À qui sert l’augmentation du salaire minimum?

Quels sont les impacts des hausses du plus faible taux horaire qu’un employeur puisse offrir à ses employés? Permettent-elles de subvenir aux besoins de base des Néo-Brunswickois? Comment affectent-elles les entreprises?

Les estimations de Statistique Canada démontrent que le nombre de Néo-Brunswickois ayant droit à ce taux horaire oscillait entre 13 000 et 26 000, en 2019, avant la pandémie.

Il a ensuite chuté jusqu’à 9200, en janvier 2022, avant de refaire un bond trois mois plus tard et d’augmenter jusqu’à 33 900, en avril 2023.

Par après, une baisse constante a pu être observée depuis, et le nombre d’employés à ce taux horaire était de 12 900 en mars.

En avril, Fredericton annonçait une augmentation du salaire minimum de 55¢/h. Il atteignait alors 15,30$/h.

En 2018, le gouvernement provincial avait annoncé son indexation annuelle en fonction de l’indice du prix à la consommation. Bien que cette mesure ait été demandée par le Front commun pour la justice sociale, la coordonnatrice provinciale, Janelle LeBlanc, estime que le montant de base à indexer ne permet pas à un individu de subvenir à ses besoins.

«Les travailleurs vivent en situation de pauvreté aujourd’hui. Ça n’a aucun sens!», souligne-t-elle, tout en indiquant que le taux horaire de 15$/h était demandé il y a dix ans. Il devrait plutôt se situer aux alentours de 20$/h, aujourd’hui.

«Les banques alimentaires voient une augmentation des travailleurs et travailleuses qui utilisent leurs services, ce qui inclut ceux et celles au salaire minimum», illustre-t-elle.

Du côté de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), on préconise une autre méthode: gérer les augmentations du salaire minimum en fonction du salaire médian.

«Quand les salaires en général augmentent, le taux du salaire minimum va augmenter en proportion», explique l’analyste principal des politiques du Canada atlantique, Frédéric Gionet. Il considère ce type d’ancrage plus «solide» que le mécanisme actuellement en place.

Au-delà du salaire

D’autre part, M. Gionet, estime que les gouvernements pourraient miser sur d’autres mesures que l’augmentation du salaire minimum pour alléger le fardeau des ménages moins nantis.

«Le salaire minimum est une méthode souvent préconisée pour la réduction de la pauvreté ou aider les gens qui sont à faible revenu. Mais dans la majorité des cas, ça ne change pas vraiment leur situation financière», juge-t-il.

«Il y a d’autres mécanismes qui sont beaucoup plus intéressants, qui pourraient apporter de meilleurs résultats, comme l’augmentation du crédit personnel d’impôt, qui amènerait des gens à avoir un chèque de paie un peu plus généreux, au final.»

Le Front commun est aussi d’avis que le gouvernement ne devrait pas uniquement s’attarder aux taux horaires des Néo-Brunswickois.

«Les problèmes sociaux que l’on voit aujourd’hui ne seront pas uniquement résolus avec un salaire de subsistance. C’est certain qu’il faut du financement dans nos programmes sociaux et nos services publics. Il faut faire quelque chose pour le logement aussi, comme de plafonner les loyers et construire plus de logements sociaux et abordables», indique Mme LeBlanc.

M. Gionet ajoute que l’augmentation du salaire minimum aura tendance à provoquer une hausse des salaires en général, et fera donc augmenter le coût de la vie.

«C’est un mécanisme qui, selon nous, n’est pas exceptionnellement juste. Non seulement il n’apporte pas les résultats espérés pour aider les gens à faible revenu. mais de l’autre côté, ça n’affecte que les entreprises qui doivent payer le tout.»

Selon un sondage mené du 17 août au 27 septembre 2023 par la FCEI en Atlantique, 26,5% des 159 entreprises néo-brunswickoises questionnées ont dit avoir réduit leur nombre d’employés, et 60,9% ont affirmé avoir augmenté leurs prix.

«Les PME n’ont pas la marge de manœuvre pour absorber ces coûts-là. Ils doivent presque tous les passer aux consommateurs. Et bien souvent, les consommateurs sont des gens employés au salaire minimum. Donc, ça peut parfois créer un cercle vicieux.»

Janelle LeBlanc souligne que les femmes sont surreprésentées parmi les employés payés à ce taux, et que les postes concernés ont tendance à être non syndiqués et à temps partiel.

«C’est une minorité des gens qui vit uniquement grâce au salaire minimum», note de son côté Frédéric Gionet. Il indique que plusieurs personnes payées à ce taux horaire ont tendance à avoir d’autres sources de revenus qui s’y ajoutent.

Impacts sur les entreprises

Environ 90% des membres de la FCEI paient leurs employés au-delà du salaire minimum. La situation observée par la Chambre de commerce pour le Grand Moncton est similaire.

«Avec la pénurie de main-d’œuvre, ils n’ont pas le choix s’ils veulent retenir leurs employés», explique la directrice générale, Nadine Fullarton.

«En même temps, le coût des opérations continue d’augmenter. Donc, ça ajoute beaucoup de pression sur les entreprises – et les petites en particulier.»

Du côté du Front commun, on dit aussi entendre ces préoccupations. Mme LeBlanc affirme cependant que des salaires plus généreux peuvent tout de même être avantageux pour les entrepreneurs.

«Des études démontrent que lorsqu’on augmente le salaire, les entreprises, les travailleurs et travailleuses, la société et le gouvernement en retirent des bénéfices. Les taux d’emploi et de productivité augmentent, alors que le taux d’absentéisme diminue», indique-t-elle en se basant sur des chiffres du Centre canadien de politiques alternatives et du Human Development Council.

Ce dernier estimait d’ailleurs qu’en 2023, le taux horaire de subsistance à Moncton était de 22,75$/h, de 21,65$/h à Bathurst, et de 24,50$/h à Fredericton.

«Le gouvernement pourrait offrir une aide temporaire aux petites entreprises pour ce qui est de l’augmentation du salaire minimum», suggère Mme LeBlanc.

Crédit: Lien source

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.