Menacé par un embargo américain en 2019, le cacao de Côte d’Ivoire semble désormais à l’abri d’un boycott international grâce aux intenses activités de lobbying de la Première dame de Côte d’Ivoire, Dominique Ouattara.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
Cette année-là, deux sénateurs américains s’appuyant sur une étude du « National Opinion Research centre » (NORC) de l’Université de Chicago conjure le département de la sécurité des Etats-Unis d’enquêter sur le phénomène des enfants esclaves et, le cas échéant, de décréter un embargo sur le cacao ivoirien en raison de la persistance du travail des enfants. Selon l’étude 45 % des enfants vivant dans les zones de culture du cacao dont 38 % en Côte d’Ivoire et 55 % au Ghana sont exploités comme des esclaves par les cacaoculteurs, tandis que la majorité d’entre eux (95 %) sont affectés à des tâches dangereuses. La pression des parlementaires américains est si forte que le 4 octobre 2019, une équipe des douanes américaines se rend en Côte d’Ivoire pour enquêter sur le phénomène en attendant qu’une mission ayant le même objet intervienne avant la fin de cette année-là.
Pour les autorités ivoiriennes, cette poussée des américains sur la principale source de revenus du pays ruine avant tout les efforts consentis par le gouvernement pour mettre fin à la mauvaise réputation dont pâtissait le cacao ivoirien. Car dès 2011, un comité national de surveillance des actions de lutte contre le travail des enfants (CNS) avait été créé et confié à la Première dame, Dominique Ouattara. Ce comité visait à promouvoir un plan d’action comprenant trois Plans d’Actions Nationaux (PAN), notamment la mise en place d’un arsenal juridique spécifique, la création d’unités de police spécialisées, la construction d’écoles, ainsi que la création d’un centre d’accueil pour les enfants en détresse à Soubré.
Un lobbying acharné
Lorsque Dominique Ouattara rencontre, le 17 septembre 2019, Ron Wyden et Sherrod Brown au Senate Building à Washington DC, elle leur explique le détail des actions entreprises sous sa direction, ainsi que les résultats auxquels le comité est parvenu, notamment l’emprisonnement de 220 trafiquants qui ont été condamnés à des peines allant de 15 à 20 ans. Au terme de la rencontre, elle ne cache pas sa fierté. « Tous nos efforts, dit-elle, ont été reconnus par le Gouvernement Américain, qui, à travers le Département d’Etat, nous a félicités à plusieurs reprises pour toutes ces actions et a classé la Côte d’Ivoire parmi les Pays qui font des efforts significatifs pour éliminer le travail des enfants. Cela, de façon consécutive depuis 2012 », assura Dominique Ouattara.
Selon elle, les sénateurs Ron Wyden et Sherrod Brown l’ont également félicité pour son engagement personnel et ont tenu à relever que leur action ne visait pas à nuire à la Côte d’Ivoire, mais qu’ils attendent plutôt plus d’actions concrètes de la part de l’industrie du cacao et du chocolat dans la chaîne de remédiation du phénomène. Cinq ans plus tard, les chocolatiers ont-ils rempli leur part de contrat ? Difficile de se prononcer puisque le procès des multinationales Mars, Nestlé ou encore Mondelez mises en cause par huit ex-travailleurs illégaux pour « complicité de travail forcé » dans des plantations ivoiriennes de cacao n’a toujours pas livré son secret.
Il n’empêche que la Côte d’Ivoire est devenue depuis le seul pays africain à faire partie des quatre Etats qui ont reçu la plus haute évaluation du département du Travail des Etats-Unis d’Amérique.
Ce classement du Rapport de l’USDOL comme l’étude Norc d’ailleurs, vient graver dans le marbre les efforts inlassables mis en route depuis 2011 par le gouvernement ivoirien, ainsi que le leadership de Dominique Ouattara qui aura réussi jusqu’ici à éloigner la menace qui a longtemps pesé sur le cacao ivoirien. Définitivement ? Seul l’avenir nous le dira.
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