(Investir au Cameroun) – Le conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) est confiant quant à la capacité des réformes menées par les institutions et États membres de la zone CEMAC à améliorer la valeur des actifs extérieurs nets entre mars 2025 et juin 2025, apprend-on d’un communiqué publié par l’institution mercredi 26 février 2025. Cette solidité des actifs extérieurs nets est importante, car elle fait partie des piliers qui garantissent une stabilité du taux de change entre la monnaie localement utilisée (CFA-XAF) et l’Euro.
Cet avis positif est exprimé, malgré le fait que la sous-région n’ait pas atteint le niveau d’actifs extérieurs nets requis pour renforcer sa stabilité financière extérieur. Selon la banque centrale (BEAC), et sur la base de la situation comptable journalière, les avoirs extérieurs nets de la sous-région étaient de 3 058,6 milliards de FCFA au 21 novembre 2024, en hausse de 15,8 % sur un an. Mais cela semble visiblement en deça des engagements pris par les pays de la sous-région
Selon la littérature économique, ces actifs représentent la différence entre les actifs financiers détenus par les résidents d’un pays à l’étranger et les engagements financiers des non-résidents envers ce pays. Autrement dit, ils mesurent la position nette entre ce qu’un pays doit payer à l’extérieur et ce qu’il attend comme paiement de l’international.
Sous le prisme de protéger sa stabilité extérieure, une réunion d’urgence avait été organisée en décembre 2024 à Yaoundé, la capitale du Cameroun et principale économie de la Cemac, pour décider des mesures correctives à prendre afin d’éviter que des scénarios liés à une dévaluation de sa monnaie ne se confirment. Pour apprécier la solidité de cette position extérieure, le FMI regarde plusieurs indicateurs, mais l’un d’eux est la durée de couverture des importations par les réserves en devises.
Dans la norme, cette couverture est de 3 mois, mais pour les pays riches en ressources minières et qui en dépendent, comme c’est le cas pour la Cemac avec le pétrole, le standard est fixé à 5 mois. Or, selon des données provisoires collectées par le FMI, la sous-région a terminé 2024 avec un niveau de couverture de 4,3 mois d’importations. Dans le même temps, la capacité de renforcement de ces réserves est faible.
Les prix du pétrole brut restent bas et ajoutent une pression sur une production qui recule. Dans le même temps, le prix des produits pétroliers comme l’essence ou le gasoil reste élevé sur les marchés internationaux, où l’on s’approvisionne en raison de raffineries déficientes ou en arrêt (Cameroun). Par ailleurs, les gouvernements doivent retrouver un équilibre budgétaire en remboursant les arriérés de paiement sans accumuler de nouvelles dettes, ce qui réduit leurs capacités à intervenir dans le soutien aux exportations, à travers la production ou les infrastructures.
La Cemac ne peut même pas se tourner vers la solution de la dette de manière optimale, malgré un ratio moyen de dette sur PIB formel de seulement 53 %, contre plus de 100 % pour des pays parfois bien plus développés. Pour un de ses Etats membres sous programme comme le Cameroun, une partie des réformes le contraint à limiter le volume des nouveaux endettements. Même si les pays ciblaient l’extérieur, les conditions sont assez rigoureuses et les avis des agences de notation n’aident pas toujours. Deux des pays notés par S&P Global Ratings (Tchad et Cameroun) ont des perspectives stables, mais une opinion qui les juge spéculatives.
L’analyse détaillée des éléments actualisés qui guident les décisions du FMI sur la Cemac est à suivre. En 2025, on peut s’attendre à une année complexe, notamment en raison du Cameroun. Le pays doit au mois de novembre rembourser un montant de 250 millions $, représentant le reste d’un précédent eurobond. Il est aussi prévu qu’une élection présidentielle s’y tienne, un moment jugé sensible pour les politiques économiques, et ses banques sont sous la pression d’une forte exposition à des risques pays dans la sous-région. Plus de 60% de l’exposition des banques sont sur les Etats et parmis eux on relève des difficultés dans les processus de remboursement.
Avec un secteur réel faible en termes de production et d’offre, des réserves de changes jugées peu confortables et un déficit permanent du solde des transferts internationaux jusqu’en 2029, la Cemac semble ne pas être sortie de son urgence économique. Les solutions proposées sont pourtant complexes. Trouver des voies et moyens pour s’en sortir, avec une faible capacité à mobiliser de la dette longue, comme cela a été le cas pour presque toutes les crises dans le monde ces dernières années.
Idriss Linge
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