Didier Drogba, une aura intacte en Côte d’Ivoire et dans son quartier natal

De notre envoyé spécial à Abidjan – Six ans après sa retraite sportive, Didier Drogba n’a pas été oublié par les Ivoiriens. Le capitaine emblématique des Éléphants reste un mythe aux yeux de tous. Une figure d’engagement, d’abnégation et de paix qui rayonne partout en Côte d’Ivoire, à commencer dans son quartier natal de Yopougon. Reportage.

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Il n’a jamais remporté de Coupe d’Afrique et pourtant, dans le cœur des Ivoiriens, Didier Drogba reste souvent cité comme leur plus grand footballeur. Six ans après sa retraite sportive et 10 ans après sa retraite internationale, son aura reste intacte dans le pays qui accueille la CAN 2024.

Dans la commune populaire de Yopougon où il est né, tous les jeunes footballeurs rêvent de lui ressembler. De l’attaquant au libéro qui s’entraînent sur l’un des terrains défoncés du lycée Mohamed VI, le nom de Didier Drogba est sur toutes les lèvres des jeunes du CF National Football club de Yopougon.

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« Je rêve d’être comme lui, même si je ne joue pas au même poste. C’est une icône », explique Fofana Ima Dossongui Régis, 16 ans. « C’est quelqu’un de courageux, il motive les jeunes de ce pays. Il répète souvent de croire en nous, de ne jamais baisser les bras. C’est une fierté de venir de Yopougon comme lui. Grâce à lui, tout le monde connaît la Côte d’Ivoire. »

« C’est une légende. Tous les Ivoiriens sont fiers de lui », ajoute Danon junior, 16 ans, ailier gauche, qui brûle d’envie de ressembler à son idole. « Sa détermination sur le terrain et sa manière de se battre pour son pays donnent envie de lui ressembler. On peut venir de nulle part et demain devenir un héros. »

« Beaucoup de jeunes viennent au football grâce à Didier Drogba. Et on leur dit qu’il faut toujours y croire. Didier Drogba n’a pas fait d’académies. Il a commencé tard le football [professionnel] à 17 ans dans des clubs modestes. Il a beaucoup travaillé et on essaie de transmettre ça aux enfants », raconte Sandwidi Boukary dit « coach Akim », l’entraîneur des jeunes du CF National Football club de Yopougon.

Le parcours de Didier Drogba participe beaucoup à son aura. Après des débuts en France où il a joué successivement au Mans, à Guingamp et à Marseille, il a ensuite rejoint Chelsea en 2004. Sous les couleurs des Blues, il a tout gagné et notamment la Ligue des champions en 2012. En sélection, il reste à ce jour le meilleur buteur de l’histoire de l’équipe nationale ivoirienne, dont il a été le capitaine et avec qui il est allé deux fois en finale de la Coupe d’Afrique.

D’Andokoi au sommet du football

Mais avant cette trajectoire stratosphérique, il y a des modestes origines. Jusqu’à ses cinq ans, Didier Drogba a vécu avec sa famille dans le quartier d’Andokoi. Dans cette modeste partie de Yopougon, il a découvert le football.

« Il avait des qualités déjà petit. Moi, je voulais qu’il me remplace. Et maintenant, il a fait mieux que moi. Quand tu aides un enfant à réussir, c’est une fierté », dit son oncle, Michel Goba. « C’est dans cette cour qu’il a tapé dans les premiers ballons. C’était immense pour un enfant. Je le revois se faire disputer parce qu’il a renversé la marmite ! »

Michel Goba dans la cour de l’ancienne maison familiale des Drogba. © Laura Mousset, France 24

 

Le petit frère du père de Didier Drogba plonge dans ses souvenirs en repassant dans l’ancienne maison familiale. Il revoit son neveu s’entraîner à la tête pendant des heures dans le couloir. Il décrit la bâtisse telle qu’elle était il y a 35 ans, avant que l’étage ne soit construit et la cour divisée en deux.

Michel Goba est l’homme qui a permis à Didier Drogba de réaliser ses rêves. Cet ancien footballeur de divers clubs de division 2 française a décidé de prendre son neveu sous son aile et de l’emmener en France à l’âge de 5 ans. L’homme de 61 ans ouvre la boîte à souvenirs en parcourant les rues défoncées d’Andokoi, surnommé parfois « Drogbakro », soit le « quartier Drogba ».

Bien qu’il ne vive plus dans le quartier depuis longtemps, l’ancien est vite reconnu de tous dans le quartier. Sa coupe à la Sadio Mané ne passe pas inaperçue. En boitant lentement, il prend le temps de saluer tous les voisins et voisines même si ceux qu’il a connu à l’époque ne sont plus là depuis longtemps. Et tous disent leur fierté de savoir que Didier Drogba est né ici.

 

Michel Goba au quartier Andokoi.
Michel Goba au quartier Andokoi. © Laura Mousset, France 24

 

 

« On ne peut pas venir dans le quartier sans parler de Drogba. C’est la légende ici ! », dit un jeune enfant, maillot orange ivoirien sur les épaules.

Drogba, militant de la paix

Car si la popularité de Drogba est aussi forte, c’est sans doute parce qu’il ne s’est pas contenté de ses performances sur le terrain. Il a utilisé son statut d’icône du football à de multiples reprises pour appeler à la paix civile dans son pays. En 2006, alors que les Éléphants viennent de se qualifier pour la première Coupe du monde de leur histoire, il lance un appel à la paix qui participera au processus de réconciliation dans son pays.

 

 


 

 

 

Il est aussi connu pour son engagement social et humanitaire. Il a notamment contribué à la construction d’un hôpital dans sa ville natale d’Abidjan qui devrait être mis en service prochainement et a lancé une fondation pour aider les enfants défavorisés en Afrique.

Toutefois, il revient rarement au quartier. Il faut dire que sa dernière apparition a causé des scènes de liesse incontrôlables. « Il ne peut plus revenir ici. S’il vient, il est prisonnier », rigole son oncle. « Une fois, il est venu ici pour montrer là où il a grandi. Toute la rue était bloquée ! Tous les lycéens étaient sortis pour bloquer sa voiture. Il ne pouvait plus sortir d’ici. Quatre heures, ça a duré. C’était incroyable ! »

En 2022, l’icône du football ivoirien a essayé de devenir président de la fédération locale. Une tentative qui s’est conclue par un échec mais beaucoup d’Ivoiriens espèrent le voir retenter sa chance. Son nom revient dans toutes les bouches, comme après l’humiliation face à la Guinée équatoriale.

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