Une dizaine de jours avant la consultation, plusieurs juristes gabonais, ont interpellé les autorités de la Transition, à propos de la présence de nombreuses erreurs de renvois dans le projet définitif. Ces derniers ont même proposé le report de la date du scrutin afin d’y remédier, sans succès [1]. Aussi surprenant que cela puisse paraître, des modifications de forme (erreurs de renvois [2]) et de fond (ajout de mots, d’éléments nouveaux [3]), sont aujourd’hui identifiables dans le texte promulgué. Le texte que nous avons adopté par referendum, aurait-il été modifié avant sa promulgation, sans l’aval du collège électoral ? Une lecture comparative du projet définitif ainsi que de la loi référendaire promulguée en décembre 2024 [4], permet d’en avoir la réponse.
Je vous propose une brève analyse du préambule, puis de quelques articles de ce texte, sui generis [5].
Préambule.
La phrase « Porté par l’esprit du 30 août 2023 », interroge, dans la mesure où ce qui est arrivé ce jour-là, quoi qu’on en pense, demeure une infraction à la loi pénale. Une écrasante majorité de Gabonais semble avoir acclamé cet acte, parce qu’excédés par plus de 60 ans de misère et d’injustice, mais est-ce une raison pour encenser un acte qui reste un renversement du fonctionnement régulier des institutions ?
Le retrait de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. Quelle lecture peut-on faire du retrait de ce texte fondateur en matière de démocratie, de droits et libertés fondamentaux ?
Entre l’avant-projet et le projet définitif de constitution, plusieurs dispositions ont été, soit modifiées, soit complètement supprimées. Ainsi, dans la nouvelle loi fondamentale gabonaise, on peut curieusement observer l’absence de la DDHC dans le préambule. Pourtant depuis 1959, jusqu’à nos jours, en passant même par la constitution autoritaire du 21 février 1961 [6] [7], de même que par la loi mère de 1979 en plein parti unique [8], toutes les lois fondamentales de l’Etat, ont toujours rappelé dans leurs préambules, l’attachement du Gabon aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, tels qu’ils résultent de la DDHC de 1789.
En lisant la DDHC, notamment son article 16, nous découvrons ceci : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ».
Je tiens à rappeler que je ne suis pas dans le secret des Dieux, cependant je me permets de faire le commentaire suivant : quand on lit la nouvelle mère des lois, on peut voir un pouvoir exécutif omnipotent, capable de limiter, de freiner les deux autres pouvoirs, sans que ces derniers ne puissent avoir la même possibilité à son encontre, en cas d’abus. Conséquence : on ne sait pas s’il y’a réellement une séparation des pouvoirs.
Les dispositions relatives à l’équilibre des pouvoirs, me semblent contraires à l’article 16 de la DDHC, c’est peut-être cela qui peut justifier sa suppression.
Ce préambule aurait pu être l’occasion de réaffirmer solennellement l’attachement du Gabon aux sujets suivants :
- Le droit inaliénable et imprescriptible de nous organiser librement et de développer notre vie politique, économique, sociale et culturelle, selon notre propre génie.
- Une véritable démocratie politique, économique, sociale et culturelle.
- Le rejet de l’injustice avec ses corollaires que sont, l’impunité, le népotisme, le régionalisme, le tribalisme, le clanisme et le clientélisme.
- La détermination à sauvegarder et à consolider l’indépendance et l’unité nationales dans le respect de nos diversités et de nos particularités positives.
- L’importance des Droits de l’enfant, de la femme et de la parité de représentation homme-femme au sein des institutions du pays.
- La volonté de voir tous les Etats Africains s’unir et travailler de concert en vue de promouvoir et de consolider l’unité africaine à travers les organisations continentales, régionales ou sous-régionales pour offrir de meilleures perspectives de développement et de progrès socio-économique aux Peuples d’Afrique.
- La promotion d’une coopération internationale mutuellement avantageuse et au rapprochement des peuples du monde, dans le respect de leurs identités respectives et des principes de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de chaque Etat.
I. Des principes et des valeurs de la République.
La société gabonaise est actuellement traversée par de nombreux et virulents débats au sujet de sa véritable identité ethnolinguistique et de la nationalité Gabonaise d’origine. L’article 1er de la Constitution, rate – à mon sens – une occasion historique de citer exhaustivement l’ensemble des langues nationales du Gabon, de leur donner un vrai statut officiel, d’énumérer et de verrouiller constitutionnellement – une bonne fois pour toutes – les groupes ethnolinguistiques qui composent le pays, et la nationalité gabonaise d’origine.
