Côte d’Ivoire : Inégibilité de Gbagbo, Dano Djédjé « refuser cette inscription, c’est ouvrir la boîte de Pandore de l’arbitraire »

© Koaci.com – samedi 15 mars 2025 – 11:09

Dano Djédjé au siège du PPA-CI (Ph KOACI)

La possible inscription de Laurent Gbagbo sur les listes électorales ivoiriennes alimente une polémique aux ramifications à la fois juridiques et politiques. 

Lors d’un passage médiatisé sur une chaîne de télévision privée, Sébastien Dano Djédjé, président exécutif du PPA-CI, a vigoureusement défendu le droit de l’ancien chef d’État à participer aux prochains scrutins, tout en démontant les arguments de ses détracteurs.

 Son plaidoyer, centré sur le respect des procédures légales et les contradictions des institutions, met en lumière un dossier épineux qui continue de diviser le pays.  

« La loi électorale est claire : tout citoyen a le droit de figurer sur la liste provisoire. Les contestations interviennent après sa publication, pas avant », a rappelé Djédjé, fustigeant ceux qui souhaitent exclure Gbagbo en amont.

 Il a qualifié d’« illogique » la référence à une condamnation nationale de 20 ans pour « braquage de la BCEAO » en 2018, alors que la Cour pénale internationale (CPI), saisie par Abidjan pour juger les crimes liés à la crise post-2011, a définitivement acquitté Gbagbo en 2021.

 « Comment la même action peut-elle être un crime ici et innocente là-bas ? », a-t-il lancé, soulignant une dualité de traitement qui, selon lui, relève davantage de la manœuvre politique que du droit.  

Le dirigeant du PPA-CI a par ailleurs dénoncé un « simulacre de procès » en Côte d’Ivoire. Jugé par contumace pour des faits connexes à la crise post-électorale, Gbagbo se trouvait pourtant sous les verrous de la CPI à l’époque – un paradoxe souligné avec ironie : « La contumace exige que l’accusé soit introuvable. Or, le gouvernement savait très bien qu’il était à La Haye, puisque c’est le président Ouattara qui l’y a expédié dans son propre avion ! » 

L’ex ministre de la reconciliation a aussi pointé une violation de la Constitution ivoirienne, qui réserve le jugement des anciens présidents à la Haute Cour de Justice, une instance spéciale non saisie dans cette affaire. « Ce procès en tribunal ordinaire est une mascarade. On piétine la loi pour exclure un adversaire », a-t-il asséné.  

Ce discours résonne comme un défi lancé au pouvoir en place, accusé d’instrumentaliser la justice pour écarter une figure historique de l’opposition. 

Le retour de Gbagbo en 2021, après son acquittement par la CPI, n’a pas apaisé les tensions. Ses partisans estiment que sa condamnation locale, entachée d’irrégularités procédurales, ne saurait primer sur un verdict international. À l’inverse, ses opposants invoquent la souveraineté de la justice ivoirienne, arguant que les crimes économiques – comme le « braquage » présumé de la banque centrale – relèvent du droit national.  

Dans ce bras de fer, la question dépasse le cas personnel de Gbagbo : elle interroge l’indépendance des institutions, la cohérence entre engagements internationaux et lois locales, et l’équité d’un processus électoral crucial pour la stabilité du pays. Par respect de la justice ivoirienne et de sa Constitution, Gbagbo est inéligible. Ce débat avait déja stérilisé sa formation poltique en 2020.

 Pour Djédjé, « refuser cette inscription, c’est ouvrir la boîte de Pandore de l’arbitraire ». 

Alors que la Côte d’Ivoire tente de consolider sa réconciliation, ce débat rappelle que les blessures du passé restent à vif, et que l’ombre de 2011 plane toujours sur l’avenir démocratique du pays.

Jean Chresus, Abidjan 

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