Joseph Djogbénou. Photo : IAJP/CO
Courant semaine écoulée, le député Orden Alladatin, président de la commission des lois à l’Assemblée nationale du Bénin et l’ancien ministre Joseph Djogbénou, président du parti Union progressiste le Renouveau ont animé des conférences au sujet des lois électorales et de la gouvernance de la Rupture. Ces sorties visaient à éclairer l’opinion publique sur les modifications apportées et à répondre aux préoccupations concernant leur application. Mais, loin d’atteindre cet objectif, c’est une avalanche de réactions que les propos tenus ont induit.
« Les déterminants et enjeux du code électoral ». Voilà le thème autour duquel le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale a tenu une conférence la semaine dernière. Il s’agissait pour Orden Alladatin, ancien acteur de la Société civile de montrer à la face du monde que le code électoral en vigueur actuellement au Bénin, loin de toutes les critiques n’est pas une loi exclusive. Avec des images d’archives, le conférencier a expliqué que les réformes politiques mises en œuvre par le président Patrice Talon sont des réformes voulues et souhaitées par toute la classe politique depuis des années. Mais les réactions ne se sont pas fait attendre.
« Aucune rhétorique manipulatoire ne peut ôter aux faits historiques leurs réalités avec les malheurs de morts d’hommes, d’emprisonnement, d’exil et de vol de sièges électifs qu’ils ont engendrés », réagit Valentin Djènontin Agossou. « Oui les réformes électorales ont été évoquées par la quasi-totalité des responsables politiques y compris le président Boni Yayi, mais évitons tout amalgame. Aucun homme politique béninois hormis les prestidigitateurs actuellement au pouvoir n’a réclamé et voulu d’une réforme politique qui exclut l’opposition des élections par des dispositions législatives tordues ; une réforme politique qui génère des tueries, des emprisonnements, des exils, l’accaparement des fiches de parrainage, le refus de délivrance de quitus fiscal aux opposants et qui déclare caduques des fiches de dépouillement alors que l’examen du contentieux électoral se poursuit devant la Cour Constitutionnelle », renchérit l’ancien ministre de la justice de Boni Yayi actuellement en exil.
« Au total, aucune réforme politique ou électorale voulue et acceptée de tous ne peut s’opposer aux libertés individuelles en empêchant par exemple les meetings des partis politiques de l’opposition. Aucune réforme politique ne peut criminaliser les ambitions politiques personnelles au point d’envoyer des collaborateurs en prison », conclut Valentin Djènontin.
Joseph Djogbénou sur la gouvernance de la Rupture
Dans la même logique que son compagnon politique, le premier responsable du parti UPR a animé une conférence sur la gouvernance. Au cours de cette séance, Joseph Djogbénou a clarifié les concepts de « ruse et rage ». En effet, l’expression « ruse et rage », devenue célèbre peu après l’avènement de Patrice Talon au pouvoir, fait penser à Joseph Djogbénou. Selon son récit, tout est parti de la réforme constitutionnelle instituée en 2017 par Patrice Talon pour doter le Bénin d’institutions fortes. Mais malgré la « sincérité absolue » du projet, l’opposition a rejeté la reforme par trois voix à l’Assemblée nationale. « Cette révision de la constitution, nous l’avons soutenue à l’Assemblée nationale mais, trois voix l’ont empêchée. Trois voix que l’humain que je suis, a considéré comme des voix ayant condamné l’adoption du projet par la ruse, des voix ayant condamné l’adoption du projet par la rage », a expliqué l’ancien ministre de la Justice.
C’est parti de cet échec retentissant, un des premiers revers pour Patrice Talon, que Joseph Djogbénou a estimé que l’opposition a, par la ruse et la rage, bloqué cette importante réforme qui devrait reconfigurer la vie institutionnelle du Bénin. « Nous avons compris que nous n’avons pas été habile, que nous n’étions pas dans la politique politicienne », a-t-il fait savoir. Et pour éviter une autre surprise de cette envergure, le ministre de la Justice de l’époque s’est décidé : « Si c’est par la ruse et la rage, désormais on va procéder ainsi ». Mais au-delà, le leader de l’UP-R dit croire fermement que la politique se fait avec conviction et foi. Pour ceux qui lui attribuent quelques résultats que ce soit, nés de la ruse et de la rage, Joseph Djogbénou se défend : « ce n’est pas ma nature, ni mon caractère, ni mon éducation ».
Ici aussi la polémique a enflé juste après les propos de l’ancien président de la cour constitutionnelle. Pour certains, Joseph Djogbénou aurait dû se taire pour éviter un débat inutile selon eux. Pour d’autres, le contexte de son intervention est très mal situé et remet en cause la crédibilité des acteurs politiques notamment ceux qui entourent le président Patrice Talon. Déjà dans la salle, Jean Baptiste Elias, ancien président du Fonac, relevant des contradictions entre Joseph Djogbénou, acteur de la Société civile avant 2016 et Joseph Djogbénou acteur politique à partir de 2016, a remis en cause la véracité de certains propos tenus. Il n’a pas compris comment celui qui s’opposait au retrait du droit de grève aux magistrats en 2015 a fini par le faire lui-même étant ministre de la justice en 2017. Jean Baptiste Elias a par ailleurs déclaré qu’il restait beaucoup à faire sur le chantier de la lutte contre la corruption avant de déclarer que le Bénin n’a pas inventé la bonne gouvernance qui selon lui a des principes.
Et Candide Azannaï de commenter : « La ruse est une déloyauté, une tromperie. Gouverner c’est inclure et non exclure, au nom de la fraternité, de l’égalité et de la citoyenneté ». Par cette brève phrase, le président du parti Restaurer l’Espoir, a fustigé les propos de Joseph Djogbénou selon lesquels la politique exclut. Il a par ailleurs remis en cause la justification fournie par l’ancien ministre de la justice selon lesquelles, on peut poser certains actes dans une posture de revendication et d’autres dans une posture de décision.
Comme si cela ne suffisait pas, c’est cette fois-ci Bertin Koovi, bien que membre de la majorité présidentielle qui est venu à la charge. Pour lui, Joseph Djogbénou aurait dû se taire. Car justifier certaines choses en psychologie de la communication constitue une manière de s’accuser. Bertin Koovi expose dans une vidéo comment, selon lui, Joseph Djogbénou échouerait s’il était candidat à la présidentielle avant de déclarer que Houngbédji avait raison sur les propos tenus il y a quelques jours. Car selon Koovi, Adrien Houngbédji est victime de ruse et rage. (Rejoignez la famille des abonnés de la chaîne WhatsApp du journal La Nouvelle Tribune en cliquant sur le lien https://whatsapp.com/channel/0029VaCgIOFL2ATyQ6GSS91x)
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