Au sujet de l’article 2, est-ce vraiment nécessaire de constitutionnaliser la célébration de la fête dite de Libération ? En dehors de la fête du 17 août – date de l’indépendance du Gabon – la seule à avoir été constitutionnalisée jusque-là, il existe d’autres célébrations à envergure nationale au Gabon. Je pense notamment à la fête nationale du Drapeau [9], sauf erreur de ma part, cette célébration fait simplement l’objet d’un décret. Un règlement n’aurait-il pas pu suffire ?
L’article 3 interdit à une section du peuple ou à un individu, de s’attribuer l’exercice de la souveraineté nationale ou d’entraver le fonctionnement régulier des institutions. C’est pourtant ce qui est arrivé le 30 aout 2023, et que l’article 2 de la même loi référendaire propose de célébrer. Quand bien même on pourrait penser que cela a pu être salvateur, est-ce une bonne raison d’en constitutionnaliser la célébration, au point de créer une telle incohérence dans un texte constitutionnel ?
L’article 5 consacre une séparation des pouvoirs dont on a du mal à voir l’effectivité. Je rappelle à toutes fins utiles, qu’avant la consultation du 16 novembre 2024, les autorités avaient annoncé, que la nouvelle constitution consacrerait un régime présidentiel. Aux dernières nouvelles, un régime présidentiel : se caractérise – me semble-t-il – par une stricte séparation des pouvoirs : le pouvoir législatif ayant le monopole de l’initiative et la pleine maîtrise de la procédure législative.
La séparation des pouvoirs [10], est un principe dont le but est de prévenir l’abus de pouvoir, dans les régimes qui se veulent démocratiques.
Pour atteindre cet objectif, ce principe pose trois critères à respecter :
1/ Le pouvoir ne doit pas être confié à une entité unique, mais à plusieurs organes : c’est pour cela qu’il faut un pouvoir exécutif, un pouvoir législatif et un pouvoir judiciaire. Ce premier critère est respecté par le texte, puisqu’en effet on y parle de trois organes : l’exécutif dirigé par le président de la République (art. 41 et suivants), le législatif composé de L’Assemblée nationale et du Sénat (art. 76 et suivants) et le judiciaire : composé des Tribunaux et Cours (art. 109 et suivants).
2/ Chaque pouvoir doit avoir une fonction différente. Dans notre nouvelle loi fondamentale, le judiciaire sanctionne quand la loi n’est pas respectée, Le législatif « fabrique » la loi, l’exécutif détermine et conduit la politique du Pays, mais en plus de cela il peut aussi être à l’initiative de la « fabrication » de la loi et même parfois la « fabriquer » lui-même, notamment par le mécanisme de l’ordonnance en période d’intersession parlementaire (art.99) ou de l’ordonnance spéciale en matière de budget (art.96).
3/ Les différents pouvoirs doivent être les contrepoids les uns des autres : or si le président de la République peut dissoudre l’Assemblée nationale (art.62), qu’est-ce que le législatif peut faire contre ce dernier en cas d’abus ?
L’article 8 prévoit que toute atteinte à la laïcité de l’Etat est punie par la loi. L’article 30 indique que l’Etat organise l’enseignement public, sur la base de la neutralité religieuse, jusque-là tout semble cohérent. Puis tout d’un coup, l’article 32 décide de nager à contre-courant de la laïcité – dans le plus grand des calmes – en consacrant ceci : « Dans les établissements publics d’enseignement, l’instruction religieuse peut être dispensée aux élèves à la demande de leurs parents ». Que s’est-il passé entre l’article 8 et l’article 32 ? L’Etat et ses démembrements étant laïcs, l’enseignement public ne saurait se passer du respect de ce principe. De plus, quel est l’intérêt d’introduire l’enseignement des croyances dans l’école publique, dans un pays aussi divers sur le plan religieux ? Désormais, les enfants devront-ils s’identifier en tant que Bwitistes [11], Mvettistes [12], chrétiens et j’en passe, à l’école ? A quoi servira dorénavant le système d’enseignement privé confessionnel, dans un tel contexte ?
