Comment nos vêtements finissent sur des plages au Ghana

Kantamanto Market, à Accra, la capitale du Ghana, est le deuxième plus grand marché d’habillement de seconde main au monde. 10 000 commerçants y vendent chaque jour plusieurs kilos de vêtements déjà utilisés. Zara, H&M, Nike… Tous les grands noms du prêt-à-porter européens et américains se retrouvent sur les échoppes des revendeurs ghanéens.  

Ces vêtements proviennent tous de l’industrie de la fast fashion, qui produit en grande quantité du textile de piètre qualité. Comme le rappelle sur son compte Instagram l’ONG The Or Foundation, fondée par la styliste américaine Liz Ricketts et basée à Accra, ces vêtements sont « dangereux » pour les consommateurs et les travailleurs du textile à cause des matières dans lesquelles ils sont fabriqués.

Du textile français 

Ceux-ci proviennent essentiellement de pays d’Europe de l’Ouest et d’Amérique du Nord, mais aussi de Chine et de Corée du Sud. Ils ont été achetés neufs dans de grandes enseignes de fast fashion et ne sont portés que quelques années avant d’être jetés ou donnés

Dans une interview pour le média américain Denier, Liz Ricketts explique que parmi les dons faits aux « charity shops » aux États-Unis, seulement 10 à 20 % étaient vendus dans le pays. « 10 à 20 % supplémentaires peuvent être recyclés en chiffons ou en isolants. La troisième composante est l’expédition des vêtements à l’étranger, qui constitue la majorité et peut représenter entre 40 et 80 %. »

En France, le journaliste Hugo Clément est parvenu à une conclusion similaire en remontant la filière des bennes de collecte. Seule une partie des vêtements est directement donnée. La majorité d’entre eux est vendue à des grossistes, qui les écoulent ensuite à des prix bien plus élevés à l’étranger, et notamment au Ghana. 

Un coût environnemental et social 

La revente de ces vêtements a toutefois des conséquences délétères. D’abord parce que les prix cassés de la seconde main ont complètement asphyxié l’industrie textile locale, rendant le Ghana dépendant de ces arrivages. 

Ensuite parce que ses conséquences sur l’environnement sont particulièrement néfastes. En effet, la très mauvaise qualité des vêtements importés en rend la commercialisation difficile et environ 40 % de la marchandise reste invendue. Celle-ci est ensuite abandonnée sur le marché ou jetée dans la nature, se retrouvant ainsi sur les plages ghanéennes et in fine dans l’océan Atlantique.

La faune et la flore locales sont les premières à pâtir de cette pollution, mais elles ne sont pas les seules. Les habitants des environs en sont aussi victimes. Les écosystèmes étant fragilisés, ils ont de plus en plus de peine à vivre de la pêche, qui fait pourtant partie des activités les plus répandues sur la côte. Elle produit également une part non négligeable de la nourriture locale. 

Cette consommation des produits de la mer mène les locaux à ingérer d’importantes quantités de plastique, produits par la dégradation des vêtements, dont les mailles contiennent du plastique. 

Enfin, cette économie étant informelle, elle n’apporte à ses travailleurs aucune protection sociale ou droit du travail. Ainsi, les balles de vêtements achetées à l’arrivée des bateaux coutent jusqu’à 1 800 euros la tonne aux marchands, qui n’arrivent pas toujours à les rentabiliser, une fois de plus, à cause de la mauvaise qualité des vêtements. Au moment de l’achat, les revendeurs n’ont même pas l’occasion d’ouvrir les lots afin de vérifier l’état de la marchandise et doivent se contenter d’un achat à l’aveugle.

Le 2 janvier dernier, un incendie a ravagé plus de la moitié du marché. Aucune victime n’est à déclarer mais des milliers de personnes ont perdu leur principale source de revenu, sans qu’une aide gouvernementale ne leur soit apportée.


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