L’ONU, à l’instar de nombreuses représentations, a autorisé la semaine dernière l’évacuation des familles de son personnel à Bujumbura, détaille une missive du 21 février du département de la Sûreté et de la Sécurité.
L’ONU est, à son tour, en train d’évacuer des familles de son personnel international du Burundi en raison du conflit dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), tandis que le président burundais, Evariste Ndayishimiye, tente de rassurer les diplomates, a rapporté hier l’AFP citant un document onusien.
Le groupe armé M23, aidé par des soldats rwandais, a pris le contrôle depuis janvier d’une portion de l’est la RDC, notamment les villes de Goma puis Bukavu, et continué sa progression dans plusieurs directions.
Plusieurs témoins ont signalé mardi la présence de combattants du M23 à environ 75 km au nord d’Uvira, ville à la pointe nord-ouest du lac Tanganyika, face à la capitale économique burundaise Bujumbura. D’autres habitants ont également rapporté le déploiement de troupes burundaises dans la zone.
Le Burundi, qui a déployé depuis 2023 plus de 10 000 soldats en soutien à l’armée congolaise dans le cadre d’un accord de coopération militaire avec Kinshasa, a commencé à retirer des troupes face à l’avancée du M23 et de ses alliés, selon des sources militaires.
Mais le pays a depuis, selon une source militaire burundaise et des témoignages sur place, substantiellement renforcé son dispositif militaire dans sa zone frontalière. L’ONU, à l’instar de nombreuses représentations, a autorisé la semaine dernière l’évacuation des familles de son personnel à Bujumbura, détaille une missive datée du 21 février du département de la Sûreté et de la Sécurité. Plusieurs avions ont été affrétés depuis, a relaté jeudi soir un responsable onusien sous le couvert de l’anonymat.
«D’autres sont attendus (…) pour mettre en lieu sûr ces familles et certains personnels non essentiels», a-t-il poursuivi. «Nous agissons avec la plus grande discrétion pour ne pas vexer le gouvernement», a-t-il précisé, tout en soulignant qu’il s’agit de «consignes qui s’appliquent partout (…) lorsqu’il y a des risques sécuritaires».
Au début de l’offensive du M23, le président burundais a averti le Rwanda qu’il se défendrait en cas d’attaque, mais il semble avoir adopté un ton plus conciliant envers Kigali. «Nous nous inscrivons toujours dans la logique de résoudre les différends entre nos deux pays par la voie pacifique», a-t-il déclaré jeudi soir dans un discours au corps diplomatique à Gitega, la capitale administrative du Burundi. Le Burundi connaît par ailleurs un afflux de réfugiés inédit depuis 25 ans. Plus de 43 000 personnes y ont trouvé refuge ces deux dernières semaines, selon l’ONU.
Crise humanitaire
Jeudi, le gouvernement congolais et l’ONU ont lancé un appel à 2,54 milliards de dollars pour aider 11 millions de personnes en RDC en 2025, selon un communiqué des Nations unies.
Le pays fait face à une crise humanitaire majeure liée notamment aux catastrophes climatiques exacerbées par le réchauffement, aux épidémies et à un conflit de longue durée dans l’Est, accentué ces dernières semaines par une offensive du groupe armé M23 allié aux troupes rwandaises qui réduit l’accès de l’aide humanitaire. Dans ce contexte, l’ONU estime que 21,2 millions de personnes touchées par ces crises multiples auront besoin d’aide en 2025.
Mais avec un sous-financement chronique des opérations humanitaires, l’appel lancé jeudi vise à collecter 2,54 milliards de dollars pour aider 11 millions de personnes les plus prioritaires, dont 7,2 millions de déplacés. «Tous les signaux d’alerte sont au rouge», a commenté Bruno Lemarquis, coordonnateur humanitaire de l’ONU en RDC. «Mais même face à ces défis énormes, l’action humanitaire démontre chaque jour son efficacité pour sauver des vies.
(…) Nous devons nous adapter pour continuer à fournir cette aide vitale, sans jamais compromettre les principes fondamentaux qui guident l’action humanitaire : neutralité, impartialité, indépendance et humanité», a-t-il ajouté.
La réponse humanitaire pour 2025 prévoit notamment de prendre en charge 1,5 million d’enfants souffrant de malnutrition aiguë, de garantir l’accès à l’eau potable pour cinq millions de personnes et de lutter contre des épidémies, telles que le choléra, la rougeole et le Mpox.
Le plan prévoit également une aide au retour des déplacés et la préparation aux chocs climatiques. Mais l’ONU s’inquiète de l’impact du gel par l’administration de Donald Trump de la quasi-totalité de l’aide internationale des Etats-Unis.
En 2024, la contribution américaine avait représenté 70% du financement du plan humanitaire pour la RDC, qui avait atteint un record de 1,3 milliard de dollars permettant d’aider 7,1 millions de personnes, selon l’ONU. «Nous sommes à un moment charnière. Sans une mobilisation internationale accrue, les besoins humanitaires exploseront, la stabilité régionale sera davantage menacée et notre capacité d’intervention sera gravement compromise», a mis en garde Bruno Lemarquis.
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