Côte d’Ivoire : Vers une crise pré-électorale et un gouvernement de transition ?

Pascal Affi N’guessan, Laurent Gbagbo, Tidjane Thiam, Alassane Ouattara


À moins de six mois de l’élection présidentielle d’octobre 2025, la Côte d’Ivoire se retrouve plongée dans une dynamique politique complexe, marquée par des tensions croissantes entre le pouvoir en place et une opposition résolue à contrer les manœuvres perçues comme autoritaires du gouvernement. Le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) et la coalition Cap-Côte d’Ivoire ont clairement annoncé leur volonté de mettre en place un gouvernement de transition à la fin du mandat d’Alassane Ouattara, pour organiser une élection présidentielle inclusive, loin des exclusions et manipulations. Côte d’Ivoire : Vers une crise pré-électorale et un gouvernement de transition ? 

Le climat politique en Côte d’Ivoire est de plus en plus marqué par les divisions entre l’opposition et le gouvernement, alors que l’élection présidentielle se profile. Le retrait de noms emblématiques de l’opposition de la liste électorale provisoire, tels que ceux de Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé et Guillaume Soro, a alimenté la colère des partis politiques de l’opposition. Ces leaders, bien que réhabilités par la justice, se voient injustement écartés du processus électoral, un geste que l’opposition interprète comme une tentative de monopoliser le scrutin à venir. 

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Dans un contexte de méfiance grandissante envers les institutions, notamment la Commission Électorale Indépendante (CEI), accusée de partialité, l’opposition a choisi de se retirer de cette instance cruciale, aggravant ainsi la crise de confiance. Le PPA-CI, le PDCI-RDA et Cap-Côte d’Ivoire, par cette action concertée, montrent leur volonté de protester contre ce qu’ils perçoivent comme une manipulation du processus électoral, orchestrée par le pouvoir actuel. 

« Face au refus systématique du dialogue politique pour améliorer un système décrié par tous, exception faite du parti au pouvoir qui y trouve son compte, le PDCI-RDA demande dès cet instant à son représentant de suspendre sa participation aux travaux de la CEI centrale jusqu’à nouvel ordre », a martelé le porte-parole du PDCI-RDA, Brédoumy Soumaïla. 

Le cas de Tidjane Thiam : Un signe inquiétant ? 

Un autre rebondissement majeur a eu lieu le 10 avril 2025, avec la décision du ministère de la Justice de suspendre la délivrance du certificat de nationalité de Tidjane Thiam, un des leaders du PDCI-RDA. Bien que Thiam ait récemment renoncé à sa nationalité française pour se consacrer pleinement à sa nationalité ivoirienne, l’administration a jugé que sa nationalité était contestée devant le tribunal, suspendant ainsi sa possibilité de participer à la course électorale. Selon le document : « En l’espèce, il est constant que la nationalité ivoirienne de M. Tidjane Thiam est contestée devant le tribunal par une action tendant à faire constater la perte de sa nationalité. Il y a donc lieu, en l’état, de surseoir à la délivrance dudit acte jusqu’à ce que le tribunal saisi de la contestation vide sa saisine. » 

Cette décision, intervenue à un moment charnière, est perçue comme une tentative d’écarter définitivement un prétendant de poids de la scène politique ivoirienne. L’opposition y voit une démonstration supplémentaire de l’intention du gouvernement de verrouiller le processus électoral, privant ainsi les Ivoiriens de choix pluralistes. 

Une pression internationale grandissante 

Dans ce contexte tendu, l’opposition ivoirienne a entrepris des démarches diplomatiques pour accélérer le changement du cap politique du pays. Les Nations Unies, l’Union européenne et le National Democratic Institute ont été sollicités pour soutenir la cause de l’opposition et pousser le gouvernement d’Abidjan à accepter un réexamen du processus électoral. L’objectif est de garantir une élection transparente et inclusive, respectueuse des principes démocratiques. 

Cette pression extérieure pourrait se transformer en un levier décisif. L’opposition espère que l’opinion internationale, en particulier la France, prendra position en sa faveur, d’autant plus que la scène politique ivoirienne est en proie à des turbulences internes qui risquent d’embraser la situation si rien n’est fait. 

Le piège se referme sur le Président Ouattara ? 

Alors que le pouvoir ivoirien semble prendre des mesures pour restreindre l’influence de l’opposition, l’issue de cette bataille politique reste incertaine. L’opposition, unie dans sa résistance, œuvre pour l’instauration d’un gouvernement de transition en fin d’année 2025, afin de préparer un nouveau processus électoral, plus inclusif et plus juste. 

Face à ces pressions internes et internationales, le Président Alassane Ouattara semble pris dans un piège politique. Comment le pouvoir reagira-t-il à cette montée en puissance de l’opposition ? Le président ivoirien, qui n’a toujours pas annoncé sa candidature, devra manœuvrer habilement pour éviter un blocage politique total et répondre aux attentes d’un peuple de plus en plus exigeant en matière de démocratie. 

À l’approche de la fin de son mandat, la question se pose avec insistance : la Côte d’Ivoire connaîtra-t-elle une nouvelle crise politique, ou l’issue de cette bataille se traduira-t-elle par un processus électoral révisé, qui pourrait apaiser les tensions et garantir une élection véritablement démocratique ? 

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La situation en Côte d’Ivoire est loin d’être simple. La lutte pour une élection inclusive, libre et transparente se heurte aux stratégies du pouvoir en place, qui semble vouloir maintenir son emprise sur le processus électoral. Toutefois, l’opposition, unie et soutenue par une pression internationale croissante, pourrait bien réussir à imposer un gouvernement de transition, et contraindre le président Ouattara à revoir ses plans pour l’élection présidentielle d’octobre 2025. L’avenir politique du pays dépendra de l’évolution de cette crise et des décisions qui seront prises dans les mois à venir. 

Prince Beganssou 

A 7 mois de la présidentielle d’octobre 2025 : “L’impossible dialogue entre Ouattara et l’opposition” (Nord-Sud infos)

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