En Côte d’Ivoire, le malaise social prend de l’ampleur

Les factures d’électricité ont désormais un goût amer pour les Ivoiriens qui se plaignent également des coupures intempestives du courant électrique. Après l’euphorie nationale provoquée par une campagne victorieuse à la Coupe d’Afrique des Nations, c’est un brutal retour sur terre.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

A Abidjan, le FPI s’indigne publiquement des nouveaux coûts de l’électricité qui « augmentent la paupérisation de la population », s’est plaint le parti dans une tribune publiée, le mardi 7 mai 2023, par son secrétaire général, Issiaka Sangaré. A sa décharge, le gouvernement avait pris soin d’annoncer une revalorisation du coût de l’électricité de 10% avant le début de la Coupe d’Afrique des Nations. Mais, à l’arrivée, la facture est bien trop salée pour l’ensemble de la population, d’autant que rien n’a par ailleurs été fait pour contrôler le prix des produits de grande consommation tels que le riz, l’huile, le sucre, la viande, ainsi que les transports dont les coûts ont été rapidement réajustés.

Le 4 janvier dernier, le président Ouattara avait déjà tenté de faire passer la pilule en expliquant que l’augmentation des coûts de l’électricité était nécessaire pour sauver l’outil électrique. « Je comprends les préoccupations de nos concitoyens. Cependant, je voudrais indiquer que l’augmentation du prix de l’électricité était malheureusement une nécessité pour notre outil électrique », avait-il plaidé. Quatre mois plus tard, son chef du gouvernement, Robert Beugré Mambé se plaignait, lui, des nombreuses plaintes des centrales syndicales ivoiriennes qui déploraient, à l’occasion du 1er mai, la cherté de la vie qui réduit le pouvoir d’achat des travailleurs à une portion congrue.

De nouvelles augmentations à l’horizon

Les Ivoiriens ne sont pourtant pas au bout de leur peine, puisque cet ajustement tarifaire n’aurait concerné que 11% des abonnés, soit environ 400.000 personnes, selon les chiffres du gouvernement. Conséquence, de nouveaux ajustements doivent intervenir dans les mois à venir pour sortir le secteur électrique d’une dégradation continue de la qualité du service et d’une menace sur la sécurité d’alimentation en électricité sur l’ensemble du pays, plaide encore le gouvernement.

Pressés par cette conjoncture devenue invivable, les Ivoiriens interpellent de plus en plus ouvertement le Président Ouattara via les plateformes sociales où ils peuvent s’exprimer. Surtout qu’au demeurant, ils sont aussi confrontés à une situation de quasi délestage qui occasionne des coupures d’électricité quotidiennes. Aucune ville n’est d’ailleurs épargnée et les industriels pâtissent déjà de cette situation qui met en danger la productivité de leurs entreprises. En 2021, les industries et les entreprises de manière générale avaient largement souffert des mesures de rationnement électrique, surtout qu’aucune contrepartie fiscale avait été obtenue par les industriels qui demandaient une défiscalisation des groupes électrogènes.

Tous ces malheurs surviennent alors que des déguerpissements musclés organisés à Abidjan continuent de pousser des milliers de pauvres dans la rue. De nombreuses familles se sont en effet retrouvées sans toit à la suite de ces opérations qui se poursuivent. Même des personnes disposant de documents nécessaires prouvant leurs droits sur leurs biens se voient littéralement détrousser par ces déguerpissements qu’aucune décision judiciaire n’a jusque-là osé attaquer.

Les Ivoiriens crient misère

Le gouvernement avait pourtant promis des indemnisations aux déguerpis. Mais aucune de ces promesses ne s’est encore concrétisée. Or, pendant que les populations crient leurs malheurs, le président Ouattara multiplie les nominations de ses proches pour les mettre à l’abri du besoin. Une dernière série de décrets promouvant d’anciens ministres ou responsables d’institution qui avaient perdu leurs postes a en effet fini par convaincre les plus sceptiques que le pouvoir a choisi de protéger les siens et de laisser les populations trinquer. Le FPI accuse d’ailleurs le gouvernement de n’avoir pas accepté de réduire le train de vie de l’Etat et de rompre le monopole de la Compagnie Ivoirienne d’Electricité (CIE). Selon lui, ces deux mesures auraient pu donner un meilleur signal aux populations au lieu de leur montrer qu’elles sont les seules à supporter les conséquences désastreuses de cette gestion approximative du secteur de l’électricité.

Et comme un malheur ne vient jamais seul, les spécialistes du secteur de l’électricité assurent que le délestage ne devrait même pas prendre fin avant la fin de l’année 2024. La Côte d’Ivoire fait face à un déficit de 250 MGW en raison des pannes intervenues à AZITO et CIPREL, les deux centrales thermiques qui alimentent une grande partie du réseau électrique national.

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