Finance
Comment la technologie pousse la Gen Z à investir
Réseaux sociaux, plateformes «gamifiées», tutos didactiques, la finance épouse les canaux de communication de la Gen Z pour l’attirer vers l’investissement. Face au mirage de l’enrichissement éclair, des approches à long terme se font jour.

La maison d’investissement Vontobel a fait figure de pionnière lors du lancement de son app Volt en 2019.
DR
- Les applications financières innovent pour inciter la Gen Z à investir.
- Des solutions comme Volt de Vontobel ou encore SwissBorg revendiquent des approches à long terme de gestion de patrimoine.
- Sur les réseaux sociaux, la frontière entre information financière et marketing d’influence est parfois ténue.
Rien n’est trop beau pour séduire la Gen Z gagnée par la fièvre investisseuse. Affichage dans les rues passantes et les transports publics, campagnes sur les réseaux sociaux, publicité programmatique, personne n’a pu échapper au marketing tous azimuts de l’application Yuh – conjointement lancée par Swissquote et PostFinance il y a moins de quatre ans, avec son ciblage très jeune, quasi teen, assumé. Le matraquage semble payer. Yuh revendique être désormais la première app financière de suisse, avec +48% de comptes sur un an et 3 milliards d’avoirs en dépôt, et affiche en 2024 son premier résultat bénéficiaire.
Application financière de banque privée
Swissquote et PostFinance ne sont pas les seuls sur le marché concurrentiel de l’application financière. Organisatrice ce mercredi 26 mars à l’Université de Genève d’un évènement consacré à l’investissement chez les jeunes, la maison d’investissement Vontobel fait figure de pionnière, avec le lancement de son app Volt en 2019. Accessible dès 10’000 francs, ou bien dès 500 francs dans le cadre d’un troisième pilier, elle se distingue par son approche de gestionnaire de fortune, selon Yassine Ben Hamida, directeur de la succursale genevoise de Vontobel. «À la différence d’apps comme Yuh, Volt n’est pas conçue pour du trading, on est sur de l’investissement à long terme, où le capital se construit à partir de rendements composés.»
Le portefeuille de base conçu et quotidiennement rebalancé par Vontobel peut être customisé par le client selon ses convictions, en mettant l’accent sur certaines classes d’actifs ou secteurs. Par exemple, cryptomonnaies ou commodities, ou encore e-sport-gaming, eau, digitalisation. Une gestion optimisée par des algorithmes qui affiche des rendements allant jusqu’à 10% lors d’une année favorable comme 2024.
Yassine Ben Hamida met en garde contre certaines pratiques en ligne. «Il faut savoir que dans le cas d’une application financière mondialement connue comme Plus500, la plateforme de trading parie contre ses propres clients. Les gens perdent de l’argent avec les leviers, c’est évidemment aux antipodes de l’approche de Vontobel.»
«Pour la jeune génération, s’asseoir devant un banquier en costume-cravate pour investir peut-être intimidant, une app intuitive et didactique permet de franchir le pas.»
Wealth management crypto
Plus500 n’est pas la seule société à susciter la controverse. Dans le viseur de la justice et des autorités de régulation américaines depuis plusieurs années, l’app Robinhood, finance «gamifiée», a été condamnée à plusieurs reprises pour «dommages conséquents aux clients» et divulgation «d’informations fausses et trompeuses», avec encore 26,5 millions d’amende en mars 2025, notamment pour sa plateforme crypto. Des pratiques dont tient à se distancier Alexander Petoud, directeur commercial de SwissBorg à Lausanne. «SwissBorg n’est pas un simple outil de trading. Par choix, notre application est exclusivement disponible sur mobile. Nous privilégions une approche responsable, sans effet de levier.»
Proposition de valeur de SwissBorg: du «wealth management web3». En clair, de la gestion de patrimoine en crypto, un concept qu’approfondit en interne Alexander Petoud, au bénéfice de seize ans d’expérience en private banking chez UBS et Pictet. «Pour la jeune génération, s’asseoir devant un banquier en costume-cravate pour investir peut-être intimidant, une app intuitive et didactique permet de franchir le pas.»
Afin de séduire sa communauté de 36 ans de moyenne d’âge, SwissBorg s’appuie sur un modèle communautaire, incarné par son réseau Telegram. «Nos ambassadeurs organisent régulièrement des meetups pour échanger sur la crypto et l’investissement, aux quatre coins de l’Europe. Ce soir en Valais, mais régulièrement à Lausanne, Genève, Zurich, Paris, Bruxelles ou encore Barcelone.» Alexander Petoud met en avant l’importance de l’éducation financière avec des tutoriels, des contenus pédagogiques et un accès transparent aux informations clés des projets listés sur la plateforme.
Information ou influence?
Si les réseaux sociaux restent un canal privilégié pour toucher les jeunes investisseurs, les «finfluenceurs» (influenceurs financiers) sont régulièrement épinglés, voire condamnés, dans toute l’Europe. Dernier en date mi-mars 2025, le candidat de téléréalité Julien Tanti (8 millions de followers sur Instagram) a écopé d’une amende du service de répression des fraudes français pour «pratiques commerciales douteuses».
Thomas Veillet, youtubeur financier suisse avec sa vidéo quotidienne Morningbull suivie par 47’000 followers, se définit comme un «vulgarisateur» et non un influenceur. Il met en garde. «Parfois, certains jeunes me disent: «J’ai entendu sur TikTok que…» Si un pseudo-expert autoproclamé, star de la téléréalité ou autre, invite directement à investir dans un produit, c’est forcément biaisé.»
L’ancien d’UBS reconnaît toutefois la difficulté à intervenir pour le régulateur: «Il est clair qu’en Suisse, on a toujours été à la traîne en termes de régulation, mais au vu de la crédulité d’une partie du public, il faut choisir entre réglementer ou accepter qu’ils se fassent démolir. Le challenge est qu’on a un jeu de certains influenceurs qui produisent des contenus à la limite entre information et recommandation. C’est parfois une question d’interprétation.»
Thomas Veillet invite les plus jeunes à faire preuve de patience. «Commencer l’investissement à 18 ans, c’est créer tout seul son deuxième pilier, à condition de ne pas se faire aspirer par le mirage de l’enrichissement rapide vendu par des influenceurs en Porsche ou Ferrari sur les réseaux. Ce pour quoi il est important de raconter les erreurs et les pertes essuyées lors des premiers pas dans l’investissement, mais évidemment, il y a moins de candidats.»
«Le meilleur de l’actu économique»
Vous souhaitez rester connecté aux tendances de l’économie suisse et mondiale, suivre les femmes et les hommes qui inventent le monde de demain et mieux comprendre les enjeux de ces questions? Inscrivez-vous à notre newsletter dès maintenant.
Autres newsletters
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Crédit: Lien source