Cent ans avant Paris 2024, la France organisait déjà ses jeux, les premiers JO d’hiver de l’histoire – Edition du soir Ouest-France

Correspondance, Stéphane DUBROMEL.

Cette année 2024 sera olympique, avec la tenue des Jeux d’été en France. Mais saviez-vous que cent ans plus tôt, en 1924, se tenaient les premiers Jeux d’hiver de l’histoire à Chamonix ? Un événement sportif bien loin de la compétition actuelle. En voici quelques épisodes marquants.

Qui se souvient que le 25 janvier 1924 commençait la Semaine internationale des sports d’hiver ? Pendant onze jours, 258 athlètes de seize pays différents se sont alignés sur seize épreuves dans six disciplines. Ces premiers jeux de l’histoire, sous le patronage des instances olympiques, ne prendront officiellement l’appellation Jeux olympiques d’hiver que deux ans après. En cause, la réticence des pays nordiques qui possédaient déjà leurs propres jeux hivernaux. Le succès de cette semaine changera la donne.

Les éditions Glénat, en partenariat avec la ville de Chamonix, reviennent sur ces Jeux dans un bel ouvrage, richement illustré, intitulé Chamonix 1924, les premiers Jeux olympiques d’hiver. En voici quelques histoires.

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Kléber Balmat, coureur du combiné nordique et sauteur à ski français. (Photo : ©Archives municipales de Chamonix-Mont-Blanc / Fonds Gay-Couttet)

Qui a remporté la première médaille ?

Il ne voulait pas venir, mais l’Américain Charles Jewtraw a bien fait de s’aligner en patinage de vitesse. Champion national en 1921 et 1923, il est pourtant peu entraîné, d’où son refus de participer. Pas habitué à courir sur 500 m, il rafle néanmoins l’or à la surprise générale, devant les Scandinaves, archi-favoris. Il arrêtera sa carrière après les Jeux.

Charles Jewtraw en 1921. (Photo : Wikimedia Commons)

Qui a remporté la première médaille féminine ?

La patineuse autrichienne Herma Szabó-Planck, double championne du monde, remporte les séquences imposée et libre. Elle totalise en tout cinq titres de championne du monde de 1922 à 1926. La revue Le miroir des sports présentait cette épreuve comme « les gracieux concours de figures du meeting de Chamonix », où s’alignaient des « danseurs de théâtre sur la glace ». Tout en précisant que ces épreuves étaient en deçà du ski ou du hockey, « véritables compétitions sportives »…

Chamonix, 30 janvier 1924. Herma Szabo-Plank, patineuse autrichienne aux Jeux olympiques d’hiver. (Photo : Wikimedia Commons)

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Le maître de la glace

Glace et neige, deux indispensables des sports d’hiver. Benoît Couttet en fut le grand artisan. Il a construit et gère avec ses frères le refuge du Plan de l’Aiguille, tandis qu’à Chamonix, il est directeur de la patinoire. Son expérience en ce domaine est cruciale, car il sait quand gratter et arroser la glace. C’est un travailleur acharné et solide meneur d’hommes, lorsqu’il s’agit de déblayer la neige en pleine nuit.

Lorsque les patineurs se présentent aux épreuves, la glace est parfaite. Grâce à lui. « Il fallait le doigté et la technique de Benoît Couttet pour faire une glace aussi lisse et dure que celle des meilleures patinoires helvétiques ou scandinaves. » Signé Roger Frison-Roche, guide de haute montagne, journaliste, écrivain et explorateur. En 1929, Benoît Couttet deviendra président de la société des guides de Chamonix.

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Les jeux de Frison-Roche

L’auteur de Premier de cordée, Roger Frison-Roche, n’est alors qu’un inconnu œuvrant dans l’organisation de cette semaine sportive, embauché par le Syndicat d’initiative de la vallée. Il s’occupe de faire la liaison entre le Comité olympique français et la Ville. Chargé de l’accueil des touristes, un peu multi-cartes, il est un spectateur privilégié des préparatifs de ces jeux et leur bon déroulement, qu’il racontera avec passion bien des années plus tard.

Roger Frison-Roche en 1924. (Photo : ©fonds Roger Frison-Roche, archives municipales de Chamonix Mont-Blanc)

Les jeux terminés, l’aventure olympique se poursuivra pour Frison-Roche en 1936, lorsqu’il couvrira pour Le petit Dauphinois (l’ancêtre du Dauphiné libéré) les Jeux olympiques de Bavière en 1936, prélude à l’édition des Jeux d’été de Berlin, en plein nazisme.

Un record du monde

C’est en saut à ski que tombera un record, mais pas durant l’épreuve officielle. Le tremplin mesure 79,40 m et la note finale est un mélange entre la longueur du saut, et une note de style. « Injustice ! » crie la presse. Les juges installent alors un tremplin rallongé de 25 m pour les coureurs souhaitant participer à cette épreuve d’exhibition. Le Norvégien Jacob Tullin Thams atterrira 58,50 m plus loin, améliorant le précédent record du monde de 4,5 m. Tullin Thams sera l’un des rares athlètes à être titré aux JO d’hiver, mais aussi d’été, lorsqu’il obtiendra une médaille par équipe en voile, en 1936, à Berlin.

L’argent des Jeux

C’est le nerf de la guerre d’une olympiade. Ceux de Chamonix ont connu le dépassement de budget lié à la construction des infrastructures sportives, mais aussi à l’aménagement de la ville, passant de 800 000 francs de l’époque, à 3,5 millions. Un peu plus de 10 000 spectateurs achèteront leurs billets, pour une recette de 107 880 francs. Bien en deçà du chiffre espéré, douze fois supérieur à la réalité.

L’épreuve de bobsleigh, lors des Jeux d’hiver de 1924. (Photo : ©Collection Denis Cardoso)

Ces Jeux sont pourtant une réussite en terme d’image pour la ville qui souhaitait développer la saison touristique hivernale. L’offre hôtelière sera décuplée, et la réputation de la ville montera en flèche. Cela n’a pas de prix.

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