Le patron de Renault s’est exprimé devant des représentants de la filière automobile. Si Jean-Dominique Senard a reconnu que Bruxelles avait fait un « premier pas » en flexibilisant les normes CAFE, il a néanmoins rappelé les nombreux périls économiques et géopolitiques qui menacent le secteur.
Jean-Dominique Senard, président du groupe automobile Renault, lors de son audition devant le Sénat, le 20 mars 2024. ©Sénat
Le fils de diplomate a-t-il perdu son flegme ? Lors d’un déjeuner organisé par la Plateforme de la filière automobile, Jean-Dominique Senard, président de Renault, a dressé le tableau de la « nouvelle donne » internationale de l’industrie automobile. S’il n’a pas voulu verser dans la dramatisation en parlant de « défis enthousiasmants« , il n’a toutefois pas dissimulé son vif agacement en évoquant l’action de l’Union européenne ces dernières années.
Il a tout juste concédé « un premier pas dans la bonne direction » après les annonces de la Commission européenne prête à flexibiliser le calcul des normes CAFE. Il a aussitôt rappelé que cette disposition n’était pas encore votée… Bien que Jean-Dominique Senard reconnaisse qu’il y a une « prise de conscience« , il se méfie encore des turpitudes des institutions européennes. « Nous regrettons que le débat n’ait pas eu lieu avant« , a-t-il lancé.
« Aucune analyse d’impact sérieuse«
Mais le passif est lourd… Devant un parterre de patrons de la filière, tout acquis à sa cause, il a redit que l’Europe avait précipité le calendrier de la décarbonation. « Nous espérions maintenir les hybrides jusqu’en 2040 (…), la décision de 2035 a été prise sans aucune analyse d’impact sérieuse. Nous n’avions pas les minerais, nous dépendions de la Chine pour les batteries« , a-t-il déploré.
Jean-Dominique Senard s’est surtout livré à un exercice d’explication de sa vision des cinq révolutions industrielles en cours qui ont la particularité de « ne pas être séquentielles mais cumulatives : la nécessaire décarbonation (…), la transformation de la chaîne de motricité, la révolution numérique et l’avènement de l’IA, la révolution des usages et l’accélération des contraintes d’un contexte politique mondial« .
Pour le patron de 72 ans, les événements récents ne sont qu’une suite d’épisodes commencés bien plus tôt. Le protectionnisme de Donald Trump ? Joe Biden l’avait initié avec l’IRA, le plan qui devait stoppé l’inflation mais qui n’était rien d’autre qu’un ensemble de mesures protectionnistes, selon Jean-Dominique Senard. Il estime que le péril est grand pour toute l’industrie automobile, puisque 40 % de la production mondiale est destinée à l’export.
La Chine ne vogue pas vers le « 100 % électrique »
C’est dans ce contexte que l’Europe s’est donc « réveillée« . Mais le patron de Renault souhaite qu’elle aille plus loin que le « premier pas » sur la flexibilisation des normes CAFE. Il a remis sur la table le projet de « neutralité technologique« , rappelant que la Chine avait fait le choix du multiénergie. Quant à ceux qui pensent que la Chine se dirige droit vers le 100 % électrique, il renvoie au phénomène des range extender qui explosent en Chine et « nuancent sérieusement cette trajectoire vers le 100 % électrique« .
Jean-Dominique Senard espère que l’Europe avancera sur une réglementation plus globale sur le cycle de vie complet des technologies, c’est-à-dire du puit à la roue. Il a néanmoins reconnu que la voiture 100 % électrique était et restait le moyen le plus efficace de décarboner la mobilité. En ajoutant : « L’Europe doit se souvenir que la filière a de plus en plus besoin d’être soutenue« .
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