« Etienne Fakaba Sissoko, économiste et professeur à l’université de Bamako, est la dernière en date des personnalités inquiétées pour leurs opinions discordantes sous le régime des colonels, relève Le Monde Afrique. Un régime qui a pris par la force en 2020 la tête du Mali, confronté au djihadisme et à une crise politique profonde. Le professeur Sissoko est l’une des rares voix dissonantes à encore tenter de se faire entendre de l’intérieur. »
L’année dernière, il a publié un ouvrage critique sur la junte intitulé : Propagande, agitation, harcèlement. La communication gouvernementale pendant la transition au Mali. Lundi, il a été condamné par la justice malienne à deux ans de prison, dont un ferme pour « atteinte au crédit de l’État », « injures » et « diffusion de fausses nouvelles perturbant la paix publique ».
Etienne Fakaba Sissoko dénonce dans cet ouvrage, précise Le Monde Afrique, « une “communication gouvernementale hyper agressive“ caractérisée par des “contenus aux caractères douteux“ et des méthodes “basées sur la propagande, l’agitation, la manipulation et même le mensonge“. » Dans le même temps, l’universitaire malien affirme que la junte a connu « ses premiers revers, signes de son essoufflement ».
« Attention, mes colonels ! »
Autre voix critique du régime malien, celle du professeur Ali Nouhoum Diallo. Ancien président de l’Assemblée nationale du Mali, Ali Nouhoum Diallo vient de publier un pamphlet plutôt musclé contre le régime des colonels… On peut le lire notamment sur le site du quotidien burkinabé L’Observateur Paalga ou encore sur le site de WakatSéra, autre média burkinabé. Extraits : « désormais seuls maîtres à bord du bateau de l’Empire, les colonels du Comité national pour le salut du peuple semblent résolus à faire marcher au pas les associations, les mouvements et partis politiques. Ils entendent être seuls à diriger le Mali, dire ce qu’ils pensent, faire ce qu’ils veulent. (…) Attention, mes colonels, prévient Ali Nouhoum Diallo : au lieu de renforcer la cohésion sociale, vous courez le risque de disloquer la société malienne et de freiner la Nation malienne en construction. (…) Attention, les colonels au pouvoir : les masses laborieuses éduquées, formées politiquement et idéologiquement deviennent une force matérielle, intellectuelle et spirituelle invincible pouvant soulever les montagnes. Elle peut tout renverser sur son passage, y compris les blindés ! »
À noter que L’Observateur Paalga et WakatSéra publient ce texte sans aucun commentaires… Rappelons que le Burkina Faso est également sous la coupe d’un régime militaire et que la liberté d’expression n’y est pas plus respectée qu’au Mali.
L’Afrique tourne-t-elle la page de la suprématie occidentale ?
Dans le même temps, toujours à propos du Mali et plus largement sur les changements politiques en cours dans les pays sahéliens, à lire ce plaidoyer publié par le site malien Sahel Tribune.
Un plaidoyer intitulé Les saisons du changement : l’Afrique tourne-t-elle la page de la suprématie occidentale ? Voilà ce qu’on peut y lire : « L’Afrique redéfinit ses alliances internationales, rompant avec les anciennes puissances coloniales comme la France et les États-Unis pour embrasser une souveraineté renouvelée et diversifiée. Ce bouleversement géopolitique, marqué par des retraits militaires et des révisions d’accords, symbolise l’émergence d’un nouvel ordre mondial centré sur le panafricanisme et l’autonomie étatique. (…) Alors que la scène mondiale observe ces transformations, poursuit Sahel Tribune, il est crucial que les anciennes puissances comprennent et acceptent ce nouveau paradigme. L’avenir de l’Afrique sera défini par ses propres citoyens, ses leaders, et non par des forces extérieures. (…) La transition vers ces nouvelles dynamiques de pouvoir peut être complexe et chargée d’incertitudes, mais elle est également pleine de promesses. »
Et Sahel Tribune de conclure : « Pour les nations africaines, c’est l’opportunité de fermer définitivement le chapitre de la dépendance et de l’interférence, et d’ouvrir celui de l’autodétermination et du renouveau. »
Rappelons que les régimes militaires ouest-africains ne sont pas pressés de s’en remettre au peuple. Au Mali, l’élection présidentielle a été reportée ; au Burkina Faso, un scrutin est prévu, mais on ne sait pas quand ; et au Niger, aucune échéance électorale n’a été fixée, de même qu’en Guinée.
Crédit: Lien source
Les commentaires sont fermés.