Cécile Bicaïs Directrice Régionale des îles de Guadeloupe (Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy) au CNFPT

Quelles sont vos fonctions actuelles et les grandes étapes de votre parcours professionnel ?

Cécile Bicaïs Je suis Directrice Régionale des îles de Guadeloupe (Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy) au CNFPT depuis bientôt 4 ans. J’ai un profil public/privé que je souhaite conserver. Je suis diplômée de 2 grandes écoles de commerce : Master 2 en management de Toulouse Business School et Executive MBA à HEC ; j’ai aussi un Master 2 en sciences politiques et je suis Lauréate du Concours d’Administrateur Territorial en 2017 après avoir fait une classe prépa à l’ENA à Sciences Po Toulouse.

Étant diplômée d’une grande école de commerce, j’ai tout d’abord commencé ma carrière dans le secteur privé chez l’opérateur Orange dans le domaine du marketing comme Cheffe de produit, puis j’ai été recrutée au bout de 10 années comme Directrice des pépinières et hôtels d’entreprises dans un EPCI de l’agglomération Toulousaine. En quelques mois, je suis passée d’une vie professionnelle de promotion de téléphones mobile en grande distribution au sein d’une entreprise cotée au CAC 40 à un poste de Directrice en charge de la gestion de plusieurs établissements publics permettant l’accompagnement de porteurs de projets dans le domaine de l’innovation technologique. J’ai même été amenée à piloter un projet d’animalerie fonctionnelle pour la manipulation et la stabulation de petits rongeurs au sein d’une pépinière d’entreprises dédiée aux biotechnologies en ma qualité de responsable d’établissement avec une autorisation d’utilisation de sources radioactives. Tout un art et c’est à ce moment que j’ai compris la diversité et la richesse des métiers au sein de la fonction publique territoriale que je ne connaissais pas.

J’ai ensuite continué ma carrière dans le secteur public et je ne suis jamais retournée dans le secteur privé. J’ai occupé différents postes dans des EPCI et CT, principalement dans le domaine du développement économique qui est mon cœur de métier à la base.

Suite à ma réussite au concours d’Administrateur territorial en 2017, j’ai souhaité diversifier mon parcours et j’ai décidé d’occuper un poste de Directrice Adjointe des services mutualisés en charge des services au sein d’une mairie et d’un EPCI du sud-ouest.

Par la suite, j’ai souhaité quitter ma région de prédilection qu’est l’Occitanie à laquelle je suis très attachée, en particulier la ville de Toulouse, pour tenter l’expérience des territoires ultra-marin et en particulier des Antilles au sein d’un grand établissement en charge du développement des compétences des agents territoriaux. C’est un territoire archipélaire composé de 6 îles dont certaines ont été sanctuarisées dans la chanson de Laurent Voulzy : Guadeloupe continentale, Désirade, Marie-Galante, les Saintes (Terre-de-Haut et Terre-de-Bas), Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Nous sommes obligés de parler 3 langues dans notre activité : français, anglais et kreyol !

Je suis aussi enseignante vacataire à l’université où j’enseigne le droit public et la connaissance des CT.

Si vous deviez décrire votre métier actuel en 3 mots, quels seraient-ils ?

Cécile Bicaïs Développement des compétences des agents au bénéfice des usagers du territoire.

Quelles sont les qualités essentielles inhérentes à vos fonctions ?

Cécile Bicaïs L’adaptation aux situations est le maître mot selon moi dans mes fonctions actuelles. Les rebondissements sont légions et chaque jour de travail apporte son lot de surprises et de situations nouvelles qu’il faut gérer. La mouvance des situations est quelque chose qui me convient tout à fait. Je n’aime pas trop la routine ; je m’ennuie vite.

Certains penseront que je suis allée en Guadeloupe pour le « soleil et les plages » (quand on parle des Antilles, c’est souvent une image qui vous est opposée) mais la réalité de ces territoires est bien différente et je suis confrontée à des enjeux de premiers plans sur nos îles comme la lutte contre l’illettrisme, les transports en commun, le coût de la vie, l’accès aux services publics comme la culture, le réchauffement climatique et la prévention des risques majeurs. Loin de la vision édulcorée véhiculée par les médias, le territoire de la Guadeloupe est un territoire passionnant et plein de richesses à condition de vouloir s’y adapter sans partis pris, ni jugements. Une grande capacité d’adaptation est nécessaire pour évoluer en tant que « métro » sur ce territoire. L’humilité est de rigueur et l’écoute des besoins des agents est une absolue nécessité. Malgré cela, mes contacts en hexagone continuent de me demander « si je suis à la plage ? ».

