À moins de sept mois de la présidentielle ivoirienne, l’horloge tourne, et le Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) n’en finit pas de souffrir de dissensions internes. L’ancien parti unique de Félix Houphouët-Boigny, aujourd’hui emmené par l’ex-financier Tidjane Thiam peine à affirmer une ligne de conduite claire. Outre l’ambition assumée d’un probable candidat dissident nommé Jean-Louis Billon, c’est bien la légitimité de l’actuel président Thiam qui continue d’agiter certaines voix discordantes au sein de l’appareil du PDCI-RDA.
À tel point qu’une procédure judiciaire fût déposée à la hâte par une militante du PDCI. Celle-ci attaque la validité de l’élection de Tidjane Thiam à la tête du parti en décembre 2023. Derrière ces tribulations, demeure l’infatigable débat autour de la nationalité de Thiam, qui tend un peu plus le climat politique alors que la liste électorale fait l’objet de contentieux.
Une tempête nommée Valérie Yapo
Pour comprendre les récents déboires du PDCI, il faut s’intéresser à Valérie Yapo, militante, autrefois membre du Secrétariat général du parti et déléguée communale d’Akoupé. Quelques mois après l’élection de Thiam, cette dernière s’était érigée en porte-étendard des voix opposées au nouveau président. Déroulant son argumentaire, la nationalité française de l’intéressé, émerge rapidement comme l’un des éléments centraux de la contestation. Devant la menace, le PDCI avait ainsi décidé de l’exclusion temporaire de Mme Yapo ; sanction rendue publique début février 2025. Quelques jours plus tard, un courrier signé de quatre militants venait semer le trouble dans les rangs de l’appareil. Le document scanné, diffusé à grande vitesse sur les groupes WhatsApp, assignait le président Thiam en destitution. Rapidement désamorcée en interne, les protagonistes de cette affaire s’étaient rétractés.
En parallèle, Valérie Yapo conteste sa mise au ban du parti et décide de porter son combat devant la justice ivoirienne. Le tribunal finit par renvoyer la balle au PDCI, plus précisément à Tidjane Thiam lui-même. Pour calmer le jeu, le parti annonce par la voix de son porte-parole Soumaïla Bredoumy « l’annulation pure, simple et totale de toutes les sanctions à l’encontre de tous les militants ». Mais ce geste n’aura pas suffi à apaiser la situation puisque Mme Yapo, fraichement réhabilitée, a de nouveau saisi la justice requérant la nullité de l’élection du président Thiam. Depuis, la tension est montée d’un cran lorsque le 2 avril, plusieurs caciques du PDCI et une poignée de militants aient tenté de se rendre au tribunal pour afficher leur soutien à Tidjane Thiam.
Empêchés par l’important dispositif de sécurité déployé aux alentours du palais, la justice avait renvoyé la date du verdict à ce vendredi 11 avril. Expédiée en un quart d’heure, la séance aura finalement débouché sur une déclaration d’incompétence de la juge, refusant de statuer sur la légitimité de Thiam à la tête du parti.
Épée de Damoclès à quelques mois de la présidentielle
En dépit de cette crise politique interne, le PDCI a également dû composer avec la temporalité de l’échéance présidentielle. À quelques mois du vote, les électeurs attendent encore la nomination officielle du candidat. Une convention (primaire), promise de longue date aux militants, devrait désigner M. Thiam qui est le seul à avoir déposer un dossier de candidature. Fixée au 16 avril, celle-ci avait été annoncé lors d’un bureau politique qui s’est tout récemment tenu à Yamoussoukro. Ce rendez-vous au sommet, promesse de réconciliation pour certains, aura été placé sous le signe de l’absence. Tidjane Thiam s’est dit retenu en Europe, lorsque Jean-Louis Billon et Valérie Yapo ont tout simplement snobé l’événement.
À Découvrir
Le Kangourou du jour
Répondre
Au moment de la convention du 16 avril, une épée de Damoclès continuera donc de peser sur Thiam. Car l’incompétence de la juge pour traiter de son accession à la présidence du PDCI n’exclut pas une décision de fond au sujet de sa nationalité. À ce titre, des débats entre la partie requérante de Valérie Yapo et l’équipe de Tidjane Thiam viseront à statuer sur son cas le 24 avril. Bien qu’officiellement libéré de sa nationalité française, la validité de son identité ivoirienne continue d’interroger. Les autorités de Côte d’Ivoire semblent pour l’heure attendre ce verdict capital avant de se prononcer définitivement sur son statut civil. Thiam apparaissait pourtant sur le fichier de la liste électorale provisoire, laissant présager d’une situation personnelle conforme à la législation. Dans ce contexte, le Tribunal d’Abidjan se voit questionné sur son impartialité. Certains militants du PDCI dénoncent en effet une influence du pouvoir en place ; des accusations balayées froidement par Le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), d’Alassane Ouattara.
Ce feuilleton, loin d’être terminé, donne le ton d’une campagne présidentielle qui s’accélère. En coulisses, les contentieux de la liste électorale forment un autre sujet brûlant. Le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), de Laurent Gbagbo, a d’ores et déjà annoncé son retrait de la commission électorale, un positionnement fort auquel le PDCI-RDA de Thiam devrait emboîter le pas.
Crédit: Lien source