Caraquet commémore cette année le 150e anniversaire de l’émeute qui a ébranlé le paisible village qu’il était à la fin du 19e siècle. Jeudi dernier, le gouvernement fédéral a décidé que cet événement, qui a indirectement contribué au relèvement de l’Acadie du Nouveau-Brunswick, était suffisamment marquant pour faire l’objet d’une désignation particulière.
Le 6 mars, le ministre de l’Environnement et Changement climatique, et ministre responsable de Parcs Canada, Steven Guilbeault, a en effet annoncé dix désignations de personnes, de lieux et d’événements qui s’ajoutent à une liste commémorative dite «d’importance historique nationale».
L’émeute de Caraquet en fait partie. Le déploiement du Canadarm dans l’espace, à partir de la navette spatiale Columbia, en 1981, ainsi que plusieurs personnalités canadiennes font partie de cette liste exceptionnelle.
Parmi les personnalités, on retrouve Jeanne Sauvé, qui a été la première femme à occuper le poste de gouverneur général du Canada, et Monseigneur Alexandre Vachon, un éminent éducateur et chimiste, qui devint en 1939 recteur de l’Université Laval et archevêque d’Ottawa.
L’émeute de Caraquet, qui s’est achevée le 27 janvier 1875 par la mort de deux hommes (le jeune Louis Mailloux et un milicien de Newcastle, John Gifford) est survenue dans la foulée de la Loi King, qui fut votée quatre ans plus tôt. Fredericton désirait alors créer un système d’écoles laïques, mais entravait par le fait même les œuvres du clergé catholique, lequel prodiguait un enseignement de langue française aux communautés acadiennes de la province.
Les tristes événements de Caraquet contraignirent finalement le gouvernement provincial, la même année, à modifier la loi pour rétablir la paix sociale.
«Le «Compromis de 1875», peut-on lire dans un document qui accompagne l’annonce du fédéral, découla en partie de cette émeute et permit aux Acadiens d’offrir à leurs enfants une éducation primaire de leur choix.
Ce choix devient un moteur de l’identité linguistique et culturelle acadienne. Ce conflit compte parmi les nombreuses crises scolaires qui sévissent au sein de la société canadienne des 19e et 20e siècles au sujet des écoles confessionnelles.»
L’historien Clarence LeBreton, qui a soumis la proposition ayant mené à la désignation fédérale, a applaudi la décision du ministre Guilbeault et a fait l’éloge des protagonistes de Caraquet parce qu’ils ont défendu les principes auxquels ils croyaient.
«Pour les gens de Caraquet et pour l’ensemble de la population acadienne, il était important que les événements d’il y a 150 ans soient reconnus, où des hommes, pour la plupart de jeunes pères de famille, s’étaient tenus debout afin de défendre et de protéger leur langue et leur religion. Leur révolte fut le début de cet interminable combat de la minorité francophone hors Québec pour le respect de leurs droits», a-t-il déclaré.
Au total, 24 hommes seront arrêtés et amenés à la prison de Bathurst en plein hiver dans des conditions épouvantables. Quelques mois plus tard, ils furent accusés de sédition.
Plus sérieux encore, neuf d’entre eux furent accusés du meurtre de Gifford, mais les procédures s’achèveront sans que nul ne soit reconnu coupable d’homicide.
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