Qu’est-ce qui vous fait lever chaque matin ?

Cécile Bicaïs D’abord l’odeur du café. Ensuite, l’idée que je vais me sentir utile et surtout que je vais m’amuser. Il faut que chaque jour soit comme une sorte d’aventure avec de la découverte, de l’inattendu, de l’action, des rencontres, parfois des confrontations aussi. S’il n’y a pas de problèmes à résoudre et/ou des situations à dénouer, je suis un peu moins enclin à me lever. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi un parcours de dirigeante, pour vivre cela intensément. Pour être à la manœuvre autant que possible.

Quel est le projet qui vous a le plus marquée et dont vous êtes la plus fière ?

Cécile Bicaïs À titre personnel et même professionnel, je travaille activement à redonner la juste place aux femmes dans la haute fonction publique territoriale. Je milite et mets en œuvre au quotidien des actions pour aider les femmes à prendre conscience de leur potentiel et leur permettre « d’oser » la haute fonction publique. Je trouve que trop de femmes se freinent dans leur carrière et se limitent dans leur souhait de « prendre le pouvoir » dans les administrations déconcentrées et en particulier dans les territoires ultra-marins. À cet effet, j’organise différentes actions pour leur donner confiance et les rassurer sur leur capacité à devenir des femmes hauts-fonctionnaires et surtout, à ne pas copier les codes des hommes. Il s’agit de décomplexer les femmes dans leur rapport au travail, dans la prise de pouvoir, la négociation de leur salaire, etc. Pour ce faire, je déploie des formations dédiées aux femmes qui veulent évoluer professionnellement, en particulier sur les territoires ultra-marins comme « Femmes, osez la DG » du CNFPT. Je ne juge pas. J’essaie simplement d’aider les femmes qui ont envie qu’on les aide à développer leur carrière.

Avez-vous un rêve que vous souhaiteriez concrétiser ?

Cécile Bicaïs Écrire un livre sur la place des femmes dans la fonction publique. Pas un guide méthodologique, mais un petit recueil de situations vécues et observées avec à l’appui des expertes et des « solutions » pour s’en sortir, combattre les préjugés et attitudes implicitement sexistes véhiculées dans tous les secteurs de la vie publique.

Quelles sont les rencontres qui vous ont le plus marquée dans votre carrière ?

Cécile Bicaïs Mon Directeur marketing chez Orange. Une personne brillante qui se reconnaîtra sans doute. Un profil inégalé pour moi à ce jour, c’était il y a quelques années maintenant.

Un ancien collaborateur chargé de mission en biotechnologie qui a quitté la fonction publique pour vivre son rêve, devenir chanteur et musicien.

Joëlle Braeuner, qui co-anime une formation « Femmes, osez la DG ! » à l’Institut National des Études Territoriales (INET) que j’ai délocalisée en Antilles-Guyane. Un déclencheur pour moi dans les actions personnelles et professionnelles que je mène au profit du développement de carrière des femmes dirigeantes, car oui, des femmes dirigeantes qui font carrière, il en faut.

Quelle est votre citation préférée et pourquoi ?

Cécile Bicaïs Plutôt que de citer un grand penseur, je citerai plutôt un membre éminent de mon équipe « acceptation, résilience et sagesse ». Danielle Clais, Conseillère formation au CNFPT Guadeloupe. Ces mots font sens pour moi car je préfère la simplicité aux grands mots des grands penseurs et la « nov langue » actuelle. La sincérité des mots est ce qui compte le plus pour moi dans les échanges interpersonnels. Ces mots résonnent pour moi car ce sont ces 3 choses dont j’ai besoin et j’essaie de tendre vers la sagesse via l’acceptation de certaines situations que j’ai du mal à accepter et dont j’essaie de m’extraire, mais cela n’a rien d’évident.

Quels sont les deux changements les plus importants qui ont impacté votre carrière ?

Cécile Bicaïs Mon activité en territoire ultra-marin. La découverte de « l’ennéagramme » au cours de mon executive MBA (c’est un système d’étude de la personnalité qui donne des repères pour mieux nous connaître et comprendre les autres. Un outil puissant qui devrait être enseigné dans toutes les universités.)

Propos recueillis par Hugues Perinel

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