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Dominique Reymond: «Michel Blanc était un homme anxieux»
La comédienne d’origine genevoise aura été l’une des dernières partenaires à l’écran de l’acteur, dans «La cache», de Lionel Baier, qui sort ce mercredi.

Dominique Reymond à Berlin: «Je suis à peu près à l’aise sur les planches, mais pas devant une caméra.»
IMAGO/ABACAPRESS
- L’actrice genevoise Dominique Reymond tient le rôle principal féminin dans «La cache», de Lionel Baier.
- La comédienne affirme être plus à l’aise au théâtre que devant les caméras.
- Le film marque la dernière apparition de Michel Blanc au cinéma.
- Cette adaptation du roman de Christophe Boltanski mélange habilement comédie et sujets graves.
Pour l’avoir vue dans des dizaines de films, le public connaît bien son visage, mais pas forcément son nom. Comédienne de théâtre, formée à Genève puis au Conservatoire national, notamment avec Antoine Vitez comme professeur, Dominique Reymond a pourtant une longue filmographie derrière elle. D’Olivier Assayas à Sandrine Veysset, elle est apparue dans plus de septante métrages. La voici aujourd’hui dans le rôle féminin principal de «La cache», de Lionel Baier, qui est également le dernier film du regretté Michel Blanc. Distinguée et sérieuse, elle cache sous ses apparences d’austérité une forme d’humour malicieuse et gourmande. Coup de fil.
Vous jouez en ce moment dans «L’amante anglaise» de Duras à l’Odéon, tout en faisant la promo de «La cache». N’est-ce pas un peu le grand écart?
Mais je prends tout avec joie. Les choses, on ne les fait qu’une fois dans une vie. Et j’aime être très occupée ainsi.
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On vous associe généralement plus au théâtre, dans les pièces du répertoire, alors que vous avez tourné dans énormément de films, presque toujours dans des rôles secondaires.
Cette alternance me permet surtout de continuer à jouer au théâtre. Les rôles secondaires ne me prennent en général pas trop de temps. En revanche, je ne pourrais pas tourner l’après-midi dans des films et jouer au théâtre le soir. En tant que Suisse, je ne sais faire qu’une chose à la fois.
Et vous n’auriez pas aimé davantage de rôles principaux dans des films?
Vous savez, je suis à peu près à l’aise sur les planches, mais pas devant une caméra sur un plateau de tournage. Le cinéma ne m’a jamais mise à l’aise. Donc j’ai toujours préféré avoir peu de jours de tournage sur un film. Seuls Olivier Assayas et Sandrine Veysset m’ont donné un peu plus de jours de travail. Et chaque fois des rôles qui me correspondaient parfaitement. Plus jeune, je faisais énormément de castings. Et puis finalement, on s’en fout. Dans la plupart des cas, on me castait, et on me caste toujours, dans des rôles de mères.
Dans «La cache», Lionel Baier vous a confié un rôle principal. Étiez-vous à l’aise?
Lorsqu’on connaît Lionel Baier, cela ne peut pas se passer mal. C’est un homme à part. Pour moi, il a la modestie des grands. Juste après la première du film à Berlin, il m’a dit en me prenant à part: «J’avais tellement peur de te décevoir.»

Dans «La cache», on s’évade aussi.
Pathé
Mais Lionel, vous le connaissiez déjà par le théâtre, il vous avait mise en scène dans une pièce à Vidy.
Oui, il m’avait demandé de tenir le rôle de Michel Foucault. Quelqu’un qui me propose un rôle de ce genre ne peut qu’être intéressant. Avec lui, je n’ai pas l’impression de travailler. C’était un peu pareil sur «La cache». J’avais adoré le livre de Christophe Boltanski, dont le film est tiré. Du reste, je m’étais dit qu’il n’y aurait pas grand-chose à faire.
Dans le film, il mélange des comédiens d’horizons différents. Vous jouez par exemple avec William Lebghil, et bien sûr Michel Blanc, qui représentent davantage le cinéma populaire.
Je n’ai aucun a priori. J’ai toujours aimé rencontrer des comédiens qui venaient de tous les horizons. Cela dit, je n’avais jamais vu les films de Michel Blanc. Ce qui m’évitait d’ailleurs d’être intimidée.
Quels souvenirs gardez-vous de Michel Blanc et comment avez-vous réagi à l’annonce de son décès?
Ce serait faux de dire que nous n’avons pas été atterrés. Je me souviens qu’il aimait énormément le film. Il faisait résonance en lui et certaines scènes l’émouvaient. C’était un homme anxieux, pour ne pas dire angoissé, par ce métier, par la vie. Nous étions aussi pudiques l’un que l’autre. Nous ne nous faisions pas la bise, nous ne nous tutoyions pas. Mais nous avons un peu parlé.
Quel cinéaste vous a le plus impressionnée?
Il y en a eu plusieurs, mais je dirais Olivier Assayas. J’ai particulièrement aimé travailler avec lui. Nous sommes de la même génération, on aime tous les deux Led Zeppelin et Pink Floyd. J’apprécie sa délicatesse, son humanité. J’avais aussi adoré Laurent Achard (ndlr: décédé il y a un an environ).

Dominique Reymond et Michel Blanc en presque huis clos.
Pathé
Comment vous dirige-t-on?
Question à laquelle on ne peut pas répondre. Certains metteurs en scène s’adaptent, d’autres pas. Il y a des acteurs qui demandent beaucoup de choses, d’autres moins. Ce qui me plaît, c’est qu’on me dise quelle place je dois occuper dans l’espace lorsqu’on tourne. Il faut que cette place soit juste.
Quels sont aujourd’hui vos liens avec Genève, où vous êtes née?
Ma famille. Ma sœur et mon frère. Et ma fille, qui est venue s’y installer. J’ai quitté la ville à 19 ans pour aller faire du théâtre à Paris. Et j’y suis restée. Je me souviens d’ailleurs qu’au début, je ne voulais rien de spécial.
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