Comment Atout France utilise-t-elle le numérique pour promouvoir la France ?

A la veille des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, la France fait l’objet de toutes les attentions. Quels outils numériques Atout France, l’Agence de développement touristique de la France, a-t-elle mis en place afin de faire rayonner le pays à l’étranger et aider les voyageurs à organiser leur séjour ? Entretien avec Sophie Mandrillon, Directrice Marketing et Partenariats chez Atout France et Eve Le Gall, Directrice adjointe Marketing et Partenariats chez Atout France.

Quelle place prend aujourd’hui le numérique dans les actions d’Atout France ?

Sophie Mandrillon : Atout France a opéré une transformation en mettant le numérique au centre de son action marketing. Il est présent dans tous les leviers d’action, auprès du grand public et de l’ensemble des distributeurs à l’international. Nous avons mené une étude avec Harris Interactive afin de mieux comprendre le parcours client par le prisme du digital, que ce soit dans l’inspiration, la réservation et les leviers de partage post séjour. Nous avons appris que les leviers d’inspiration principaux sont les sites de distribution, les comparateurs et les sites de réservation. Les sites officiels de destination, eux, arrivent loin derrière. C’est pourquoi nous avons effectué une refonte de France.fr en intégrant de l’intelligence artificielle. Nous menons également des stratégies d’influence avec Netflix et le CNC. L’enjeu est aussi de mobiliser et de fédérer les voyageurs autour de grands évènements, comme nous l’avons fait avec la Coupe du monde de rugby. Nous avons adressé des messages personnalisés aux porteurs de billet dans une logique d’hyperpersonnalisation.

Comment s’est passée la refonte du site France.fr ?

Eve Le Gall : Nous avons réalisé la refonte de France.fr pour qu’il soit opérationnel pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris. C’est un site grand public sous la marque Explore France qui est « mobile first ». Pour cette refonte, nous avons réalisé des interviews sur plusieurs marchés porteurs de la destination pour comprendre les attentes et besoins des utilisateurs. Le site donne des informations utiles aux voyageurs internationaux avant et pendant les Jeux, sous forme d’itinéraires et d’idées de séjour. Nous avons intégré l’intelligence artificielle avec le chatbot MarIAnne, créé avec la startup Genial, qui est un compagnon de voyage. Il vient répondre aux questions des voyageurs et apporte fluidité et simplicité. L’utilisateur renseigne son profil, ses intérêts, son budget et obtient un itinéraire personnalisé.

Quels dispositifs vont être mis en place pour les JOP 2024 ?

Sophie Mandrillon : Nous allons communiquer auprès des porteurs de billets afin de les aider dans la préparation de leur séjour. Nous allons également relayer la carte officielle des Jeux. MarIAnne pourra répondre aux questions des visiteurs sur place et renverra notamment sur les dispositifs de l’office de tourisme de Paris. Nous allons capitaliser sur les Jeux et inciter les visiteurs à prolonger leur séjour en marge des épreuves.

Eve Le Gall : Nous allons effectuer un travail de relai important sur les réseaux sociaux avec beaucoup de contenus vidéo. Des interviews, des stories, surferont sur les JOP pour faire découvrir des destinations.

Dans un contexte de forte affluence dans certains sites touristiques, encouragez-vous les destinations à adopter le « démarketing » ?

Sophie Mandrillon : Avec l’ensemble des régions, nous avons établi des listes de lieux pour lesquels nous déconseillons de communiquer durant la période estivale et des ponts de mai. Par exemple, Etretat ne fait plus l’objet de campagne de communication, sauf cas rare. Nous allons réfléchir à des alternatives potentielles en mixant lieux incontournables et d’autres moins connus. On peut par exemple inciter les visiteurs à se rendre au Mont Saint Michel en octobre. Dans la construction de notre partenariat avec Netflix, nous avons justement essayé de ne pas mettre en avant des sites touristiques déjà très fréquentés. Nous ne parlons pas de démarketing à proprement parlé. Notre vision est plutôt d’adresser le bon message au bon moment. L’enjeu est de sensibiliser les voyageurs et de les encourager à mieux préparer leur séjour. Je dirais que nous utilisons plutôt le nudge marketing afin d’inciter les voyageurs à réserver au moment le plus opportun.

Sophie Mandrillon : Nous proposons des « dupes destinations » depuis des années. Ce sont des offres hors des sentiers battus qui ne manquent pas en France. Mais cela doit se faire en bonne coordination entre les différents territoires pour ne pas engorger les destinations qui n’ont pas la capacité de gérer un trop grand flux de touristes. Sur nos actions d’influence, nous incitons à ne pas localiser la destination sur les réseaux sociaux. Je pense que nous avons un potentiel touristique qui peut permettre une bonne répartition sur l’ensemble du territoire français. Les clients internationaux ne viennent pas tous à la même période. A nous de cibler les profils afin de mettre en avant les sites iconiques comme les pépites moins connues.

Les destinations sont-elles les seules à jouer un rôle dans ce lissage des flux ?

Sophie Mandrillon: Non, c’est pourquoi nous travaillons avec plusieurs OTA, des distributeurs et des transporteurs, autour de la désaisonnalisation. Des acteurs tels que Expedia, eDreams, TripAdvisor, Voyage Privé ou encore SNCF Connect. Nous allons mettre en place une stratégie de conversion en plus des leviers d’inspiration dans les trois années à venir. L’objectif est de générer des ventes en lien avec ces partenaires, au sein de leur écosystème. Les destinations plus en retard sur leur commercialisation en ligne pourront en profiter et cela permettra de faire la promotion des périodes creuses.

Sophie Mandrillon : Avec plus de 70 lieux de tournages en France, ce partenariat avec Netflix permet de capter une audience plus jeune, désireuse de se rendre sur les lieux de leurs films et sériés préférés. Ce partenariat s’inscrit dans notre stratégie d’influence et permet de renouveler notre manière de communiquer. Nous n’avons pas encore de vision consolidée de l’impact que ces guides ont sur les territoires, mais ceux-ci peuvent voir une hausse de fréquentation. Ils montrent beaucoup d’intérêt pour ce genre de dispositif et des offres thématisées voient le jour.

La série Emily in Paris a souvent été critiquée car elle montre une expérience parfaite, lissée, que les touristes ne connaîtront jamais. N’y a-t-il pas un risque de créer de la déception ?

Sophie Mandrillon : Il y a toujours une part fantasmée dans les représentations. En effet, la réalité d’Emily in Paris n’est pas toujours celle des Parisiens et des touristes. Mais il est possible de jouer sur la vision d’un auteur, sur le divertissement, pour donner envie de se rendre dans un lieu véritable. C’est le rôle des guides que nous avons créés. Les œuvres cinématographiques sont des éléments de soft power d’une destination non négligeables.

Photo d’ouverture : Thibault Mokuenko

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