Haïti: Revue des données secondaires conjointe – Éducation en situation d’urgence – Protection de l’enfance – Haiti

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Points clés

Depuis fin 2015, Haïti fait face à une crise institutionnelle et sociopolitique aigüe avec pour effets une hausse importante de l’insécurité notamment dans la Zone Métropolitaine de Port-au-Prince (ZMPP), et plus généralement dans les départements de l’Ouest, l’Artibonite, le Centre.

Malgré la mise en place de l’état d’urgence sur l’ensemble du département de l’Ouest en mars 20241, des groupes armés contrôlaient jusqu’à 80 % de la zone métropolitaine de Port-au-Prince (ZMPP) en juin, empêchant la population de se déplacer librement et d’accéder aux services de base.2 Au début du mois de juin 2024 :

  • L’Organisation Internationale pour les Migrations (0IM) enregistrait 578,000 PDI.3 185,000 d’entre eux étaient des enfants en âge d’aller à l’école selon le Cluster Education.4 – Presque la moitié des PDI (47%) était accueillie dans le Grand Sud5. En juin, quasiment un tiers (32%) des PDI résidaient cependant au sein de la ZMPP.
  • La très grande majorité des PDI (78%) avaient fui la ZMPP. 6

Le territoire haïtien est également confronté à des risques naturels et environnementaux importants susceptibles d’être renforcés par le changement climatique.’ La saison des ouragans, qui commence généralement en juin et qui devrait être très active en 2024, présente un risque important sur les récoltes, les infrastructures et l’accès aux services de base.

Réapparue en octobre 2022 après 3 ans, l’épidémie de choléra persiste. En avril 2024, 82,885 cas suspects de choléra dans les dix départements du pays et 1 270 décès étaient dénombrés. 8 Les établissements scolaires n’ont pas les capacités en matière d’Eau, Hygiène et Assainissement pour résister face aux chocs, tandis qu’une gestion sûre de l’eau est l’une de conditions préalables à l’arrêt de la transmission du choléra.9

Selon les résultats de l’enquête ménage Multi Sectoral Needs Assessment (MSNA) conduite en 2023, 93% des enfants en âge d’aller à l’école (5-17 ans) fréquentaient régulièrement au cours de l’année scolaire 2022-2023 sur l’ensemble du territoire haïtien (hors ZMPP), 1° Ce pourcentage tombait néanmoins à 82% au sein de la ZMPP. Cet accès n’est cependant pas synonyme de bones conditions d’études:

  • Le système éducatif haïtien est largement dominé par les établissements privés, qui offrent un enseignement de niveau et de qualité très hétérogène.
  • Les chiffres d’inscriptions de 2023 indiquent une chute marquée du nombre d’élèves inscrits lors du passage à l’enseignement secondaire. 12
  • application du bilinguisme créole-français dans le système éducatif rencontre de nombreuses difficultés.13
  • Certain enseignants sont directement affectés par la crise actuelle, ce qui réduit les effectifs.

En juin 2024, le MENFP dénombrait : 14 – 919 écoles fermées dans les départements de l’Ouest et de l’Artibonite. 156 000 élèves (dont 49% de filles) étaient affectés par ces fermetures.

  • 236 structures éducatives relocalisées dans des zones plus sécurisées, afin de permettre la continuité de l’éducation.
  • 39 écoles servant d’abris provisoires pour les PDI dans la ZMPP.
  • 20 écoles occupées par des groupes armés, dans la commune de Tabare (département de l’Ouest).

Ces fermetures prolongées d’écoles sont un sujet de préoccupation car elles peuvent exacerber les disparités existantes en matière d’accès à l’éducation, notamment vis-à-vis de populations déjà vulnérables, telles que les enfants issus de familles modestes, les filles et les enfants en situation de handicap.

En 2023, les coûts liés à l’éducation tels que les frais inscription, de matériel etc. constituaient la première barrière d’accès à l’éducation rapporté par les ménages interrogés lors de la MSNA. Le déclin de l’activité économique, aggravé par la crise actuelle, va vraisemblablement accroître l’impact de ces barrières financières.

22% des ménages de la ZMPP étaient préoccupés par le fait que les garçons puissent être blessés/tués par une balle ou une balle perdue et 14% par la possibilité d’être recruté par un groupe armé (MSNA 2023). La spirale de violence actuelle accentue les préoccupations des ménages : En septembre 2023, on estime que plus de 500,000 enfants vivaient dans des quartiers contrôlés par des groupes armés.15

En mars 2024, 1 500 cas de violence fondée sur le genre ont été signalés, soit six fois plus que les 250 cas enregistrés en janvier et février.16 La prolifération des armes légères contribue aux taux élevés de violence sexuelle fondées sur le genre et augmente considérablement les risques sur le chemin du travail ou de l’école. De manière inquiétante, à l’été 2023, 13% des ménages du territoire haïtien (hors ZMPP) ont indiqué qu’ils n’auraient nulle part où reporter un cas de violence sexuelle ou basée sur le genre (MSNA 2023).

Les enfants séparés de leurs parents et des autres membres de leur famille comptent parmi les plus vulnérables. Au premier trimestre 2024, 1,113 enfants non accompagnés et séparés ont été identifiés au sein des sites de déplacés.17

Les mouvements de déplacement, les catastrophes naturelles à répétition, les troubles politiques, l’arrivée de l’épidémie de choléra en Haïti et la montée de la violence actuelle constituent autant de facteurs de risque de trouble post-traumatiques au sein de la population. Une exposition prolongée au stress augmente le risque d’apparition de troubles mentaux ou physiques, et de difficultés affectives, relationnelles, cognitives et sociales, ce qui entrave le parcours scolaire des enfants.

L’éducation joue un rôle clé dans la protection des enfants et l’intervention psychosociale. La crise actuelle expose les enfants vulnérables à une série de risques mettant leur vie en danger, comme les violences basées sur le genre, y compris le mariage des enfants, l’exploitation et les abus sexuels, l’enrôlement par des groupes armés et le travail des enfants. L’école contribue à réduire ces risques.

Réciproquement, la dynamique de déplacement et l’augmentation actuelle du nombre d’enfants séparés et non accompagnés, combinés aux fermetures d’écoles, vont possiblement affecter négativement l’accès à l’éducation lors de la rentrée scolaire en septembre ou octobre 2024.18

En conséquence des troubles de février et mars 2024 :

  • Le Cluster Education estime que le nombre d’enfants et d’enseignants dans le besoin est grimpé à 1,483,894, dont 1,480,926 enfants. Il s’agit d’une augmentation de 25%, en comparaison au HNRP 2024 initial. 19
  • Le Domaine de responsabilité pour la protection de l’enfance estime que 1,463,945 enfants sont désormais en besoins de protection. Il s’agit d’une augmentation de 17% en comparaison au HNRP 2024 initial. 20

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