Climat : La France marque un tournant avec une baisse inédite de ses émissions de CO2

C’est une baisse inédite des émissions de gaz à effet de serre, plus importante encore que celle constatée en 2020, année historique en raison du Covid et d’un hiver doux. En 2023, selon des estimations encore provisoires, les émissions de GES de la France ont diminué de 4,8% par rapport à 2022 pour atteindre 384,5 millions de tonnes de CO2 équivalent (Mt CO2e) – hors émissions importées et émissions liées à l’agriculture et aux déchets – contre 392 Mt CO2e en 2020 ou 547 Mt CO2e en 1990.

Autre nouveauté : en 2023, pour la première fois, tous les secteurs (à l’exception du transport aérien) présentent des émissions à la baisse. Le logement atteint ainsi son niveau d’émissions le plus bas depuis 1990, grâce à la poursuite des comportements de sobriété dans un contexte d’inflation et de hausse des prix de l’énergie, mais aussi grâce à la rénovation thermique des bâtiments et à l’installation de pompes à chaleur.

Les émissions du transport routier enregistrent une réduction de -3% (niveau le plus bas observé depuis 2009, en dehors de l’effet Covid-19). En cause : des hausses de prix ponctuelles, la poursuite du renouvellement du parc de véhicules, et là encore des évolutions de comportements (la sobriété, le report modal de la voiture vers des modes de transports moins émetteurs comme le vélo ou les transports en commun, le covoiturage notamment), liste le Citepa, l’organisme mandaté pour réaliser l’inventaire des émissions nationales.

Budget carbone respecté

Outre ces deux secteurs, généralement considérés comme les mauvais élèves, l’énergie connaît aussi une baisse des émissions, qui est due à “un retour à la normale” avec la remise en service de centrales nucléaires (+41,5 térawattheures, TWh) et dans une moindre mesure, aux productions hydraulique (+9,2 TWh), éolienne et solaire (+ 15,2 TWh pour ces deux filières cumulées). Dans l’industrie, les émissions ont diminué de 8% en 2023, ce qui s’explique principalement par des baisses de production, d’une réduction de la consommation de gaz naturel notamment en raison des contraintes d’approvisionnement mais aussi d’une décarbonation du secteur.

Il est probable que ces mesures, jointes aux efforts de décarbonation des processus industriels aient joué un rôle dans cette baisse”

Les objectifs de la France, inscrits dans la SNBC2 (stratégie nationale bas-carbone) qui courent de 2019 à 2023, sont ainsi respectés, note le Citepa qui publiera son rapport final en juin avec une analyse plus approfondie pour déterminer la part des mesures de sobriété et des politiques et mesures gouvernementales incitant à l’électrification du parc, la rénovation énergétique des bâtiments, dans les réductions émissions de GES. Mais “il est probable que ces mesures, jointes aux efforts de décarbonation des processus industriels aient joué un rôle dans cette baisse”, précise l’organisme.

“On fait une année qui est historiquement bonne mais ce rythme on doit être capable de le tenir”, s’est réjoui Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires sur le plateau de TF1. Effectivement, tout l’enjeu est de poursuivre sur cette lancée en 2024 alors que depuis le début de l’année, des reculs ont été constatés sur la rénovation énergétique, le fonds vert pour aider les collectivités à mener la transition ou encore la mise en œuvre des Zones à faible émission (ZFE) qui interdisent les voitures les plus polluants sur un périmètre restreint. En outre, la France va devoir traduire les nouveaux objectifs européens – qui visent une diminution de 55% à 2030 contre 40% – dans une SNBC3 qui aurait dû être publiée à l’été 2023…et pour laquelle le gouvernement vient d’annoncer une énième consultation.

Découplage entre croissance et émissions

Cette baisse est d’autant plus notable que la croissance en France a augmenté de 0,9% en 2023. De quoi évoquer un possible début de découplage, à savoir une dynamique inverse entre d’une part baisse des émissions et de l’autre croissance économique. Un découplage qui perce également au niveau européen et mondial. Ainsi les émissions européennes ont baissé de près de 9% en 2023 alors que le PIB a augmenté de 0,7%. Même tendance aux Etats-Unis avec une baisse des émissions de 4,1 et une croissance de +2,5%.

En outre, si les émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie ont continué de croître en 2023 (+1,1%), l’AIE (Agence internationale de l’énergie) met en avant le caractère conjoncturel de cette hausse. Celle-ci est liée à une météo particulièrement douce mais surtout aux importantes sécheresses qui ont frappé l’Inde et la Chine, limitant leur production hydroélectrique. “Sans cela, les émissions mondiales de CO2 liées à la production d’électricité auraient diminué l’année dernière”, estime l’AIE.

L’Agence note aussi que sans les technologies énergétiques propres (éolien solaire, nucléaire, pompes à chaleurs, voitures électriques), l’augmentation mondiale des émissions de CO2 au cours des cinq dernières années aurait été trois fois plus importante. “Grâce au déploiement croissant des énergies propres, les émissions connaissent un ralentissement structurel“, conclut l’AIE.

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