du départ de Mobutu au désordre – Guinéenews©

La page Mobutu fut complètement tournée un matin du 15 mai 1997. Lui et ses proches prirent le chemin de l’exil. Les Occidentaux eurent ainsi les coudées franches pour imposer leur vision au Zaïre, devenu entre-temps la République Démocratique du Congo (RDC), et lui dicter sa ligne de conduite.

Ce jour-là, l’entrée des forces de l’AFDL, menées par le feu président Laurent-Désiré Kabila, à Kinshasa, fut saluée avec enthousiasme par la population congolaise. Mobilisée autour de l’UDPS, elle avait facilité la tâche au mouvement de « libération » dans son combat contre la dictature de Mobutu. Mais l’euphorie fut de courte durée. Très vite, la population déchanta en faisant face aux exactions et aux meurtres perpétrés chaque nuit à Kinshasa par les troupes rwandaises. Vols, viols, extorsions, occupations illégales de maisons… Le malaise et la peur s’installèrent. Face à cette situation, Étienne Tshisekedi exigea et demanda au président Laurent-Désiré Kabila le retour immédiat des Rwandais et des Ougandais dans leurs pays respectifs.

Mais les Rwandais avaient un tout autre agenda. Selon eux, les accords de Lemera leur garantissaient une installation durable et l’exploitation des richesses congolaises sur les portions territoriales qui leur avaient été accordées. C’était, d’après eux, le prix à payer pour avoir aidé Mzee Laurent-Désiré Kabila à accéder au pouvoir.

Paul Kagame ne manque pas une occasion de le rappeler. Ils réussirent à convaincre le monde entier que les Congolais manquaient de responsabilité et de patriotisme, qu’ils étaient incapables de gérer un aussi vaste territoire. Selon eux, il était nécessaire de revoir les frontières issues de la Conférence de Berlin de 1885.

Les Rwandais et les Ougandais prétendaient être mieux disposés intellectuellement à administrer la RDC. Ils affirmaient que les Congolais manquaient de loyauté républicaine. « Voyez comment les officiers généraux, façonnés par Mobutu, l’ont tous trahi : ce sont des bons à rien ! » Aujourd’hui encore, ils tiennent le même discours, soulignant comment les Congolais ont conspiré contre leur propre président, Laurent-Désiré Kabila. « Ce sont des irresponsables ! Tout ce qu’ils savent faire, c’est danser, écouter de la musique et courir après les belles femmes. Bref, s’occuper des futilités. » Ce discours rwandais s’est solidement ancré dans les esprits des dirigeants occidentaux, facilitant ainsi la mise sous tutelle de la RDC et l’imposition de médiateurs étrangers à ses dirigeants considérés comme immatures politiquement.

Ainsi, aujourd’hui, une partie de la population est soumise à l’esclavage dans des territoires occupés, tandis que celle sous contrôle gouvernemental est abandonnée à elle-même. L’administration est détruite, les archives ont été volées ou brûlées.

Sur le plan diplomatique, l’inefficacité est criante, en grande partie à cause du manque d’expérience de ses acteurs. Les dirigeants de la RDC ont-ils une vision hypertrophiée de la politique internationale ? Manquent-ils de responsabilité et d’anticipation ? Les dossiers sont-ils mal préparés ? La complaisance vis-à-vis des agresseurs n’est-elle pas trop évidente ?

Le défunt président Kabila souhaitait bâtir une nouvelle armée, mais il manquait de moyens. Sitôt après sa mort, les troupes qu’il avait recrutées furent désarmées sous prétexte du respect des accords de Lusaka. Pendant ce temps, les Rwandais et les Ougandais continuaient de renforcer leurs positions sur le territoire congolais. Un véritable paradoxe !

Aujourd’hui, la RDC ne dispose pas d’une armée capable d’expulser les forces rwandaises et ougandaises. Ces dernières ont hérité d’une grande partie de la logistique militaire que les Américains avaient déployée en Somalie et reçoivent des armes en provenance d’Afrique du Sud via les ports de Mombasa, au Kenya, et de Dar-es-Salam, en Tanzanie. Les pays voisins jouent donc un rôle actif dans cette destruction.

Un pays ravagé par des années de guerre ne peut espérer autre chose que la misère. Le M23 continue ses exactions : destructions, pillages, viols. Dans les zones sous contrôle du gouvernement, la population lutte pour sa survie. En bref, le peuple congolais vit un désastre total.

Avons-nous conscience que ce pays se désagrège sous nos yeux ? Si oui, que devons-nous faire ? Les causes de cette guerre sont multiples : la position géostratégique et géologique du pays, mais aussi et surtout l’immaturité et l’irresponsabilité de ses politiciens.

Mobutu aurait-il dû laisser un testament politique à ses compatriotes ? Un testament qui les aurait éclairés sur les rapports qu’il entretenait avec les puissances occidentales ?


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