A l’assaut des capitales, Queen Rima assure le show à Abidjan et Ouagadougou

MIA : une machine à remonter le temps te renvoie en 2014 pour rencontrer l’artiste que tu étais alors. Qu’aimerais-tu dire à cette jeune femme ?

Queen Rima : la première réaction que je voudrais partager avec cette jeune femme prête à tout sacrifier et tout risquer pour la scène, ce serait mon regard admiratif. Je lui dirais de ne rien lâcher. Je la féliciterais pour son parcours déjà exceptionnel, son engagement.

Je l’encouragerais à savoir mieux regarder comment son art commence à porter ses fruits, même si l’impatience lui donne le sentiment que le travail n’est pas assez vite récompensé. Je lui parlerais de la musique guinéenne, de tous ces styles qui rivalisent avec une grande richesse, de son propre talent à porter une voix audacieuse qui participe à inspirer toute une génération.

Je lui dirais que les obstacles et la méchanceté humaine qu’elle croise sur sa route sont les tremplins de sa créativité et de sa résilience. « C’est ce qui t’aidera à t’imposer sur la scène ; c’est ce qui fera de toi une femme bien plus puissante que ce que tu peux imaginer aujourd’hui ».

MIA : en quoi l’expérience du Prix Découverte RFI est un tremplin pour tes projets ?

Faire partie de la sélection RFI m’a offert des rencontres fabuleuses. Je n’ai pas ramené le prix Découverte à Conakry comme Sia Tolno et Soul Bang ‘s, ce qui aurait d’avantage booster ma carrière et changer le regard en Guinée sur les jeunes artistes. Mais je ne peux que dire Merci pour la visibilité incroyable et toutes les portes qui se sont ouvertes.

La condition première pour conserver le statut d’artiste internationale est de se produire sur des scènes qui m’amènent à sortir de mon pays. Je tiens d’ailleurs à saluer tous les festivals africains qui m’invitent et qui font tant pour les artistes. Une artiste sans scène, c’est un jardin sans parfum ! Une artiste vit et respire pour l’intensité qui la traverse quand elle vibre et bouge avec une foule.

C’est l’audience qui fait le parcours, pas seulement le talent ou le succès éphémère de tel ou tel titre. Le Prix RFI, c’est comme si tout d’un coup il n’y avait plus de limite à cette audience, à cette confiance qui se gagne dans la chaleur et la sueur des concerts. Alors tu rêves encore plus de pouvoir aussi te produire sur les autres continents, d’embarquer d’autres publics dans ton univers.

MIA : peux-tu nous parler des deux exigences qui sont tes gardiennes du feu sacré, être toujours au meilleur de ton potentiel, ne pas trahir pour l’illusion d’un succès éphémère ce qui fait ta différence, ton geste artistique ?

Queen Rima : je fais avec ce que j’ai de mieux à offrir en live, que ce soit dans un stade bondé à Conakry ou dans un très grand festival comme Afrobeat au Burkina Faso. Le public me transcende à chaque concert par son accueil enthousiaste et son énergie. Ma force, ma langue, mon phrasé, l’originalité, cela fait partie de moi, de mon histoire. J’assume mes choix de façon naturelle, spontanée, pas pour me démarquer d’autres artistes ou répondre aux codes du marché musical.

C’est ainsi que je me sens libre et puissante, dans la langue qui m’a été transmise, le soussou. Mon rapport à la danse, qui est mon premier mode d’expression, apporte aussi beaucoup pour l’échange avec mes compagnons de scène, musicien ou danseur.

Un public ressent tout de suite cette osmose. Le dialogue dans le feu de l’instant que je partage avec toutes les personnes autour de moi, même si c’est moi qui tiens le micro et qui chante, c’est pour cela que j’ai choisi de faire ce métier exceptionnel.

L’exigence, c’est de réussir à en vivre en Afrique grâce aux festivals et à toutes celles et ceux qui aiment ma musique, sans attendre que le succès ou la reconnaissance viennent d’ailleurs.

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