Je rappelle à toutes fins utiles que, la laïcité est un principe d’organisation et de fonctionnement des services de l’Etat et des autres personnes publiques, qui veut une séparation stricte entre les affaires religieuses et les affaires publiques [13]. La laïcité repose sur la liberté de croire ou de ne pas croire, tant qu’on respecte l’ordre public, la séparation entre les religions et l’Etat, et l’égalité de tous – peu importe sa croyance – devant le service public fourni par l’Etat. Le Gabon a tout intérêt à maintenir le caractère laïc de son Etat, en effet, tous les Gabonais ne pratiquent pas la même religion, comme on peut l’observer dans certains pays, on n’est donc pas à l’abri de discriminations si l’Etat devenait confessionnel. La religion et l’Etat ne sont pas de la même nature (Religion : foi/ Etat : Loi) et n’ont pas le même objectif (Religion : intérêt communautaire/ Etat : intérêt général, service public).
L’article 9 énumère près de 30 « valeurs républicaines ». Nul ne peut dénoncer l’affirmation de valeurs au sein d’une République. En revanche, il est important de retenir qu’une constitution reste, dans tous les cas, un texte juridique. Il m’apparait donc curieux, de lire dans un texte juridique, des « valeurs » comme le pardon ou la redevabilité, qui me semblent plus relever de la morale ou de la religion que du Droit.
Est-ce à dire qu’un voleur peut désormais invoquer le pardon pour se défendre dans le cadre d’un procès pénal ? La Constitution est le texte juridique au-dessus de tous les autres textes de loi dans une Nation. La valeur constitutionnelle – que le pardon est à présent – est donc au-dessus des lois pénales du pays.
II. Des droits, des libertés et des devoirs.
L’article 22 de la loi mère renforce l’incohérence du texte. En effet, le deuxième paragraphe de cet article consacre dorénavant un régime d’autorisation préalable pour toutes manifestations ou réunions publiques en République gabonaise. De nombreux Gabonais ne le savent peut-être pas, mais les règles qui régissent les réunions et manifestations publiques au Gabon, prévoient une simple information ou déclaration de toutes manifestations ou réunions publiques, trois jours avant l’évènement pour qu’il se tienne. Ce n’est que si l’administration estime que la réunion ou manifestation projetée est de nature à troubler l’ordre public, qu’elle peut proposer un changement d’itinéraire, ou l’interdire dans une décision motivée, qu’elle notifie immédiatement aux déclarants. Il existe même des situations dans lesquelles aucune déclaration n’est requise [14]. Il est important de noter que cette loi de 2017, relative aux réunions et manifestations publiques, n’a pas encore été modifiée ou abrogée, pour correspondre au nouveau principe constitutionnel de l’autorisation préalable.
A la suite de cette réforme législative nécessaire, nous passerons donc de ce régime qui me semble plutôt protecteur des libertés publiques, à un régime d’autorisation préalable, qui obligera les citoyens à attendre d’avoir une autorisation de l’administration pour pouvoir exercer des libertés publiques, pourtant garanties par la même constitution et des textes internationaux, comme la Déclaration universelle des droits de l’homme, rappelée dans le préambule.
Je m’interroge sur l’intérêt d’une telle disposition, avec l’objectif d’enracinement dans la démocratie et l’Etat de droit, affiché par d’autres dispositions du même texte.
S’inscrivant dans le même sillage que l’article précédent, l’article 23 réaffirme le droit de grève, tout en le restreignant, dans la même phrase.
Au détour d’une phrase de l’article 30 on peut croiser une formulation intrigante : « L’Etat a le devoir d’organiser l’enseignement public sur le principe de la neutralité religieuse et, selon ses possibilités, sur la base de la gratuité ». Le groupe nominal « selon ses possibilités » interroge. Effectivement, si l’Etat n’est pas tenu d’organiser une école publique gratuite, de qui cela serait-il la responsabilité ? Le citoyen ?
A l’article 36, il est indiqué ceci : « (…) Il a le devoir de veiller [15], au sein de l’Administration, au respect des principes (…) de redevabilité ». Je suis curieux de savoir qui devra être redevable de qui au sein de l’administration publique gabonaise.
III. Du pouvoir exécutif.
L’article 41 consacre un changement fondamental comparativement à la constitution de mars 1991, qui s’appliquait jusqu’au 30 aout 2023. En effet, le pouvoir exécutif est désormais monocéphale : le président de la République détient dorénavant tout seul, le pouvoir exécutif. A la place d’un premier ministre avec lequel il partageait (en théorie) le pouvoir exécutif dans la loi fondamentale de 1991 (article 8 constitution de mars 1991), il a un vice-président de la république, qui est son assistant (article 48).
