Le centre de réchauffement pour itinérants qui devait ouvrir dans le quartier de Six Roads, à Tracadie, est mort sans jamais avoir vu le jour.
Lorsque les élus municipaux de Tracadie ont approuvé l’achat d’une maison, le long de la route 11, à Six Roads, l’an dernier, avec l’intention d’en faire un centre de réchauffement, se doutaient-ils qu’ils allaient promptement changer d’idée et annuler le projet?
C’est néanmoins ce qui s’est produit, lundi, lorsqu’ils ont tenu leur assemblée ordinaire mensuelle. Autant le conseil fut satisfait, l’an dernier, en préparant le projet, autant fut-il heureux, cette semaine, de faire marche arrière. Une population vivement opposée et une pétition convaincante auront pesé de tout leur poids.
Lorsque le conseiller Geoffrey Saulnier a fait lecture d’une proposition pour annuler le projet, la moitié du conseil s’est aussitôt exclamé: «j’appuie!». Un vote a fait le reste.
Le maire, Denis Losier, avait auparavant rappelé qu’en l’absence d’un organisme capable de diriger le centre, et l’hiver étant presque terminé, la conclusion allait de soi.
«Il n’y a pas de comité prêt pour la supervision, a déclaré le premier magistrat de Tracadie, ce qui fait qu’à ce temps-ci de l’année, il n’y a aucune possibilité que le centre ouvre, nonobstant la décision du conseil.»
Le conseil devait de toute manière revenir sur sa décision afin de redonner au bâtiment de Six Roads une nouvelle vocation. Le matin même, ajouta M. Losier, une entreprise de la région a signifié son intérêt pour la maison de Six Roads. Elle serait désireuse de signer un bail, puis d’y établir ses employés. La municipalité a répondu que cette demande, faite verbalement, devra lui être adressée par lettre, sinon le conseil ne pourra l’examiner.
En fin de réunion, plusieurs résidents de Six Roads ont pris la parole pour remercier les conseillers d’avoir écouté leurs inquiétudes.
Le maire a répondu que «tout le monde a appris dans cette expérience-là».
«Et ce qu’on peut garantir, c’est qu’on ne reproduira pas les erreurs du passé», a-t-il repris, en rappelant que des chercheuses de l’Université de Moncton vont réaliser une étude au sujet de l’itinérance dans la Péninsule acadienne. Et la réaction du public au projet de Six Roads sera tenue en ligne de compte.
La question de l’itinérance dans la Péninsule acadienne occupe de 25 à 30 intervenants, a expliqué M. Losier, et les démarches vont se poursuivre pour améliorer le sort des personnes qui n’ont pas de toit.
En attendant, les nuits restent froides. Mardi matin, il faisait approximativement -10o C dans la Péninsule acadienne. n
«À proximité des services», selon Claude Snow
Claude Snow, le porte-parole du Comité des 12 qui milite en faveur de la justice sociale, a récemment signé une lettre (voir notre édition du 22 janvier) pour proposer une marche à suivre dans la création d’un centre de réchauffement. Nous l’avons contacté à ce sujet, mardi.
Aux yeux de M. Snow, un tel projet ne devrait pas être considéré si le voisinage le désapprouve.
«Pour que ça marche bien, il faut que ce soit bien planifié, que les voisins soient mis au courant et informés. Un tel projet peut échouer si l’on ne prend pas de précautions», a-t-il expliqué.
Et un centre de réchauffement, pour réussir, ne peut être établi à l’écart des services.
«Tu ne peux pas avoir un centre de réchauffement loin des services, parce que les utilisateurs n’ont pas de moyen de transport et ont souvent des problèmes de santé mentale.»
Quand il est question de «services», le porte-parole du Comité des 12 a mentionné les services professionnels destinés à la santé mentale, mais aussi ceux de la vie courante, tels qu’une coupe de cheveux ou l’achat d’articles personnels.
Le journal lui a demandé si le centre-ville de Tracadie ne serait pas, d’après lui, un lieu tout indiqué.
«Oui, oui, il faut que ce soit à proximité (des services). Il faut que ce soit l’un des facteurs, sinon le projet risque d’échouer.»
Enfin, M. Snow juge critique que les employés d’un centre de réchauffement aient des «connaissances du domaine», parce que les itinérants, outre qu’ils n’ont pas de domicile, souffrent de problèmes personnels qui requièrent d’être traités.
«Les problèmes de santé mentale, ce n’est pas négligeable, a conclu M. Snow. Il y a des problèmes d’instabilité: les gens font des crises ou sont facilement contrariés. Il peut y avoir des frictions, alors il faut que les responsables (du centre) soient capables de gérer ces situations-là.»
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