Dans un débit de boissons
de Mènontin, un quartier périphérique de Cotonou, les habitués ont dû s’habituer
à l’accent de Louise, 39 ans, qui y officie depuis sept ans comme
serveuse. Le chaleureux accueil de la jeune femme ne laisse guère les clients indifférents, ce qui lui vaut quelquefois de généreux pourboires. Mais derrière l’air enjoué de la serveuse, se cache une histoire moins joyeuse.
Louise en originaire de Douala, la capitale économique du Cameroun. En 2016, elle quitte sa ville natale avec son compagnon béninois : elle interrompt sa formation en restauration, influencé par son compagnon qui lui promet de l’aider à rejoindre le Maghreb puis l’Europe. « Il
m’a dit qu’une fois au Bénin, nous signerions un mariage civil et qu’un de ses amis
vivant en France nous aiderait à le rejoindre », se souvient-elle. Mais l’histoire tourne court : désapprouvée par ses beaux-parents, Louise est mise à la porte par son compagnon. « Il
m’a dit qu’il devait obéir à ses parents » soupire-t-elle avec
tristesse.
Grâce à des membres d’une
association de Camerounais résidant au Bénin, Louise décroche un travail de
cuisinière chez un expatrié européen. Mais une fois la mission de six mois
achevée, celui-ci retourne en Europe laissant Louise au chômage. Finalement, elle rejoint une amie togolaise au service au bar de Mènontin où elle officie depuis 2017. « J’essaie
de m’intégrer ici et de refaire ma vie en attendant de voir ce que demain
me réserve », confie-t-elle, non sans anxiété.
« Aucune femme ne choisit de faire le trottoir »
Chantal, la
quarantaine, est quant à elle ivoirienne. Arrivée au Bénin il y a une quinzaine d’années, elle y a rencontré un Congolais qui est depuis son époux. Ensemble, ils ont fondé à Akpakpa, un
quartier cosmopolite de Cotonou, un restaurant où elle propose des spécialités de son pays d’origine. Atiéké, Foufou, Foutou banana… de quoi satisfaire
aussi bien les Ivoiriens de Cotonou que les amateurs de cette cuisine.
Dans son restaurant,
Chantal préfère recruter des migrantes : Ivoiriennes, Togolaises, Ghanéennes,
Congolaises. Elle explique : « Les Béninois ne sont pas méchants, mais méfiants au point que
l’insertion professionnelle de personnes venues d’ailleurs est souvent difficile. » Parfois, poursuit la restauratrice, « des
jeunes filles arrivées de pays environnants et n’ayant pas une qualification
professionnelle particulière se retrouvent à faire le trottoir,
n’ayant pas trouvé mieux. »
C’est notamment le cas d’Akoeba. La vingtaine, cette jeune femme est rencontrée à Jonquet, quartier mal famé de Cotonou. « Je n’ai pas choisi de devenir une prostituée. Non ! C’est la vie qui m’y a obligée », lance-t-elle en langue ewé. Avant de couper court à la conversation : « C’est mon problème ! » Plus disposée à évoquer sa situation, Pétronie explique être contrainte à se résoudre à la prostitution en plus de son emploi comme commerciale dans une boutique de Missèbo, un quartier commercial de la ville. Elle abonde : « aucune femme ne choisit de faire le
trottoir dans un pays étranger ; ce sont les circonstances qui
obligent à s’y adonner ».
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