Dorénavant, il détermine et conduit lui seul, la politique de la nation. La constitution de mars 1991 prévoyait que c’était la prérogative du gouvernement en concertation avec le président de la République. Pour accomplir cette mission, il est assisté d’un vice-président du gouvernement (article 69).
L’article 42, évoque un mandat de 7 ans, alors qu’en novembre 1960 déjà, la constitution de la toute jeune République indépendante du Gabon, prévoyait un mandat de 6 ans [16]. Qu’est-ce qui justifie que 65 ans après les indépendances, on choisisse de ne pas nous inscrire dans le même sillage, alors que la tendance africaine, et même internationale, est à la réduction de la durée des mandats présidentiels ?
L’article 43 qui parle des conditions à remplir pour être éligible à la présidence de la République, ne manque pas de soulever quelques questions :
Qui parmi nous choisit de naitre fils/fille de Président(e) de la République ? Doit-on désormais consulter un médium pour s’assurer de ne pas épouser un Homme ou Une Femme qui pourrait devenir Président(e) de la République, au risque ne pas pouvoir soi-même être éligible à cette fonction ?
Le but de la loi est-il de faire irruption dans la vie privée des citoyens, en les obligeant de convoler en justes noces, s’ils souhaitent un jour avoir le privilège de présider aux destinées de la nation ?
Quid des hommes mariés sous l’option polygamique du mariage ? le texte dit précisément ceci « être marié(e) à un(e) Gabonais(e) ».
Comment imposer à un citoyen de parler au moins une langue nationale pour diriger son pays [17], alors qu’aucun programme scolaire national depuis 65 ans, n’enseigne les langues nationales aux élèves ?
Etant donné qu’il est nécessaire d’être né Gabonais d’au moins un parent gabonais, « lui-même né Gabonais », je me questionne : quel Gabonais(e) âgé(e) de 50 ans et plus par exemple, peut avoir un parent Gabonais, lui-même né gabonais, quand on sait que personne ne peut être né Gabonais, avant le 17 août 1960, au sens de l’article 2 du code Gabonais de la nationalité ?
Comment un gabonais de la diaspora, ayant le droit de participer à la vie publique de son pays et ayant vécu de gré ou de force, hors de ce dernier durant les cinq dernières années, fait-il pour satisfaire à la condition d’avoir vécu trois (3) ans sur le territoire, ou d’avoir renoncé à une nationalité étrangère, pour concourir aux premières échéances électorales qui suivent la promulgation constitutionnelle ?
Ne sommes-nous pas dans une situation de violation du principe de sécurité ou de prévisibilité juridique ? Selon ce principe, l’activité législative d’un pays – qu’elle adopte de nouvelles lois, ou qu’elle en supprime – doit permettre aux citoyens de compter sur un minimum de stabilité des règles de droit. Ils doivent également être mis en situation d’anticiper les éventuels « effets secondaires négatifs », des changements législatifs, sur leurs actes et statuts [18].
Autrement dit, les changements de lois – aussi nécessaires soient-ils – ne doivent pas mettre en danger les droits, actes et statuts, déjà acquis ou garantis. Or l’application de l’article 43 de notre nouvelle constitution, a déjà remis en cause le droit de certains compatriotes de se présenter à des échéances électorales, sans que ces derniers n’aient été mis en situation d’anticiper ces nouveaux critères et d’avoir un temps raisonnable pour s’y conformer [19].
Dans l’article 45, La présence de l’expression Dieu dans le serment, est contradictoire avec le respect du principe de laïcité. De quel Dieu s’agit-il ? Celui des Bwitistes, des Nyèmbistes, des Melanistes, des Chrétiens…?
L’article 46 est particulièrement problématique, en effet, on y découvre la possibilité pour un vice-président nommé par le/la Président (e) de la République – qui met également fin à ses fonctions – d’assurer en cas d’indisponibilité temporaire à la tête de l’exécutif, les fonctions de Président(e) de la République. En somme, une personne non-élue, érigée en haut responsable de la République, par la seule volonté discrétionnaire du Prince [20], peut présider aux destinées de toute une nation ? même temporairement, cela est-il admissible sur le plan démocratique ?
