Le paysage géopolitique de l’Afrique de l’Ouest continue de se transformer. Après leur retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le Niger et le Burkina Faso ont annoncé leur sortie de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), marquant une nouvelle étape dans leur politique de rupture avec la France et les institutions considérées comme des instruments d’influence occidentale.
Un retrait acté et assumé
L’annonce officielle du Niger a été faite par Laouali Labo, secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, dans une lettre adressée aux diplomates du pays. Cette décision a été confirmée par l’OIF, qui a précisé avoir été informée via la France.
Quant au Burkina Faso, la démarche semble similaire bien que les autorités du pays n’aient pas encore officiellement communiqué sur le sujet. Ce retrait intervient après la suspension du Niger de l’OIF, décidée en raison du coup d’État de juillet 2023, qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum.
L’organisation francophone avait alors appelé au rétablissement de l’ordre constitutionnel et à la libération du chef d’État déchu, toujours détenu au palais présidentiel.
Vers un retrait du Mali ?
L’annonce du Niger et du Burkina Faso pourrait inspirer un autre membre de l’Alliance des États du Sahel (AES), le Mali. Déjà engagé dans une dynamique de rupture avec la France et ses institutions, le pays pourrait bientôt emboîter le pas à ses alliés, selon plusieurs observateurs.
L’OIF, qui compte désormais 91 États et gouvernements, promeut la langue française, la diversité culturelle et les droits de l’Homme. Son porte-parole, Oria K. Vande Weghe, a réagi en qualifiant ce départ de “décision regrettable mais respectable”, estimant que l’organisation se trouve “prise dans un contexte géopolitique qui la dépasse”.
Une rupture avec la CEDEAO et un rapprochement avec de nouveaux partenaires
Le retrait de l’OIF s’inscrit dans une politique plus large de remise en cause des alliances traditionnelles par ces États sahéliens. En janvier 2024, le Niger, le Burkina Faso et le Mali avaient déjà annoncé leur départ de la CEDEAO, jugeant cette organisation trop alignée sur les intérêts de Paris et des puissances occidentales.
Face à ces décisions, plusieurs médiations ont été tentées, notamment par le président ghanéen John Dramani Mahama, mais elles n’ont pas infléchi la position des trois pays. Désormais, ces États renforcent leurs relations diplomatiques et militaires avec la Russie, tout en consolidant leur alliance régionale au sein de l’AES.
Quels impacts pour l’avenir de la Francophonie en Afrique ?
Le départ du Niger et du Burkina Faso de l’OIF illustre un mouvement plus large de rejet des institutions héritées de la période coloniale. Cette tendance pose des questions sur l’avenir du français comme langue diplomatique et culturelle dans la région, alors que plusieurs de ces États ont amorcé une politique de diversification linguistique et économique.
D’un point de vue stratégique, cette décision pourrait réduire l’influence de la Francophonie en Afrique de l’Ouest, une région qui représente près de la moitié des locuteurs francophones dans le monde. Elle met également en évidence le défi croissant auquel la France fait face pour maintenir son influence dans une zone où la Russie, la Chine et la Turquie cherchent à renforcer leur présence.
Avec ces départs successifs, l’Afrique de l’Ouest francophone est en pleine recomposition. La question reste de savoir si d’autres pays suivront cette voie ou si l’Organisation internationale de la Francophonie parviendra à regagner la confiance de ces États en proposant une approche renouvelée et mieux adaptée à leurs aspirations souverainistes.
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