Anglais en maternelle : le Sénégal redéfinit son avenir linguistique

Près de 600 établissements pilote proposent depuis peu aux élèves du primaire d’apprendre l’Anglais, une discipline jusque-là enseignée à partir du collège seulement. Le Sénégal entend ainsi rattraper son retard. En effet, le pays (dont le cursus scolaire se déroule en Français) figure parmi les nations maitrisant le moins bien l’Anglais ; il se classe à la 102eme place sur 116 selon la plateforme de formations linguistiques « Education first ».
Objectif du gouvernement : permettre à la jeunesse sénégalaise de devenir réellement anglophone avec, à la clé, d’autant plus d’opportunités. Voilà pour les grands principes. Ne soyons pas dupes, toutefois : s’y ajoutent, en arrière-plan, des considérations géopolitiques…
Pour le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye – qui a été élu l’an dernier en jouant à fond la carte du Panafricanisme – octroyer une place plus grande à l’Anglais entre dans le rapport de force entamé, ces derniers mois, avec la France, le colon d’hier…

Une réforme sans moyens…

Avec circonspection. Un tiers des enseignants aurait boycotté l’expérimentation… le premier jour en tout cas. Même grogne du côté des syndicats. Leurs griefs ? A les entendre, Dakar imposerait une réforme au pas de charge sans mettre, en face, les moyens adéquats (les profs n’ont même pas de manuels d’anglais…)
Plus grave, selon eux toujours, les autorités ne s’attaqueraient pas aux deux vrais écueils dont pâtit l’enseignement de l’anglais : un, la pédagogie – qui est ultra datée ; deux, le manque de qualification des enseignants eux-mêmes.

Quelle place, à l’avenir, pour le Français ?

Une dernière critique se fait jour, plus politique celle-là… Certains redoutent que les Sénégalais, qui sont aujourd’hui parfaitement francophones, ne se focalisent plus à l’avenir… que sur l’Anglais… au risque d’oublier l’atout – décisif ! – qu’il y a à maîtriser le Français – une langue parlée par plus de 300 millions de personnes dans le monde.
Dans une récente tribune, un élu sénégalais (opposé au projet du gouvernement) écrivait ceci : « Notre rapport à la langue française devrait cesser d’être passionnel pour être traité sous l’angle de la réalpolitique ». Et l’élu de conclure : remplacer le Français par l’Anglais, ce n’est ni plus ni moins que « passer d’une domination linguistique étrangère à une autre ». A bon entendeur…
Reste à savoir, à court terme, si l’expérimentation sera généralisée à la rentrée 2025… Et, à long terme, qui des deux l’emportera : Molière ou Shakespeare ?


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