Dans ce cas, pourquoi n’avons-nous pas fait le choix d’élire le/la vice-président(e), en binôme avec le/la chef(fe) de l’exécutif ? Ce ne serait pas inédit au Gabon, en mars 1967 à la faveur d’une énième modification constitutionnelle [21], Albert Bernard Bongo (devenu Omar Bongo) et Léon Mba ont été respectivement élus ensemble, Vice-président et président de la République, sous la forme d’un ticket électoral.
L’article 62 de la constitution prévoit la possibilité pour le président de la République de dissoudre l’Assemblée nationale. En revanche, cette dernière ne peut plus déposer et adopter une motion de censure contre l’exécutif comme c’était le cas avec la constitution de mars 1991. Ainsi, un déséquilibre particulièrement important, en termes de contre poids, est désormais créé entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif d’une constitution qui prétend pourtant, consacrer un régime présidentiel.
A propos de l’article 72, qui contient le serment des membres du gouvernement, il semble instituer une forme d’omerta « éternelle » pour les membres du gouvernement, puisqu’ils doivent garder « même après la cessation de leurs fonctions » la confidentialité des dossiers et des informations connues, au mépris de leur liberté fondamentale d’expression. Attention, je ne suis pas contre le respect de la confidentialité – qu’on se comprenne bien – ce qui me gêne c’est le fait que cela ne soit pas encadrée dans le temps. En effet, même les plus grands secrets d’Etat, finissent par être déclassifiés au bout de l’écoulement d’un certain temps. Pour ne rien arranger, la confidentialité des dossiers et des informations doit être gardée « religieusement », une énième référence à la religion, dans la constitution d’un Etat qui se veut laïc. J’avoue que cela interroge fortement.
Est-il besoin de s’attarder sur la procédure de mise en accusation, qui, en réalité, relève du parcours du combattant (article 137), alors que pour dissoudre l’Assemblée nationale le président de la République – comme dans une promenade de santé – n’a besoin que de consulter les présidents des Chambres du Parlement et avoir l’avis non contraignant de la Cour Constitutionnelle ?
L’article 139 [22] que les gabonais ont adopté par référendum disait ceci : « La Haute Cour de Justice est liée, à l’exception du jugement du président de la République et de la violation du serment, par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines telles qu’elles résultent des lois pénales en vigueur au moment où les faits ont été commis ». L’article 139 promulgué par les autorités, quant à lui, prévoit ceci : « La Haute Cour de Justice est notamment liée par les termes du serment tel qu’il résulte des dispositions de l’article 45 ci-dessus ». Que faut-il en déduire ? Qu’une forme de précipitation aurait conduit à une rédaction bancale de la première version de cette disposition, qui j’en conviens, était pour le moins contradictoire et floue ? Qu’une modification de cette disposition avant sa soumission à référendum était impossible malgré les nombreuses alertes ? Une chose est sûre, ce modus operandi questionne fortement dans une démocratie…
Le citoyen doit savoir qu’entre l’avant-projet et le projet définitif de constitution qui a été soumis à référendum, quelques dispositions sur des sujets fondamentaux, pour le commun des mortels, ont été supprimées :
- (…) « Les droits des consommateurs et des usagers sont garantis par l’Etat (…) » ancien article 17.
- (…) « L’Etat a l’obligation de respecter la constitution, les droits et libertés fondamentaux ». (…), ancien article 27.
- « l’Etat assure la participation des gabonais résidants à l’extérieur, à la vie de la Nation. Il veille sur leurs intérêts », ancien article 28.
- « L’obtention d’un titre foncier par les personnes physiques est un droit exclusivement réservé aux gabonais » (…) ancien article 13
- l’obligation faite aux personnes occupants de hautes fonctions dans l’appareil de l’Etat, de déclarer leurs patrimoines, ancien article 40.
A titre individuel, j’aurais souhaité qu’on les maintienne.
