Une vidéo a circulé sur les réseaux sociaux le 2 avril 2025 montrant trois journalistes burkinabè en uniforme militaire. Guezouma Sanogo, Boukari Ouoba et Luc Pagbelguem avaient été soumis à une disparition forcée pendant 10 jours, et leur réapparition a suscité des inquiétudes quant à leur enrôlement potentiellement illégal par la junte militaire du pays.
Human Rights Watch n’a pas été en mesure de vérifier la vidéo, mais des collègues des journalistes, des organisations non gouvernementales et des médias ont déclaré avoir reconnu les trois hommes. Dans la vidéo, ils sont interviewés près de ce qui semble être une base militaire. « Ce que vous faites est merveilleux », dit Luc Pagbelguem dans la vidéo, faisant référence à une opération militaire apparemment réussie.
Le 24 mars, les autorités ont arrêté Guezouma Sanogo et Boukari Ouoba, respectivement le président et vice-président de l’Association des journalistes du Burkina (AJB), ainsi que Luc Pagbelguem, journaliste travaillant pour la chaîne de télévision privée BF1, pour avoir prétendument dénoncé les restrictions à la liberté d’expression imposées par la junte. Les demandes d’information des avocats et des familles des journalistes sont restées sans réponse.
« Au moins, ils sont encore en vie », a déclaré un journaliste burkinabè en exil. « Mais cela ne nous libère pas de la crainte qu’ils aient été torturés et qu’ils participent activement à des opérations de sécurité risquées. »
Ce n’est pas la première fois que des vidéos montrant des individus enrôlés illégalement surgissent au Burkina Faso. Le 18 février 2024, l’opposant politique Ablassé Ouédraogo et l’éminent activiste des droits humains Daouda Diallo, tous deux enlevés en décembre 2023, sont apparus sur des images vidéos, portant des uniformes de camouflage, tenant des fusils d’assaut de type kalachnikov et participant à des exercices militaires, vraisemblablement dans une zone de conflit. Ils ont été libérés depuis.
Human Rights Watch a documenté le fait que les autorités du Burkina Faso ont utilisé une loi d’urgence de vaste portée et un décret de « mobilisation générale » dans le cadre de leur stratégie de lutte contre les groupes armés islamistes pour enrôler dans l’armée des détracteurs de la junte, des journalistes, des activistes de la société civile et des magistrats et les a réduit au silence.
Si les gouvernements sont habilités à enrôler des civils adultes pour la défense nationale, la conscription ne devrait pas avoir lieu si elle n’a pas été autorisée et si elle n’est pas conforme au droit national. La conscription doit être effectuée de manière à ce que le conscrit potentiel soit informé de la durée du service militaire et qu’il ait la possibilité de contester l’obligation de servir à ce moment-là.
Les autorités burkinabè devraient libérer immédiatement les trois journalistes et cesser d’utiliser la conscription pour réprimer les médias et la dissidence.
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