Élection au Gabon: l’Église accueille ceux qui se mettent au service du peuple

Tandis que les jours se comptent pour la transition politique en cours au Gabon, la commission chargée des élections a déjà communiqué la liste des candidats retenus pour l’élection présidentielle du 12 avril prochain, dont Brice Oligui Nguema, président de la transition. Dans ce contexte, tout en reconnaissant le mérite de ceux qui ont dirigé le pays en cette période, «l’Eglise accueille toute personne qui veuille se mettre au service de la République», affirme Mgr Madega, évêque de Mouila.

Fabrice Bagendekere, SJ – Cité du Vatican

Après une large approbation de la nouvelle Constitution par référendum populaire, le Gabon est entré dans la dernière phase de la transition en cours depuis 2023 par le processus électoral en progression. 4 candidats sur les 23 prétendants ont été retenus après examen des dossiers, parmi lesquels le Général de Brigade Brice Oligui Nguema, qui préside la transition. Était-ce prévisible dès le départ? Selon Mgr Matthieu Madega, qui a participé aux travaux d’élaboration de la nouvelle Constitution largement approuvée les gabonais, «on ne peut pas parler de prévisible» dans la mesure où l’attention des uns et des autres était focalisée sur le «changement», «la traversée» qui devait être effectuée, et dont le Général Oligui Nguema présidait à la destinée.

Des voix se sont élevées, appelant à la candidature du président de la transition

Le rôle joué par le Comité de transition a été d’une importance très capitale, pas seulement dans l’aboutissement de ce processus, mais, dès le départ, dans la préservation de la paix et l’intégrité du Gabon, tandis que l’éclatement de la violence était prévisible. «Il faut avouer que cela avait suscité un engouement et une joie de voir que nos frères avaient pris les choses en main pour éviter la violence, pour éviter les bains de sang… », nous dit Mgr Madega, faisant observer que la «libération» – comme les Gabonais nomment la révolution de 2023 – s’était produite «sans effusion de sang, sans qu’une personne se blesse, bref sans dégâts ni matériels ni humains». Selon l’évêque, «ceci avait suscité l’espérance », «cette espérance, le CTRI [le Comité de Transition] a essayé de porter (..) jusqu’à ce jour». C’est alors que des voix se sont élevées, nous dit le prélat, «appelant à la candidature du président de la transition», qui ne s’y est pas dérobé.

L’Eglise du Gabon est sans préférence pour les uns ou les autres

Si la majorité des Gabonais ont manifesté leur accord et leur joie à la candidature du Général Oligui Nguema, on ne peut pourtant affirmer qu’elle est reçue par l’unanimité de tous les peuples, nous dit Mgr Madega. «Il y a toujours des gens qui ont d’autres manières de voir les choses, d’autres manières de penser», explique l’évêque. Par ailleurs, quoi que le Général Oligui Nguema jouisse d’une immense popularité, certaines critiques ont émergé, notamment sur sa gouvernance jugée autoritaire.

C’est à l’intermédiaire de ces diverses opinions que se place l’Eglise du Gabon, sans préférence pour les uns ou les autres mais avec le même accueil et la même prière pour tous, et surtout «pour toute la nation, pour que l’élection se passe très bien», nous dit le prélat, qui réaffirme l’engagement social de l’Eglise comme seule référence de son action. «L’Église est « mater et magistra », elle est mère et maîtresse, donc elle regarde, elle conseille tout le monde, appelle à l’unité, à la sagesse, à l’humilité», affirme le prélat.

L’activité politique est une activité de charité

«L’Église veut le développement de l’homme et de tout l’homme, et bien sûr de tout homme». Mgr Madega l’affirme, faisant référence à l’enseignement sociale de l’Eglise qui, par ailleurs, conçoit «l’activité politique [comme] une activité de charité». C’est fort de cette conviction, rappelle l’évêque, que l’Eglise s’engage dans le soutien aux institutions politiques des Etats dans la recherche «d’un plus grand nombre possible». C’est avec la même conviction qu’elle encourage «tous les chrétiens à s’engager dans cette sphère-là», «encourage aussi tout homme et toute femme qui est capable de se proposer à prendre les rênes de la République, … pourvu que la personne soit digne de confiance, que la personne veuille se mettre au service de la République avec amour, abnégation, détermination, discernement, sagesse et même perspicacité», affirme le prélat.

Rien ne sera résolu si toute la population ne se met pas debout

L’espoir pour une période transitoire est qu’elle ne perdure pas. En effet, il est une attente, au départ d’une transition, que la situation retourne au fonctionnement ordinaire des institutions. Ceci étant, nous dit Mgr Madega, le scrutin d’avril prochain constitue un succès pour le Comité de transition et pour tout le peuple gabonais, qui perçoive en ce moment «un essor vers la félicité». Par ailleurs, les attentes restent nombreuses, souligne le prélat. Pour ce, dit-il, il faudra de la patience, sous-entendant que les résultats de l’engagement gouvernemental ne pourront être perçus qu’avec le temps. «Ni le président Brice Clotaire Oligui Nguema, ni aucun autre président au monde, ni les autres candidats ne peuvent prétendre avoir la baguette magique pour changer les choses en un seul jour», affirme le prélat. Ainsi en appelle-t-il à «l’engagement, la détermination» de tous les Gabonais, «quelle que soit la personne élue». «Quelle que soit la personne élue, y compris le général, rien ne sera résolu si toute la population ne se met pas debout, si toute la population ne se met pas au travail avec discipline et abnégation», insiste-t-il.

Il y a inévitablement révision de certaines choses.

Comparablement aux autres révolutions qui se sont produites en Afrique ces dernières années, le Gabon n’a pas effectué de rupture significative dans la coopération bilatérale. Quoi qu’il en soit, affirme Mgr Madega, «le Gabon est appelé à grandir, même dans ses relations avec tous les partenaires». Cette croissance, explique l’évêque, «demande à ce que l’on se remette quelquefois en question» pour que les rapports entretenus répondent à la dignité et au besoin de l’autre, sachant que «les exemples de développement, de manière de faire, de vivre et de coopérer» deviennent de plus en plus diversifiés et que «le Gabon est appelé à jouer aussi sa partition dans le concert des nations». Ainsi, dit-il, «est (…) malheureux, (…) celui qui souffrira d’un nombrilisme qui ne fera pas grandir». Dans tous les cas, affirme le prélat, «il y a inévitablement changement, il y a inévitablement révision de certaines choses».

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