Deux jours avant le mercredi des Cendres, les évêques d’Haïti encouragent les fidèles du pays à emprunter un chemin de pénitence et à devenir artisans de paix. Face à «l’horreur des violences», le peuple haïtien pourra retrouver la force de se relever dans le Christ ressuscité, assurent-ils.
Jean-Benoît Harel – Cité du Vatican
Dans la nuit du 14 février 2025, une jeune mère est morte de chagrin. Plus tôt dans la journée, des membres d’un gang à Kenscoff, au sud de Port-au-Prince, l’ont obligé à jeter son bébé de deux mois dans un feu. Elle a refusé: les bandits ont pris son nourrisson et l’ont jeté eux-mêmes dans les flammes. Un épisode dramatique symptomatique du contexte de violence que connaît le pays en proie au bon vouloir des gangs armés.
Dans leur message de Carême publié lundi 3 mars, les évêques haïtiens ont mentionné cet «acte odieux», et demandé à la justice d’agir contre les auteurs de telles «atrocités». S’identifiant au peuple d’Israël, victime dans le livre de l’Exode de l’oppression des Égyptiens, ils assurent vivre «une période où le mal semble déchaîné, où le sang des innocents crie vers le ciel».
Pour eux, dans un tel contexte, le temps du Carême est d’abord «un vrai chemin de pénitence», car «l’ampleur du mal qui nous frappe nous oblige à un profond examen de conscience». Dans ce climat de violence généralisée, ils invitent chaque Haïtien à s’interroger: «ai-je laissé l’indifférence ou la peur m’empêcher d’être un artisan de paix? Ai-je contribué, par mes choix, à renforcer l’injustice qui gangrène notre pays?».
Les évêques pointent notamment les responsabilités de ceux qui «ont le pouvoir et l’autorité pour les mettre hors d’état de nuire», et ne le faisant pas, se rendent «complices de leurs horreurs».
Se tourner vers le Christ et construire
Devant «l’horreur des violences, la tyrannie des groupes armés et l’indifférence ou l’impuissance de ceux qui devraient garantir la justice et la paix», la conférence épiscopale du pays se tourne vers le Christ. «Notre peuple, aujourd’hui pourchassé et meurtri, peut retrouver dans le Christ ressuscité la force de se relever», écrivent-ils.
Car l’espérance, au cœur de l’année jubilaire, «ne consiste pas à attendre passivement que le mal disparaisse», mais au contraire poursuivent les évêques, elle «est un appel à construire, dans la foi et la justice, une société où la vie est respectée, où le droit prime sur la force brutale, où chacun se sent responsable du bien commun».
Chaque baptisé est ainsi appelé à vivre ce Carême comme «un temps de combat spirituel et d’engagement concret». D’abord en criant «vers Dieu avec insistance», dans les églises qui deviendront alors des «lieux de supplication pour la paix». Ensuite, par l’aide concrète et matérielle des victimes de ce contexte difficile que connaît le pays depuis plusieurs années. «Soyons, chacun pour l’autre, la main qui relève, la voix qui secourt!», implorent-ils.
Depuis des années, Haïti connait la violence des gangs armés, un phénomène que les dirigeants successifs ne parviennent pas à contrer. Au moins 20 personnes ont été tuées dans la nuit du 24 au 25 février dans un quartier de la capitale du pays au cours d’une attaque de gangs.
Crédit: Lien source