Mariam Sampebgo est atteinte d’une forme aiguë du pied bot, une déformation congénitale du membre inférieur, caractérisée par une flexion anormale du pied et/ou de la cheville. Malgré cette difficulté physique, la jeune élève poursuit courageusement ses études. Refusant de se laisser abattre par sa condition physique, elle rêve de travailler dans le domaine sanitaire.
Contrairement à la majorité gens, Mariam n’utilise pas ses sandales de manière classique. En raison de son handicap, elle se chausse les mains, qui lui servent d’appui pour se déplacer. Depuis son enfance, elle a appris à vivre avec cette situation, sans complexe ni réserve, se déplaçant de façon autonome pour satisfaire ses besoins. Mais, derrière cette apparence vulnérable, se cache une force mentale impressionnante. Bien qu’elle ait échoué à l’examen du Brevet d’études du premier cycle (BEPC) 2024, Mariam reste déterminée à continuer ses études. Elle rêve et travaille à exercer une fonction dans le domaine de la santé pour soulager les malades.
Lire aussi : Santé : « Le pied bot n’est pas une malédiction. Il peut être traité et guéri », Dr Faïçal Oubda, manager du Programme Pied bot Hope Walks au Burkina Faso
Un modèle de résilience
Malgré le regard des gens lorsqu’ils l’aperçoivent, Mariam ne s’isole pas. « A l’école, je me comporte comme tous les autres élèves. Quand l’enseignant est au tableau, je lève ma main et je participe sans tenir compte des regards », a fait savoir Mariam. Elle ajoute qu’à force de se frotter aux autres sans complexe, ses camarades ont changé le regard qu’ils portaient sur elle. Selon sa mère, Mariam est l’enfant le plus positif de la famille. Veuve depuis quelques années, dame Sampebgo a dû élever toute seule ses enfants. Elle ne tarit pas d’éloges sur sa fille. « Elle m’aide dans les travaux de la maison et ne se comporte pas comme quelqu’un de physiquement limité. Ce qui me plaît chez elle, c’est qu’elle est très joyeuse et souriante. Parfois elle est pensive, mais elle ne se lamente jamais. Je suis sa mère mais je la trouve admirable. Elle est aussi une mère très protectrice pour sa fille. » Pour sa mère, Mariam est un exemple de résilience et de persévérance, malgré les difficultés de la vie.
Mère d’une fille
En plus de ses défis scolaires et physiques, Mariam est aussi une jeune mère. Malgré les défis posés par son handicap, elle assume pleinement ses responsabilités maternelles. Elle veille sur son enfant avec amour et attention, tout en s‘accrochant à ses études. Il faut noter que cet épisode de sa vie a eu un impact sur le bon déroulement de ses études. « Quand je suis tombée enceinte et que j’habitais chez le père de ma fille, j’ai dû suspendre mes études. Ensuite, nos relations se sont dégradées et je suis revenue dans ma famille pour m’inscrire en cours du soir », nous confie-t-elle. Malgré son handicap, sa grossesse et son accouchement se sont bien déroulés. « Mon entourage et moi avions peur mais tout s’est bien passé et j’ai mis ma fille au monde sans problème majeur », assure-t-elle. Sa situation est pour elle une double motivation pour offrir à son enfant âgé d’une année, un avenir meilleur.
Une foi inébranlable
Le célèbre philosophe et homme politique Gandhi disait que « La vie sans religion est une vie sans principe, et une vie sans principe est comme un bateau sans gouvernail ». Cette philosophie résonne particulièrement chez Mariam, qui est très attachée à son Coran et à son tapis de prière. Elle ne ménage aucun effort pour pratiquer sa foi, qui lui donne la force de surmonter les épreuves de la vie. « Je pense que Dieu me permet de vivre pour une raison particulière et en aucun cas, je ne peux douter de lui. En dehors de mon handicap, je n’ai pas de maladie grave et j’ai la chance d’avoir aussi un enfant donc je ne peux que rendre grâce à Dieu », a exprimé la jeune fille.
Poursuivre les études, une priorité pour elle
Travailler comme agent de santé est l’ambition première de la jeune Mariam. Même si elle reconnaît ses difficultés scolaires, elle y croit. Pour elle, suivre des cours du soir ne la favorise pas dans sa quête du BEPC. C’est pourquoi, elle espère réunir assez de moyens pour s’inscrire en cours du jour à la rentrée prochaine. « En cours du soir, on apprend moins qu’en cours du jour. Donc j’aimerais m’inscrire en journée pour être mieux encadrée », indique-t-elle, tout en sollicitant l’aide d’associations ou de personnes qui pourraient l’accompagner dans ce sens.
Plus tard, elle aimerait créer sa propre association pour sensibiliser les gens comme elle à ne pas mendier. « J’ai de nombreux besoins et je sais que si je sors mendier, je peux avoir un peu d’argent. Mais je ne le souhaite pas. Si toutes les personnes en difficultés doivent se retrouver dans les rues et carrefour pour mendier, la ville serait bondée de mendiants », dit-elle. Il faut selon elle trouver une activité et chercher du soutien pour un jour sortir de la précarité. Elle souhaite donc continuer l’école au moins jusqu’au niveau baccalauréat avant de travailler.
Lire aussi : Portrait de femme : Aveugle, Eliane Ouédraogo Bambara a préféré le travail à la mendicité
Situation des personnes handicapées au Burkina Faso
L’histoire de Mariam Sampebgo est unique mais sa situation est le lot commun de nombreuses personnes au Burkina Faso. Selon le dernier recensement de 2019, l’effectif des personnes handicapées de deux ans ou plus au Burkina Faso en 2019 est de 184 975. La prévalence du handicap est de 1,1% au sein de la population âgée de cinq ans et plus.
L’organisation Handicap international indique que malgré les efforts pour garantir un accès équitable à l’éducation, de nombreux enfants handicapés, surtout les filles, sont exclus du système éducatif. Une étude qu’elle a menée montre que 66% des personnes handicapées au Burkina Faso n’ont jamais fréquenté l’école et environ 43,7% se sentent socialement isolées. Dans le rapport sur l’état des lieux de la prise en compte de l’éducation inclusive dans le plan d’action du MENAPLN en 2022, le budget alloué à la direction de la promotion de l’éducation inclusive, de l’éducation des filles et du genre (DPEIEFG) pour la mise en œuvre de ses activités s’élevait à 1 168 234 000 de francs CFA.18,63% de cette somme étaient destinés à l’éducation des élèves handicapés.
Lire aussi : Burkina / Situation humanitaire : Les personnes handicapées physiques, ces invisibles des camps de déplacés internes
Farida Thiombiano
Lefaso.net
Crédit: Lien source
Les commentaires sont fermés.