Version adoptée par référendum | Version modifiée, hors référendum avant promulgation | |
---|---|---|
Article 46 | En cas d’empêchement temporaire du président de la République dûment constaté par la Cour Constitutionnelle, sur saisine des Présidents des deux Chambres du Parlement ou du Vice-Président du Gouvernement, le Vice-Président de la République exerce provisoirement les fonctions de président de la République, à l’exclusion des pouvoirs prévus par les articles 66, 67,68,69,70,71,72,73,145 et 156 de la présente Constitution. L’empêchement temporaire ne peut excéder quarante-cinq jours. Passé ce délai, l’empêchement devient définitif. En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement définitif de son titulaire, constatés par la Cour Constitutionnelle saisie soit par le Bureau de l’Assemblée Nationale statuant à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres, soit à l’initiative du Vice-Président du Gouvernement après convocation du Conseil des Ministres statuant à la majorité simple de ses membres, les fonctions de président de la République, à l’exception de celles prévues aux articles 66,67,68,69,70,71,72,73,145 et 156 sont provisoirement exercées par le Président du Sénat, et, si celui-ci est empêché à son tour, par le Premier Vice-Président du Sénat. Dans tous les cas, ni l’un ni l’autre ne peut être candidat à l’élection présidentielle. Avant son entrée en fonction, le Président du Sénat assurant l’intérim prête serment dans les conditions prévues à l’article 50 ci-dessus. En cas de vacance ou lorsque l’empêchement est déclaré définitif par la Cour Constitutionnelle, le scrutin pour l’élection du nouveau Président a lieu, sauf cas de force majeure constatée par la Cour Constitutionnelle, trente jours au moins et cent-vingt jours au plus après l’ouverture de la vacance ou de la déclaration du caractère définitif de l’empêchement. Les modalités d’application du présent article sont fixées par une loi organique. |
En cas d’empêchement temporaire du président de la République dûment constaté par la Cour Constitutionnelle, sur saisine des Présidents des deux Chambres du Parlement ou du Vice-Président du Gouvernement ; le Vice-Président de la République exerce provisoirement les fonctions de président de la République, à l’exclusion des pouvoirs et prérogatives prévus par les articles 54, 55 alinéa 3, 57, 58, 59, 62, 63, 66, 123, 128, 162 et 167 de la présente Constitution. L’empêchement temporaire ne peut excéder quarante-cinq (45) jours. Passé ce délai, l’empêchement devient définitif. En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement définitif de son titulaire, constatés par la Cour Constitutionnelle saisie soit par le Bureau de l’Assemblée Nationale statuant à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres, soit à l’initiative du Vice-Président du Gouvernement après convocation du Conseil des Ministres statuant à la majorité simple de ses membres, les fonctions de président de la République, à l’exception de celles prévues aux articles 54, 57, 58, 59, 62, 63, 66, 162 et 167 ; sont provisoirement exercées par le Président du Sénat, et, si celui-ci est empêché à son tour, par le Premier Vice-Président du Sénat. Dans tous les cas, ni l’un ni l’autre ne peut être candidat à l’élection présidentielle. Avant son entrée en fonction, le Président du Sénat assurant l’intérim prête solennellement le serment ci-dessous devant la Cour Constitutionnelle, en présence du Parlement, la main gauche posée sur la Constitution, la main droite levée devant le Drapeau national. « Je jure de consacrer toutes mes forces au bien du peuple gabonais, en vue d’assurer son bien-être et de le préserver de tout dommage, de respecter et de défendre la Constitution et l’État de droit, de remplir consciencieusement les devoirs de ma charge et d’être juste envers tous ». En cas de vacance ou lorsque l’empêchement est déclaré définitif par la Cour Constitutionnelle, le scrutin pour l’élection du nouveau Président a lieu, sauf cas de force majeure constatée par la Cour Constitutionnelle, trente (30) jours au moins et cent-vingt (120) jours au plus après l’ouverture de la vacance ou de la déclaration du caractère définitif de l’empêchement. Les modalités d’application du présent article sont fixées par une loi organique. |
Article 67 | Les actes du président de la République autres que ceux visés aux articles 52, 54, 58, 125, et 165, sont contresignés par les membres du Gouvernement chargés de leur exécution. | Les actes du président de la République autres que ceux visés aux articles 52, 54, 58, 62, 69, 123, 150 et 162, sont contresignés par les membres du Gouvernement chargés de leur exécution. |
Article 93 | Les deux Chambres du Parlement se réunissent en Congrès pour les cas suivants :
|
Les deux Chambres du Parlement se réunissent en Congrès pour les cas suivants :
|
Article 139 | La Haute Cour de Justice est liée, à l’exception du jugement du président de la République et de la violation du serment, par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines telles qu’elles résultent des lois pénales en vigueur au moment où les faits ont été commis. | La Haute Cour de Justice est notamment liée par les termes du serment tel qu’il résulte des dispositions de l’article 45 ci-dessus. |
Crédit: Lien source