons
gagnée au mental, a clairement constitué le déclic pour la suite de
la compétition. C’est là qu’on a senti qu’on pouvait réaliser
quelque chose de grand. C’est LE match du tournoi
»,
témoignait pour Sofoot
Patrick Suffo, partie prenante de cette aventure australienne.

En demi-finale, les Lions indomptables retrouvent une autre
sélection sud-américaine, le Chili, emmené par son sérial buteur
Iván Zamorano. Dos au mur après l’ouverture du score des Chiliens
sur un CSC du malheureux Abanda (78e), le Cameroun, qui avait été longtemps
maintenu à flot par son jeune portier Carlos Kameni, titulaire à
tout juste 16 ans, se rebiffe dans les derniers instants. Il
attaque à tout-va et finit par chambouler le score grâce à
l’inévitable Patrick Mboma (84e) et Lauren (89e). Le Cameroun
s’ouvre les portes de la finale (2-1). Un paradoxe pour une équipe
débarquée sans ambition particulière. Mais pas question désormais
de ne pas aller au bout. L’opportunité est tellement belle…

Cameroun, Jeux Olympiques 2000, Idriss Carlos Kameni
© Imago

Come-back historique en finale

Le samedi 30 septembre 2000, jour de la finale. Les Lions
indomptables découvrent pour la première fois le Stade Olympique de
Sydney, où plus de 104 000 spectateurs – une affluence record pour
un match dans le tournoi de football aux JO – ont pris place pour
le grand rendez-vous. De quoi bousculer leur calme et sérénité.
« En vérité, on a commencé à comprendre l’importance du truc
seulement quand on est remonté à Sydney pour la finale. C’est là
qu’on a croisé les plus grands athlètes du monde, et qu’on a pris
conscience de l’ampleur planétaire de l’épreuve,
avoue Suffo.
Cette pression, je pense, nous a perturbés pour le début de la
finale. »

Dépassés par la vivacité et la maîtrise technique des Espagnols, les Camerounais
souffrent le martyre en première mi-temps. À la pause, ils sont
menés 2-0 (buts de Xavi et Gabri). La mission s’annonce alors très
compliquée. Le Cameroun devra réaliser une performance historique
pour s’offrir sa première médaille d’or olympique.

L’exploit prend forme dès le retour des vestiaires. Regonflés à
bloc, présents dans les duels et beaucoup plus lucides dans les
derniers gestes, les Lions indomptables réalisent le come-back en
l’espace de cinq minutes, avec notamment un but du jeune Samuel
Eto’o. Avant d’aller arracher le titre lors de la séance des tirs
au but (5-3). Une consécration tout aussi inattendue qu’historique,
considéré a posteriori par Mboma, oui le même qui y allait en tant
que simple touriste, comme « [sa] plus grande joie de
footballeur. »

Mamadou Oury Diallo

Cameroun, Jeux Olympiques 2000, Lauren Etame Mayer
© Imago
Cameroun, Jeux Olympiques 2000
© Iconsport
Cameroun, Jeux Olympiques 2000, médaille d'or
© Iconsport


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